M. Michel Sainte-Marie attire l'attention de Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur le nouveau fichier policier « Edvige » mis en place par un décret du 1er juillet 2008. Ce dispositif, dénommé « exploitation documentaire et valorisation de l'information générale », permet de recueillir les données concernant des individus susceptibles de troubler l'ordre public. Il sera ainsi possible de connaître l'état, la profession, les coordonnées, les empreintes digitales voire génétiques de ces derniers mais aussi leurs signes distinctifs ainsi que différentes relations de la personne. Au-delà de la quantité d'informations qui peut être amassée et de leur caractère éminemment privé, un tel projet constitue une menace, aussi bien pour l'État de droit que pour les citoyens eux-mêmes. En effet, il est possible de ficher n'importe qui, au prétexte qu'il pourrait commettre un délit. Cette possibilité est d'autant plus grave qu'elle peut concerner un mineur dès l'âge de 13 ans. Ainsi, toute une catégorie d'individu pourrait être stigmatisée et voir ses droits et libertés gravement atteints. S'ajoute à cela le fait qu'un tel système ouvre la porte à des dérives qui, si elles sont en théorie illégales, ne manqueraient pas d'avoir des conséquences désastreuses. Si le fichage existe depuis longtemps, cela ne justifie en rien des excès liberticides. Face à cette menace bien réelle, des garde-fous sont plus que jamais nécessaires. Or les mesures annoncées par le Gouvernement s'avèrent largement insuffisantes pour le moment. Aussi, il lui demande quelles sont les garanties qu'elle souhaite apporter afin qu'une telle politique ne se fasse pas au détriment de la démocratie et des droits fondamentaux.
Le décret du 27 juin 2008 portant création du fichier EDVIGE évoqué par le parlementaire a été retiré par un décret du 19 novembre 2008. Pour mémoire, il constituait purement et simplement une reprise partielle du fichier des renseignements généraux (amputé de ce qui concerne le renseignement intérieur et les courses et jeux) créé par décret du 14 octobre 1991, intégrant les modifications apportées par une directive de 1995 et une loi de 2004. Il a pourtant suscité des inquiétudes et des malentendus. Afin d'y apporter des réponses, le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales a ouvert une vaste consultation puis décidé de présenter un nouveau décret. Celui-ci ne devait comporter que des données directement liées à la sécurité publique ou permettant de répondre aux demandes d'enquêtes de recrutement imposées par la loi. Il apportait des garanties renforcées à la liberté individuelle et au droit au respect de la vie privée, tout en préservant les moyens nécessaires aux forces de police pour assurer efficacement la sécurité des Français. À la suite des travaux du groupe de contrôle des fichiers de police et de gendarmerie présidé par M. Alain Bauer, puis du rapport parlementaire rédigé par Mme Delphine Batho et M. Jacques Alain Bénisti, la réflexion a encore évolué. La ministre de l'intérieur a décidé d'aller plus loin encore dans la transparence en séparant en deux fichiers distincts la prévention des atteintes à la sécurité publique et les enquêtes administratives. Le fichier consacré à la prévention des atteintes à la sécurité publique permettra en particulier de mieux surveiller les bandes, pour lutter plus efficacement contre les violences urbaines et l'économie souterraine. Il répondra ainsi à l'un des objectifs du plan de lutte contre les bandes violentes annoncé par le Président de la République le 18 mars 2009 à Gagny. Deux nouveaux projets de décret ont donc été transmis à la Commission nationale de l'informatique et des libertés. Dans le respect de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, ils comportent toutes les garanties nécessaires à la protection de la vie privée. Au-delà, il y a lieu de souligner que le ministre de l'intérieur, chargé de la protection des Français, est également chargé de garantir l'exercice des libertés publiques et attache donc le plus grand prix à ce que sécurité et liberté aillent de pair. C'est ainsi que le ministre a en particulier décidé de créer un service d'audit et de contrôle qui aura pour mission de veiller au respect du droit des fichiers dans l'ensemble des services du ministère. Il va de soi dans ces conditions que ces futurs traitements, comme l'ensemble des fichiers de police dont il convient de rappeler qu'ils constituent des instruments de travail essentiels dans la lutte contre la délinquance, ne seront pas mis en oeuvre « au détriment de la démocratie et des droits fondamentaux ».
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