Mme Marie-Jo Zimmermann attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur le fait qu'un message diffamatoire diffusé sur Internet bénéficie des mêmes règles de prescription très courte que la diffamation par la presse écrite. Or la diffusion sur Internet est une action continue et, en raison de la prescription, la personne qui en est victime ne dispose plus d'action pénale pour faire condamner celui qui réitère la publication sur son site ou qui la reprend sur un autre site. Pire, la victime ne peut même pas demander à la justice d'ordonner la suppression du message litigieux, ce qui est un comble. Il y a là une énorme carence de la législation et elle lui demande ce qu'elle envisage de faire pour qu'au moins la victime d'un acte de diffamation sur Internet ne soit pas pénalisée par le délai de prescription et puisse demander à la justice la suppression du message diffamatoire en cause.
La garde des sceaux indique à l'honorable parlementaire que, en matière d'infractions de presse commises sur Internet, par arrêts des 31 janvier 2001, 16 octobre 2001 et 27 novembre 2001, la Cour de cassation a réaffirmé que le délai de prescription de l'action publique court à partir du jour où « le message a été mis en place pour la première fois à la disposition des utilisateurs ». La loi pour la confiance dans l'économie numérique du 23 juin 2004 prévoyait de faire une distinction en matière de prescription suivant le support utilisé pour commettre l'infraction de presse. Ainsi, si le message était uniquement diffusé par le biais d'Internet, ou s'il avait d'abord été diffusé sur Internet, la prescription trimestrielle de l'action publique prévue à l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881 ne commençait à courir qu'à partir du moment où la mise en ligne du message litigieux avait cessé. Cette disposition a été jugée contraire à la constitution par le Conseil constitutionnel dans sa décision 2004-496 du 10 juin 2004. Le Conseil constitutionnel a estimé que, par elle-même, la prise en compte de différences dans les conditions d'accessibilité d'un message dans le temps, selon qu'il est publié sur un support papier ou qu'il est disponible sur un support informatique, n'est pas contraire au principe d'égalité. Toutefois, la différence de régime instaurée, en matière de droit de réponse et de prescription, par les dispositions de la loi pour la confiance dans l'économie numérique, dépasse manifestement ce qui serait nécessaire pour prendre en compte la situation particulière des messages exclusivement disponibles sur un support informatique. Le 4 novembre 2008, le Sénat a voté, en première lecture, la proposition de loi déposée par M. le sénateur Marcel Cleach visant à allonger de trois mois à un an la prescription des délits de presse lorsqu'ils sont commis sur Internet, avec cette réserve que lorsque le message diffusé en ligne ne sera que l'exacte reproduction d'un article ou de propos diffusés par la presse écrite ou audiovisuelle, le délai de prescription sera maintenu. En outre, il faut noter que la jurisprudence relative à la réédition qui fait courir un nouveau délai de prescription semble s'appliquer aux infractions de presse commises sur Internet. Plusieurs décisions juridictionnelles ont consacré la notion de réédition sur Internet lorsque les propos sont remis ou maintenus en ligne avec de nouvelles informations ou sur un nouveau support technique (tribunal de grande instance de Paris 26 février 2002, cour d'appel de Paris 27 février 2002, tribunal de grande instance de Paris 6 septembre 2004). Par ailleurs, la garde des sceaux rappelle à l'honorable parlementaire qu'en application de l'article 809 du code de procédure civile le juge des référés peut être saisi pour mettre fin à un trouble manifestement illicite qui résulterait d'une infraction de presse, y compris des faits diffamatoires (tribunal de grande instance de Paris 11 décembre 1996). Dans le cadre de ses pouvoirs, le juge des référés peut interdire la poursuite de la diffusion de l'article ou la suppression de certains termes, y compris sur Internet (tribunal de grande instance de Paris 13 juin 2005).
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