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Intervention de Victorin Lurel

Réunion du 17 novembre 2008 à 21h30
Projet de loi de finances pour 2009 — Article 43

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaVictorin Lurel :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, je rappellerai – ce que d'autres ont fait avant moi – les propos que le candidat Nicolas Sarkozy a tenus le 12 juillet 2006, chez moi, à Pointe-à-Pitre : « Présenter la défiscalisation outre-mer comme un ensemble de niches fiscales révèle pour le moins une méconnaissance de la réalité économique de terrain. La défiscalisation est en réalité un outil de développement pour des économies sous-capitalisées et spontanément peu attractives pour des investisseurs. Des engagements ont été pris par l'État, par la loi Girardin en 2003 sur quinze ans : ils doivent être respectés. » On le constate : tel n'est pas le cas.

Levons aussitôt une ambiguïté : comme je l'ai déjà rappelé, mais il est bon de le répéter, voire de le marteler, nous ne sommes pas moins égalitaires que d'autres ni moins partisans du respect scrupuleux de l'égalité devant l'impôt et les charges publiques. Nous participons, dans cette maison laïque, à cette communion-là. Il n'est pas normal que les grosses fortunes ou les contribuables aisés et bien dotés puissent échapper totalement à l'impôt. Toutefois, en dépit de cette ultime et tardive tentative de moralisation, par le biais du bouclier fiscal, certains échapperont toujours à l'impôt.

En revanche, ce que nous voulons éviter, c'est que ces riches contribuables se réfugient sur d'autres niches fiscales ou d'autres dispositifs, avec le même résultat pour le Trésor public, à savoir une fuite devant l'impôt. On aura beau plafonner analytiquement ou globalement, avec le bouclier fiscal nous aurons des fuites.

Je souscris aux propos de Gabrielle Louis-Carabin et de Gaël Yanno. J'ai entendu les applaudissements de notre rapporteur général Gilles Carrez. J'aimerais d'autant plus qu'ils le suivent sur tout qu'on fait souvent dans l'hexagone une confusion entre les différents dispositifs fiscaux. Il faut le répéter, le marteler : l'investissement productif outre-mer implique une rétrocession allant de 50 % à 60 % selon les secteurs et en fonction des montants investis. Pour un investissement dans le « Malraux », qui sera peut-être ramené, si ce n'est déjà fait, à 100 000 euros, en vertu du taux marginal l'avantage fiscal net sera de 40 000 euros, alors que pour un investissement outre-mer, toujours pour 100 000 euros, l'avantage sera inférieur à 20 000 euros. Pour 1 million d'euros d'investissement, avec le nouveau dispositif, l'avantage ne dépassera pas 30 000 euros. Les sociétés en défiscalisation auront du mal à trouver des contribuables intéressés, d'autant qu'il faudra désormais en avoir un nombre bien plus important pour obtenir le même résultat. C'est pourquoi la comparaison des différents avantages entraînera pour nous un problème d'attractivité alors même que, comme je l'ai déjà dit, nous travaillons sous contrainte. Aussi, faisons attention !

Même si c'est désagréable à entendre pour les oreilles gouvernementales, je tiens à le répéter : l'État est absent de nos régions. Il ne finance plus de grands chantiers outre-mer, si ce n'est récemment chez moi la rénovation urbaine – je le reconnais –, mais elle n'a pas véritablement commencé. Il convient donc de préserver la ressource que représente la défiscalisation.

La rédaction du Gouvernement supprime une des mesures essentielles en faveur des très petites entreprises, la défiscalisation dite en interne, laquelle concerne les entreprises qui ne font pas appel à des tiers mais autofinancent leurs investissements. Or, alors que M. Jégo voulait sanctuariser ce dispositif qui prévoit une créance sur l'État lorsque tout l'avantage fiscal n'a pas été répercuté ni imputé, Bercy l'a désavoué – M. Jégo a du reste été surpris – et vous supprimez la possibilité pour l'entreprise de céder aux banques ces créances sur l'État, prévue à l'article 5, alinéa 6 du paragraphe A. Ainsi, loin de prendre en considération les propositions du rapporteur général, et sans tenir compte de la faiblesse de nos fonds propres, allant au-delà du plafonnement vous supprimez l'imputation, le remboursement par l'État et la possibilité pour les entreprises de céder aux banques leurs créances sur l'État. Ce faisant, vous asséchez du jour au lendemain une source importante permettant de renforcer ces fonds propres et de financer les petites et moyennes entreprises. Or, chacun le sait, notre problème, c'est le vote du bilan : c'est donc contradictoire.

Je n'aime pas la méthode consistant à faire voter en premier ce qui fait mal, à savoir les dispositifs fiscaux : nous devons d'abord payer puis attendre les hypothétiques avantages, et ce alors même que nous ignorons quand le projet de loi pour le développement économique de l'outre-mer – la LODEOM – sera programmé. La même méthode a déjà été employée pour le RSA et le sera pour la publicité sur RFO – 0,5 % pour les contrats de fourniture d'accès à Internet et 3 %, peut-être, sur la publicité – sans que nous voyions les avantages. Il faut revoir l'économie générale de la rédaction de ce texte : je suis prêt à retirer mes amendements si le Gouvernement ou le rapporteur général présentent un sous-amendement en ce sens.

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