Comment cela ? Je lutte depuis 1971 contre les pesticides que l'on retrouve dans les rivières bretonnes, je lutte contre le modèle productiviste développé en Bretagne.
L'Organisation mondiale de la santé a estimé que chaque année un million d'empoisonnements graves dans le monde sont dus aux pesticides, dont 220 000 sont mortels. En France, la Mutualité sociale agricole qui a en charge la médecine du travail et la prévention des risques professionnels chez les salariés agricoles, a trouvé des effets indésirables chez près d'un manipulateur sur six lors d'enquêtes portant sur une année d'utilisation professionnelle de pesticides. Mais ces enquêtes n'ont été réalisées qu'au plan local, alors que l'étude AGRICAN est une grande enquête nationale.
Le dernier point que je veux évoquer concerne le coût énergétique de la chaîne alimentaire. Les chiffres montrent qu'il existe une relation entre les prix de l'énergie qui ne cesseront de croître dans les années qui viennent, et les prix de certaines denrées alimentaires qui commencent à être élevés, comme le lait, le beurre et les pâtes, par exemple.
Trois tonnes de pétrole sont nécessaires pour obtenir une tonne d'engrais azoté. Le prix bas des denrées alimentaires était dû jusqu'à présent au prix bas des énergies fossiles.
L'agriculture produit 19 à 24 % des émissions de gaz à effet de serre et un kilogramme de protoxyde d'azote, produit émis principalement par les sols cultivés, contribue autant à l'effet de serre que 310 kilogrammes de CO2.
En ce qui concerne spécifiquement les fruits et les légumes, il faut cinquante fois plus de pétrole pour les faire venir par avion en contre-saison que pour les produire localement en saison. Il n'est donc pas faux de dire que nous mangeons du pétrole.
Au XXe siècle, ce moment de l'histoire a été ironiquement appelé « révolution verte ». Bien évidemment, je ne reprends pas cela à mon compte. L'industrialisation de l'agriculture et par conséquent un emploi massif des hydrocarbures a en fait rendu plus intensive l'utilisation de mécanismes, de machines et d'intrants qui proviennent globalement des hydrocarbures. Par ce phénomène technologique, la chaîne agroalimentaire est devenue un gouffre énergétique. Elle consomme en fait beaucoup plus d'énergie en amont qu'elle ne produit de calories en aval : il faut dépenser treize calories, dont sept en pétrole, pour chaque calorie dans notre assiette.