Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Jean-Christophe Lagarde
Question N° 100192 au Ministère de la Défense


Question soumise le 15 février 2011

M. Jean-Christophe Lagarde attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de la défense et des anciens combattants, sur la situation des forces militaires françaises engagées en Afghanistan depuis bientôt dix ans. Il aimerait que soit présenté au Parlement un bilan de cet engagement qui comprenne à la fois les informations détenues par le ministère des affaires étrangères et le ministère de la défense concernant les actions menées, les progrès reconnus pour l'Afghanistan et les améliorations restant à apporter à cette démocratie en devenir. Il lui demande si un bilan présentant les résultats obtenus peut être à la disposition des parlementaires.

Réponse émise le 5 juillet 2011

Forte d'une relation ancienne et étroite avec l'Afghanistan, la France s'est engagée militairement dès la fin de l'année 2001, dans le double objectif de lutter contre le terrorisme et de soutenir la construction d'institutions afghanes légitimes et solides. Le bilan de l'engagement de la France en Afghanistan depuis dix ans peut être présenté autour des trois axes suivants : 1. La participation française aux opérations de la force internationale. Notre participation aux opérations en Afghanistan s'est développée en trois phases successives : de 2001 à 2002, la France a participé à l'opération de coalition Enduring Freedom avec une unité de l'armée de terre, déployée à Kaboul, une composante aérienne et des forces spéciales engagées dans le sud du pays ; de 2002 à 2006, la participation française s'est concentrée sur la Force internationale d'assistance à la sécurité (FIAS) dont elle est un des contributeurs significatifs (3e ou 4e participant selon les périodes) ; cette position lui vaut d'avoir assuré le commandement de la FIAS d'août 2004-février 2005, période durant laquelle la force internationale a commencé à étendre son champ d'action de la région de Kaboul à l'ensemble du territoire afghan ; de 2006 à aujourd'hui, l'engagement militaire français a évolué pour s'inscrire dans le cadre de la stratégie progressivement définie par la communauté internationale, à l'initiative de la France notamment. La campagne d'Afghanistan a, dans un premier temps, souffert d'un manque d'unité d'action stratégique en raison de la coexistence de deux forces aux buts divergents : l'opération Enduring Freedom, dirigée par les États-Unis, et la FIAS conduite par l'OTAN. Cette situation rendait alors complexe la mise en oeuvre d'une stratégie de contre-insurrection cohérente et efficace en Afghanistan. Le sommet de l'OTAN, qui s'est tenu à Bucarest en avril 2008, a mis un terme à cette situation. Sous l'impulsion décisive de la France, une stratégie globale et coordonnée avec les Nations unies a été adoptée autour de quatre piliers : afghanisation ; approche globale ; engagement de long terme ; coopération régionale. En 2008, à la suite du transfert réussi de la responsabilité sécuritaire territoriale aux forces afghanes, le dispositif terrestre allié a basculé progressivement vers l'est de l'Afghanistan et, depuis 2009, une brigade française assure le contrôle de la province de Kapisa et du district de Surobi, zones clés de contrôle des approches orientales de la ville de Kaboul. Depuis, un mouvement d'unification stratégique s'est opéré sur le théâtre des opérations. Il s'est traduit par le passage sous commandement de l'OTAN de l'essentiel des forces américaines, dont les effectifs ont été renforcés par les États-Unis à hauteur de 30 000 hommes entre 2009 et 2010. Cette unification s'est trouvée renforcée par la déclaration de Lisbonne de novembre 2010 qui a posé les bases de la transition vers le plein exercice des responsabilités de sécurité par les autorités afghanes d'ici à la fin 2014. Le sommet de Lisbonne a également donné lieu à la signature d'une déclaration sur un partenariat de long terme entre l'OTAN et l'Afghanistan, actuellement en cours de définition. La stratégie opérationnelle de contre-insurrection, initiée fin 2009, produit aujourd'hui des résultats positifs. Depuis l'automne 2010, une amélioration de la situation est constatée dans le sud du pays, zone d'intérêt stratégique la plus difficile. Le rythme opérationnel, particulièrement soutenu de l'automne, a été maintenu durant l'hiver 2010-2011 pour exploiter l'essoufflement de l'insurrection au Sud qui a perdu une part significative de sa capacité de coordination et a basculé sur des modes d'actions terroristes défavorablement perçus par la population. Au niveau stratégique, la France a été un moteur essentiel de l'évolution de l'approche de la question afghane par l'OTAN et contribue à un haut niveau, au sein du commandement de la FIAS, à la planification et à la conduite des opérations. Ses forces terrestres participent directement à la sécurité qui prévaut dans la capitale afghane, et ses forces aériennes mènent quotidiennement des opérations dans le sud du pays, où les positions de la rébellion ont enregistré un recul ces derniers mois. La crédibilité des armées françaises en ressort renforcée et contribue directement à l'émergence d'une prépondérance militaire française dans l'Europe de la défense en construction. L'originalité de l'approche française des opérations militaires en Afghanistan réside dans son investissement, dès la chute du régime taliban, dans la formation d'une armée nationale afghane (dispositif Epidote). À elle seule, la France a ainsi formé, depuis 2001, 11 000 officiers de l'armée nationale afghane et créé l'ossature de ses forces spéciales en instruisant près de 6 000 commandos. Quinze bataillons - soit l'effectif d'une division - ont été formés puis encadrés par des professionnels français. Au-delà de l'impact décisif sur les opérations et l'émergence d'une armée nationale afghane, ce bilan confirme la place de la France en tant que partenaire militaire de premier plan au sein de l'Alliance, et comme pays ami de la nation afghane. 