J'ajoute que certaines augmentations sont à l'inverse bienvenues : une augmentation du nombre d'affaires de stupéfiants n'est pas forcément l'indice que les affaires de stupéfiants se multiplient dans notre pays : cela peut être l'indice d'une plus grande efficacité des services de police. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Qu'il y ait une augmentation des violences n'est pas forcément atterrant, s'il y a par exemple une réaction sociale plus forte vis-à-vis des violences et que les victimes portent plainte beaucoup plus facilement. Ainsi, la réaction des femmes qui ne subissent aujourd'hui plus les violences conjugales sans réagir contribue à une augmentation du nombre des violences.
Autrement dit, l'appréhension de la délinquance par un chiffre unique est une erreur, et à force de l'utiliser, nous nous privons d'un débat serein. Cela a été très efficace politiquement en 2002, mais cela nuit à la qualité du débat public.
J'en reviens à la proposition de loi. Ce n'est pas la délinquance étrangère qui pose problème : c'est une délinquance très particulière, et si j'ai bien compris, empiriquement, on peut dire que la délinquance qui pose problème est d'une part roumaine, et d'autre part celle de bandes venues d'Europe de l'Est.
On peut attribuer la délinquance roumaine, en général, aux Roms qui séjournent en France ; quant à la délinquance de l'Est, c'est une délinquance itinérante, très professionnelle semble-t-il, de bandes qui se déplacent pour venir commettre des cambriolages.
Il était inutile, dans une période où un parti xénophobe rassemble 16 % des intentions de vote, de stigmatiser une délinquance « étrangère », quand ce texte ne débouchera de toute façon pas sur une loi.
La loi n'est d'ailleurs pas le seul moyen de répondre à la délinquance. Les Roumains et les Bulgares sont dans une situation très particulière : la France a décidé d'appliquer une période de transition – nous étions libres de le faire ou de ne pas le faire, et certains pays ne l'ont pas fait. Durant cette période, les citoyens roumains et bulgares ont la particularité de pouvoir venir s'installer dans notre pays, sans pouvoir y travailler. Dans un premier temps, 150 métiers leur étaient ouverts ; aujourd'hui, cette liste ne comprend plus que 75 métiers. De plus, l'employeur qui les embauche en contrat à durée déterminée doit payer une taxe de 750 euros à l'Office français de l'immigration et de l'intégration.
J'ai personnellement essayé de caser un certain nombre de Roms qui séjournent dans ma circonscription chez des viticulteurs qui, ayant du mal à trouver de la main-d'oeuvre, sont demandeurs : à l'évidence, quand on leur annonce qu'il faut payer plus de 700 euros pour embaucher quelqu'un qui parle pas français, il y a quelques difficultés !