Vous faites en effet l'inverse, et la situation devient dramatique.
Alors que 13 500 postes sont supprimés dans l'enseignement scolaire, l'administration pénitentiaire est le seul secteur qui bénéficiera de créations d'emplois en 2009. Certes, elle en a bien besoin, mais ses moyens demeureront néanmoins insuffisants. L'inversion des priorités au profit de la répression et au détriment de l'éducation et de la prévention est inacceptable.
Le budget de fonctionnement de la justice, notamment des juridictions, est dans une situation catastrophique. Les dernières analyses comparatives du Conseil de l'Europe, d'octobre dernier, sont sans appel : la France se situe au trente-cinquième rang européen et est l'un des États qui consacre la plus faible part de son budget à la justice. Dans l'un des pays les plus riches de notre continent, la justice est indigente. Cet état de pauvreté endémique préoccupe l'ensemble de l'institution.
La situation ne devrait pas s'améliorer dans les années à venir. Les départs massifs à la retraite, qui débuteront dans deux ans, ne sont absolument pas anticipés ! J'en veux pour preuve les quatre-vingts places ouvertes au concours de la magistrature cette année. Il faut remonter à 1993 pour trouver un objectif de formation aussi peu élevé !
Vous me rappellerez sans doute, monsieur le ministre, que vous héritez de plusieurs années de déficit et que ce n'est pas chose facile de le combler rapidement, mais vous ne pouvez nier non plus que, durant toutes ces années, les députés communistes n'ont cessé de réclamer davantage de moyens pour la justice.
Pour autant, comme vous le dites vous-même, « plus de moyens, plus de crédits, pour quoi faire ? ». En effet, comme les lois, les dotations budgétaires peuvent servir le meilleur et le pire !
Ce budget, comme les réformes que vous menez, est malheureusement au service d'une politique pénale inquiétante. Une politique d'autant plus inquiétante qu'elle est incohérente. Vous n'êtes pas, en effet à une contradiction près. Vous réclamez plus de sévérité, plus de peines de prison pour les mineurs, mais dans le même temps vous fustigez les magistrats qui ont décidé l'incarcération d'un mineur en les rendant responsables du fait que ce jeune se soit donné la mort pendant sa détention ! Une bonne politique pénale ne peut se conduire à coups d'injonctions contradictoires.
Le programme de l'administration pénitentiaire, votre préoccupation prioritaire, souffre des mêmes maux. Les lois que vous avez fait voter par votre majorité, notamment les peines planchers, ne cessent de contribuer à la surpopulation carcérale : plus de 63 000 détenus aujourd'hui pour moins de 51 000 places ! Le nombre élevé des suicides est le révélateur de conditions de détention insupportables, lesquelles sont d'ailleurs à l'origine de la condamnation de la France, le 16 octobre dernier, par la Cour européenne des droits de l'homme. Malheureusement, en raison de l'agrandissement du parc pénitentiaire et des nouvelles missions prévues, les effectifs supplémentaires ne permettront pas d'améliorer la situation des personnels, qui continueront de pâtir d'une grave pénurie d'effectifs.
Un mot, enfin, sur le programme de la protection judiciaire de la jeunesse. Il n'aura pas failli à la tradition : le budget affecté aux mesures éducatives et au milieu ouvert souffre de la priorité accordée aux mesures en direction des mineurs délinquants : 18,61 % contre 62,48 % ! Ce nouveau pas vers l'abandon de la priorité éducative dans la réponse à la délinquance des mineurs ne fait que confirmer la commande que vous avez passée auprès de la commission Varinard sur l'ordonnance du 2 février 1945. Nous continuerons à nous opposer avec détermination à cet abandon parce que nous restons persuadés que la prévention, l'éducation et la réinsertion sont les clefs d'une lutte efficace contre la délinquance des mineurs.
Vous l'aurez compris, monsieur le ministre, nous voterons contre ce projet de budget.