Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Jean-Paul Garraud

Réunion du 1er mars 2012 à 15h00
Renforcement de la peine d'interdiction du territoire et répression des délinquants réitérants — Discussion d'une proposition de loi

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Paul Garraud, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République :

Monsieur le président, monsieur le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, mes chers collègues, notre assemblée est aujourd'hui saisie, en première lecture, d'une proposition de loi que j'ai déposée avec cent trente-sept de mes collègues et dont l'objet est d'adapter la réponse pénale aux actes commis par les délinquants de nationalité étrangère, d'une part, et par les auteurs d'infractions multiples, d'autre part.

Je commencerai la présentation de la proposition de loi par ses articles 2 et 3 concernant les réitérants.

Ces deux articles partent d'un constat simple : en 2009, 38 % des condamnés pour délit avaient déjà été condamnés définitivement par le passé et se trouvaient soit en situation de récidive – 10 % du total des condamnés – soit en situation de réitération – 28 % du total des condamnés. En outre, les auteurs de crimes ont très fréquemment déjà été condamnés pour des délits d'une nature similaire : les auteurs de vols criminels sont près de 60 % à avoir déjà été condamnés pour une atteinte aux biens, les auteurs d'homicide ou de violences criminelles sont 18,2 % à avoir déjà commis des délits violents, et les auteurs de viol sont 12,4 % à avoir été condamnés précédemment pour une atteinte sexuelle.

Or, si notre droit, depuis la loi du 10 août 2007 sur la récidive, appréhende désormais correctement la situation particulière des récidivistes soumis au doublement de la peine maximale et à des peines minimales d'emprisonnement, la situation des réitérants, trois fois plus nombreux, n'est, quant à elle, pas suffisamment prise en compte par notre droit pénal.

Depuis la loi du 12 décembre 2005, les réitérants sont définis comme des personnes déjà condamnées définitivement pour un crime ou un délit qui commettent un nouveau crime ou délit, mais sans remplir les conditions de la récidive légale.

L'effet de la situation de réitération est très limité, puisque cette situation a pour seul effet d'empêcher la confusion des peines prononcées. Cet effet est insuffisant pour dissuader les personnes déjà condamnées de commettre de nouvelles infractions, et particulièrement des infractions plus graves. Par exemple, l'auteur d'une agression sexuelle délictuelle pour laquelle il a été condamné définitivement ne risque aucune aggravation de sa peine s'il commet ensuite un viol, alors même que sa situation est objectivement différente de celle de l'auteur d'un viol jamais condamné par le passé, en raison du premier avertissement solennel que lui avait adressé la justice.

Il en va de même lorsqu'une personne condamnée pour des violences délictuelles commet ensuite un meurtre, ou lorsque l'auteur d'un vol correctionnel commet ensuite un braquage de nature criminelle.

Cette situation ; pour le moins paradoxale, est choquante ! Pour y remédier, la présente proposition de loi tend donc à instaurer des peines minimales pour les personnes commettant un crime ou un délit en situation de réitération.

Les différents seuils de peine minimale sont compris entre un cinquième et un sixième de la peine maximale encourue, c'est-à-dire le même niveau que ceux prévus en cas de récidive, compte tenu du doublement de la peine encourue.

Le principe constitutionnel de nécessité des peines est ainsi pleinement respecté.

Les articles 2 et 3 respectent aussi parfaitement le principe constitutionnel d'individualisation des peines, puisqu'il est prévu la possibilité pour la juridiction saisie de déroger à la peine minimale prévue, cette décision devant être spécialement motivée en matière correctionnelle.

Il serait donc totalement faux de prétendre que cette proposition de loi instaure des peines automatiques : il n'y a aucune automaticité, mais seulement un principe de peines minimales, auxquelles le juge peut déroger en motivant sa décision, ce qui est le propre de la fonction de juge ! On a souvent parlé de peines automatiques pour les peines plancher, cela est faux. Dans leur liberté souveraine d'appréciation, les juges peuvent aller en dessous des seuils de peines comme la présente proposition de loi le prévoit pour les réitérants.

Le dispositif ainsi proposé permet d'adapter la réponse pénale apportée aux personnes qui font le choix de défier sciemment les règles de vie en société en commettant des infractions répétées, même si elles ne remplissent pas les strictes conditions de la récidive légale.

J'en viens maintenant à la présentation de l'article 1er relatif aux délinquants de nationalité étrangère et à la peine complémentaire d'interdiction du territoire français – ITF. Sur ce sujet, j'espère que nous aurons un débat serein. En tout état de cause, ma présentation sera tout à fait objective.

En effet, personne ne peut nier que, lorsque quelqu'un commet un crime ou un délit, le fait qu'il soit étranger est une situation particulière dont la loi pénale et la justice doivent tenir compte. Un étranger n'a pas vocation à rester sur le territoire de la République lorsqu'il commet des actes graves en infraction à la loi de la République.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion