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Intervention de Patrick Braouezec

Réunion du 21 mai 2008 à 21h30
Modernisation des institutions de la ve république — Motion de renvoi en commission

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrick Braouezec :

Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, madame la garde des sceaux, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, une semaine après le coup de théâtre parlementaire que nous devons tant à la force de persuasion de notre collègue, André Chassaigne, qu'à l'absence et à la discorde de vos troupes, nous abordons aujourd'hui un texte que vous nous présentez comme fondamental.

Madame la garde des sceaux, la semaine dernière, le projet de loi sur les OGM a été repoussé, certes, à une voix près, mais l'Assemblée nationale l'a bel et bien rejeté. Cet épisode continue pourtant de résonner dans l'hémicycle. Quant au vote d'hier après-midi, il a un arrière-goût très désagréable. Aujourd'hui, vous nous présentez un autre texte, censé renforcer les pouvoirs du Parlement. Entendez-vous nous démontrer que le passage en force n'aurait plus lieu d'être ? Qu'une fois la révision adoptée, nous serons naturellement entendus ? Pensez-vous que cette démarche soit vraiment crédible ? Pour ma part, je ne le crois pas et je vais m'efforcer de le démontrer avec le texte qui nous occupe aujourd'hui.

La Constitution ne se réforme pas dans l'urgence, madame la garde des sceaux. D'autant que nous sommes nombreux ici, et en dehors de cette assemblée, à souhaiter une révision constitutionnelle, et non un simple dépoussiérage. Une révision où chacun aurait son mot à dire ; une révision qui ferait en sorte que les citoyens deviennent acteurs, à part entière de la vie politique et publique, et non passifs, voire victimes, comme les transforment votre projet politique en général et ce texte en particulier. Bref, une révision constitutionnelle qui donnerait le la à une république réellement démocratique, citoyenne et parlementaire ; une révision qui se fixerait des objectifs clairs et partagés par le plus grand nombre, y compris au sein de votre majorité.

La création, en septembre dernier, du comité présidé par M. Balladur partait d'une bonne idée. Et même si ses soixante-dix-sept propositions ne vont pas assez loin, à nos yeux, il faut reconnaître qu'il a permis une réflexion large, appuyée sur de nombreuses auditions. Pour autant, il ne peut ni ne doit, en aucun cas, remplacer le travail parlementaire sur cette question. Il ne doit pas davantage se substituer à l'expression de la volonté populaire.

M'insurgeant contre une méthode très contestable dépossédant les politiques du débat public au profit du seul débat privé des experts, j'entends user de cette motion de renvoi en commission pour rappeler que ce projet n'est qu'une pâle version de ce que les citoyens sont en droit d'attendre, compte tenu du tapage médiatique dont il a fait l'objet.

J'aimerais que vous m'expliquiez comment ses trente-cinq articles vont pouvoir répondre aux exigences de « nos concitoyens qui aspirent à une République exemplaire, à une démocratie irréprochable », selon les termes mêmes de l'exposé des motifs, lequel ajoute que « le texte s'articule autour de trois orientations qui se confortent mutuellement : un pouvoir exécutif mieux contrôlé, un Parlement profondément renforcé et des droits nouveaux pour les citoyens ». Nous n'avons pas dû lire le même texte. Comme d'habitude, l'exposé des motifs, les déclarations médiatiques et le texte proposé ne participent pas du même discours…

Ne perdons pas de vue que ce texte n'est qu'un trompe-l'oeil, où des avancées trop peu risquées pour être considérées comme telles, trop floues pour être acceptables masquent des régressions bien plus graves : présidentialisation du régime, dérive vers le bipartisme, réduction des droits des parlementaires dans le débat public, réformes gadgets sans grande portée mais présentées comme des avancées – je pense notamment à celle de l'article 16. Ce projet n'est pas à la hauteur des enjeux.

Nous aurions besoin d'un texte qui réforme en profondeur nos institutions ; en lieu et place, nous avons des mesures cosmétiques qui maquillent la seule et unique raison qui nous vaut sa présentation : le discours du Président de la République devant le Parlement.

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