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Intervention de Patrick Braouezec

Réunion du 21 mai 2008 à 21h30
Modernisation des institutions de la ve république — Motion de renvoi en commission

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrick Braouezec :

L'ensemble des facettes politiques, de l'architecture institutionnelle à la participation citoyenne, dans toutes ses dimensions, doit être pris en compte pour redonner sens et goût au politique, à la chose politique, à ce qui fait et doit faire sens collectivement. Voilà ce qui devrait fixer notre conduite et notre mission. Nous ne pouvons ni ne devons nous accommoder du divorce de plus en plus marqué entre les citoyens et leur République.

Sous le couvert d'accorder aux justiciables une nouvelle possibilité de saisine du Conseil constitutionnel – institution inchangée tant dans ses prérogatives et son fonctionnement que dans sa composition – ou encore de mettre en place un défenseur des droits du citoyen, qui fait figure de reniement politique d'autorités indépendantes comme la Commission nationale de déontologie de la sécurité ou la Commission nationale de l'informatique et des libertés, pourtant essentielles à la démocratie et au besoin de transparence dans certains domaines de la vie quotidienne des citoyens, c'est bien le citoyen en tant que tel qui est nié.

Quid du référendum d'initiative populaire ? Quid du pluralisme des médias, dont le renforcement aurait manifesté de votre part une réelle volonté de permettre l'expression constructive du peuple ? Quant au droit d'initiative populaire promis par M. Fillon, permettez-moi d'attendre de voir le résultat écrit de cette proposition !

Mais il en va tout autrement, madame la garde des sceaux. Voilà un an que votre gouvernement est au pouvoir : un an que les droits fondamentaux sont bafoués, dans des domaines très différents qui couvrent l'ensemble de la vie quotidienne de nos concitoyens, ce qui la rend insupportable ; un an de régression démocratique, au nom de la personnalisation du pouvoir aux mains d'un seul homme, un président boulimique ; une année durant laquelle vous avez dessiné une société qui se méfie de ses citoyens au point de leur tirer progressivement les droits qui, précisément, les font devenir citoyens. Or une société qui préfère les clients aux citoyens, qui désarme ces derniers pour mieux les contraindre est une société liberticide qui nie le principe de séparation des pouvoirs.

Et je ne parle pas des promesses trahies, des aspirations déçues ou de la défiance des citoyens à l'égard des institutions, de la représentation politique et – plus grave encore – de la politique elle-même, autant de phénomènes qui participent à la crise du politique devant laquelle je refuse d'abdiquer. Je pense au contraire que chacun d'entre nous peut aspirer à intervenir dans tous les domaines de la vie sociale, à jouer partout le rôle qui peut et qui doit être le sien, à y être respecté, écouté pour ce qu'il sait ou peut faire. Nous devons faire en sorte que tout citoyen, quel qu'il soit, d'où qu'il vienne, soit perçu comme un individu riche de sa personnalité, de sa diversité, capable à tout moment de mobiliser ses capacités intellectuelles, ses savoirs et ses savoir-faire pour agir collectivement, sans se heurter a priori et de façon arbitraire aux intérêts des pouvoirs en place.

Aujourd'hui, c'est presque un lieu commun de le rappeler, nos institutions, notre République sont en crise. Constituées en 1958, elles correspondaient à un contexte politique, économique et social très particulier : les dirigeants de la France d'après-guerre, coloniale, rurale, hiérarchisée, centralisée, y ont répondu par le texte de 1958 qui, à bien des égards, était déjà anachronique et l'est encore plus aujourd'hui : anachronique dans ses fondements, anachronique dans le paysage européen, anachronique enfin – et c'est certainement le plus important – par rapport à la situation actuelle de la France.

L'ascenseur social est en panne, les inégalités explosent, l'exclusion d'une partie croissante de la population remet directement en cause les principes démocratiques fondamentaux d'égalité et de solidarité. Ces inégalités coupent certains de nos concitoyens des moyens d'exercer leur citoyenneté : une citoyenneté à plusieurs vitesses s'instaure. L'État, ses bureaux, ses experts, cette classe politique professionnelle…

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