Ces discriminations légales, qui visent à écarter des individus en raison de leur nationalité et non en raison de leurs compétences, constituent un obstacle supplémentaire dans le processus d'insertion, à l'heure où l'on exige de l'étranger qu'il s'intègre dans sa société d'accueil.
Madame la rapporteure, certaines mesures préconisées dans votre proposition de loi, qui concernent la lutte contre les discriminations et l'observation des progrès en matière de diversité, nous semblent témoigner d'une réelle avancée par rapport à la position socialiste traditionnelle sur ces questions. Néanmoins, elles sont globalement en deçà des missions qui ont été confiées par le Président de la République au commissaire à la diversité et à l'égalité des chances. Qu'il s'agisse des conditions d'accès aux marchés publics – article 1er – ou des informations qui doivent figurer au bilan social – article 3 –, de telles actions de lutte contre les discriminations ne peuvent suffire à établir le bien-fondé d'une politique publique incitative car elles sont inévaluables en l'absence d'outil statistique ! J'ai toujours été partisan d'introduire des critères de performance dans l'évaluation des politiques publiques, et de discuter sur la base de résultats plutôt que sur des principes et des effets d'annonce. L'expérience de la réforme de l'État nous a montré que, sans observation ni mesure des résultats, il n'y a pas de performance. Lutter contre les discriminations sans statistiques permettant d'observer l'efficacité d'une telle politique, ce serait comme lutter contre le chômage sans avoir de statistiques sur le chômage !
Si ce raisonnement vaut pour la réforme de l'État, il vaut également pour les enjeux de société sur lesquels repose la cohésion sociale de notre pays.
Ainsi, l'accessibilité aux grandes écoles, que vous avez évoquée, est un des enjeux du renouvellement social des élites. Mais les grandes écoles sont-elles prêtes à élargir les critères du recrutement par concours pour être capable d'intégrer, par exemple, un excellent élève de la filière bac technologique, et pas seulement celui issu de l'enseignement général ? Sont-elles prêtes à développer les filières d'apprentissage, et ce afin de ne pas se limiter aux seules filières d'enseignement général, souvent absentes des zones urbaines sensibles ? Ces questions ne valent pas seulement pour les jeunes d'origine étrangère.