Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure, mes chers collègues, prenons garde à la psychose et à la stigmatisation qui tendraient à faire croire que ce sont les rottweilers, les dogues de Bordeaux ou les bergers des Pyrénées qui sont les plus dangereux des chiens. Les chihuahuas, les caniches ou les labradors ne sont pas moins susceptibles mordre.
La loi de 1999, qui avait pour objectif de juguler le phénomène dit des « molosses », a rempli l'essentiel de sa mission puisque les chiens visés, essentiellement ceux de la catégorie 1, sont retournés dans la confidentialité ; elle a posé ainsi un premier cadre d'action.
La loi de 2007, relative à la prévention de la délinquance, visait à accroître les sanctions encourues en cas d'infractions aux interdictions qui s'appliquent.
Pourtant, 100 000 morsures par an sont comptabilisées dans les services de médecine, sans compter celles qui ne sont pas référencées. Le rapport les estime à 500 000 par an, et 80 % d'entre elles surviennent dans le milieu familial.
Cela signifie que, si toute race de chien est potentiellement dangereuse, aucune d'entre elle ne l'est intrinsèquement.
C'est d'ailleurs le sens de ce projet de loi qui met l'accent sur l'identification des chiens mordeurs – petits, grands ou moyens –, sur leur évaluation comportementale et sur l'attestation d'aptitude, tout en développant une approche plus systématique pour les chiens de catégorie 1 et 2.
Néanmoins, le nombre de race de chiens, de 350 à 400, comporte un défi tant pour leur identification par les différents intervenants, que du fait de l'apparition de nouvelles races – dogue argentin, cane corso, par exemple – ; et les croisements autorisés, qui les rapprochent de ceux de la première catégorie, sans y figurer nommément, ne facilitent pas la tâche.
Vous le constatez, la présence massive de chiens en France – de 9 à 10 millions – confirme la place éminente et positive qu'ils occupent. Il faut l'apprécier à sa juste valeur, mais également mieux l'encadrer pour éviter de faire du chien un objet simplement utilitaire.
De la crainte à la sympathie, de l'indifférence à la passion, la présence canine mérite d'être mieux prise en compte pour ramener de la déontologie dans certaines pratiques, avec l'aide des acteurs publics, professionnels et associatifs qui, tous, attendent impatiemment de disposer d'un cadre législatif renforcé, porteur d'éthique, qui impulsera une application concrète de ces mesures sur le terrain. À cet égard, il serait plus qu'utile que les préfets s'assurent de l'obligation, pour chaque commune, de la signature du contrat de fourrière.
Cette approche renforcée et plus systématique pourrait ainsi concerner les conditions d'élevage des chiens, la prévention à l'égard des publics les plus vulnérables, comme les enfants, et l'information plus large par une mobilisation du service public.
Plusieurs de nos voisins européens ont systématisé l'éducation des chiens, accompagnés de leurs propriétaires ou détenteurs, tout comme ils ont renforcé le contenu et la définition de la formation des éducateurs canins.
Certes, personne n'est à l'abri d'un accident de parcours dans le comportement de son chien, mais notre société aurait probablement à gagner d'une approche plus globale de la vie canine pour faire progresser les conditions d'une vie partagée, où l'ignorance ne conduira plus à tant d'accidents parce qu'elle aura reculé.
La mise en place d'un observatoire national canin contribuerait à inscrire cette question dans la durée pour y faire converger les bonnes pratiques et les constats, et permettre ainsi d'orienter l'action publique, afin que l'événementiel médiatique le cède à la constance des efforts partagés, engagés par tous les partenaires.
Pas plus l'ignorance que la défiance ne peuvent tenir lieu de conduite, et c'est bien la confiance que nous voulons promouvoir. Elle se construit, et cette loi sera une étape supplémentaire qui y mènera.
Dans cette attente, je vous remercie, monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, de votre attention. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)