2. La construction d'un État afghan viable et solide. La France prend toute sa part à l'effort international, pour que soit atteint le plus rapidement possible l'objectif d'une stabilisation durable de l'Afghanistan et d'une maîtrise complète par les Afghans de leur destin national. Au plan diplomatique, la France a participé activement à la coordination internationale sur l'Afghanistan. La thématique de l'appropriation des responsabilités par les Afghans, lancée à l'initiative de la France lors de la conférence de Paris en 2008, a été consacrée lors des conférences de Londres (janvier 2010) et de Kaboul (juillet 2010), qui ont renouvelé les relations de la communauté internationale avec les autorités afghanes. Dès 2008, la France a défendu le renforcement de la coopération régionale en organisant la conférence de La Celle-Saint-Cloud. Sur le plan de l'aide civile, la France est engagée dans de multiples projets concernant les domaines de la santé (notamment l'Institut médical français pour l'enfant et son extension), de l'agriculture et du développement rural (en particulier la relance de la filière cotonnière et un dispositif d'assistance technique renforcé auprès du ministère afghan de l'agriculture), de l'éducation et de l'enseignement du Français (réhabilitation des lycées franco-afghans et du centre culturel français, transformé en institut français), ainsi que de la gouvernance et de la sécurité intérieure (appui au Parlement afghan, formation des juges et des policiers, soutien à la commission afghane des droits de l'homme). Le montant de notre aide civile globale à l'Afghanistan est passé d'une dizaine de millions d'euros en 2007 à 40 millions en 2009 et en 2010. À l'été 2010, la France a déployé un « pôle stabilité » chargé du pilotage des projets de gouvernance et de développement dans sa zone de responsabilité, en Kapisa et Surobi, où se concentre une large partie de nos crédits d'aide civile. Cette structure, adossée au dispositif militaire français (Task Force La Fayette) et dirigée par un haut représentant civil placé sous l'autorité de l'ambassadeur de France à Kaboul, vise à renforcer la cohérence de notre effort national et à jouer un rôle d'interface avec la branche civilo-militaire de la FIAS, les autorités locales afghanes et les différents acteurs du développement et de la gouvernance. La consolidation des gains obtenus en matière de sécurité dépend de la mise en place d'une meilleure gouvernance afghane. Malgré des progrès, les efforts de déploiement d'une administration locale compétente doivent se poursuivre. La montée en puissance des ANSF (Afghan national Security Force) se confirme et un nouveau programme de réintégration des combattants commence à être appliqué dans les différentes provinces (Afghan Peace and Reintégration Program). Un haut-conseil pour la paix a été institué dans le but de superviser la mise en oeuvre de ce programme et d'explorer les possibilités de négociations avec l'opposition armée en vue d'un processus de réconciliation inter. 3. Le renforcement de l'efficacité et de la visibilité de l'action de l'Union européenne (UE). La France s'est attachée à renforcer l'efficacité et la visibilité de l'action de PUE en Afghanistan. Elle a, au plan local, pris des initiatives dans ce but lors de la présidence française du Conseil de l'Union européenne en 2008. De même, elle a renforcé sa participation dans la mission de police EUPOL Afghanistan et lancé une initiative en faveur du déploiement, complémentaire, de formateurs et tuteurs de gendarmerie européens (dans le cadre de la force de gendarmerie européenne). Ces efforts ont été poursuivis par la présidence suédoise et ont débouché en 2009 sur l'adoption par les 27 États membres d'un plan d'action européen pour l'Afghanistan. Ce plan d'action identifie six grandes priorités pour l'UE en Afghanistan : soutien au renforcement des capacités afghanes et de l'appropriation des responsabilités ; soutien au renforcement de l'état de droit ; soutien au développement économique et social ; renforcement de la coordination européenne ; aide humanitaire et soutien au renforcement de la coopération régionale. Un travail de suivi régulier des modalités de mise en oeuvre de ces grandes priorités est mené par la Commission et les États membres. La désignation en 2010 d'un représentant unique de PUE à Kaboul, demandé de longue date par la France, a aussi permis d'accroître l'efficacité et la visibilité de l'action de l'Union en Afghanistan. Au final, l'ensemble de ces actions, par leur efficacité, leur cohérence dans le temps et leur crédibilité, a contribué à renforcer la capacité d'influence de la France et de ses partenaires dans la gestion globale de la crise afghane. Enfin, il est précisé que le ministère des affaires étrangères et européennes et le ministère de la défense et des anciens combattants réalisent conjointement, depuis 2009, un document de synthèse expliquant l'engagement de la France en Afghanistan et les progrès accomplis depuis 2001. Imprimé en six langues, il a été diffusé auprès des ministres, des hauts fonctionnaires, des leaders d'opinion, des élus, des industriels de défense, des médias et des réseaux diplomatiques. Ce document, réactualisé chaque année, est également disponible sur le site Internet du ministère de la défense et des anciens combattants.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.

Inscription
ou
Connexion