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Éric Raoult
Question N° 118602 au Ministère de la Justice


Question soumise le 27 septembre 2011

M. Éric Raoult attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur le concept de « feminicide », avancé et proposé par le père d'une jeune femme assassinée avec une amie en Argentine, durant l'été 2011. En effet, cette caractérisation des violences extrêmes envers les femmes qui est en fait une traduction d'un mot existant en Argentine est défendue par ce parent de la victime. Il veut le présenter aux différents prochains candidats aux élections présidentielles, pour être retenu dans leur programme. Ce « feminicide » qu'il convient de rapprocher du mot « génocide » rappelle les actes et violences menées contre des être humains. Ces violences extrêmes contre les femmes devraient être résumés par un mot et ce terme de « feminicide » résume bien cette propension très inquiétante dans notre pays. Il lui demande donc de lui indiquer sa position sur l'adoption de ce mot.

Réponse émise le 7 février 2012

La lutte contre les violences commises à l’encontre des femmes constitue une politique pénale prioritaire du ministère de la Justice et des Libertés.La question relative à l’introduction dans le code pénal du délit de « féminicide » a donc retenu toute l'attention  du Ministre et ce, au delà de la terminologie proposée, laquelle ne paraît pas appeler de commentaires particuliers. S'agissant de l'opportunité de cette mesure, les observations suivantes paraissent nécessaires : cette nouvelle qualification  de « féminicide » a effectivement été proposée par Jean-Michel BOUVIER, père de l’une des deux jeunes femmes assassinées en Argentine en juillet dernier.Dans ce contexte, il convient de rappeler que la notion de « féminicide » est  propre à l’Amérique du sud et répond à un besoin spécifique lié à la criminalité existant dans les pays concernés et qui viserait, à l'instar de l'incrimination de « génocide », à caractériser des actes de violences extrêmes subies par les femmes. Cette notion, née au Mexique, a fondé cette nouvelle incrimination : après le Pérou et la Bolivie, le Nicaragua a été le troisième pays, en décembre 2011, à prévoir dans son code pénal le crime de « féminicide », puni de 20 à 30 ans de prison. Sont ainsi incriminés les actes d'homicides commis contre des femmes et motivés par le fait qu'elle sont des femmes. Cela suppose que soit caractérisée la dimension misogyne du mobile de l'auteur.L’introduction d’une telle incrimination ne semble pas opportune dans le droit pénal français.En effet, les actes d'homicide sont déjà réprimés par les qualifications pénales les plus hautes et punis des peines les plus lourdes.Ainsi, l’article 212-2 du code pénal qui prévoit la réclusion criminelle à perpétuité lorsque l’homicide accompagne ou suit un crime peut s'appliquer à l’hypothèse d’un viol suivi d’un homicide. Une période de sûreté de 22 ans peut alors être également prononcée.De même, l'article 222-6 du code pénal incrimine et punit de la même peine les actes de torture et de barbarie ayant entraîné la mort.La notion de « féminicide » s'expose par ailleurs à une éventuelle inconstitutionnalité : elle repose en effet sur le postulat d'une distinction fondée sur le sexe de la victime, alors que les hommes et les femmes sont traités indistinctement dans les textes de loi.

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