Cet amendement vise à maintenir l'article 370 du code civil relatif à la révocation de l'adoption simple dans sa rédaction actuelle. En effet, il n'apparaît pas opportun de modifier l'équilibre qui existe aujourd'hui entre l'adoption simple et l'adoption plénière.
Pour nos concitoyens, la distinction entre l'une et l'autre est déjà compliquée ; modifier cet équilibre ne ferait qu'aggraver les choses.
La possibilité de révocation qui existe aujourd'hui est spécifique à l'adoption simple ; elle est impossible pour l'adoption plénière. Encore est-elle encadrée par la loi, puisqu'elle ne peut être prononcée – par le tribunal de grande instance statuant en formation collégiale composée de trois juges – que pour des motifs graves, et cette notion est appréciée strictement par les juges au regard de la situation de l'enfant.
Si les révocations sont rares, elles peuvent néanmoins être opportunes, et justifiées par une situation familiale particulière, y compris lorsque l'adopté est mineur, notamment en l'absence de toute relation effective entre l'adoptant et l'adopté.
C'est parfois le cas dans les familles recomposées. Dans l'hypothèse où le nouveau conjoint ou la nouvelle conjointe se libérerait de son engagement et où l'enfant aurait obtenu une adoption simple, il serait pieds et poings liés : c'est exactement ce que nous ne voulons pas.
En 2010, sur cinquante-six demandes, seules dix-sept ont donné lieu à révocation. Outre les cas où des faits graves se produiraient entre l'adoptant et l'adopté mineur, ce sera aussi le cas lorsque le conjoint de la mère aura adopté l'enfant sans pour autant l'élever, suite à la séparation du couple. Si l'article 5 est adopté, la mère ne pourra plus demander la révocation, alors même que le lien juridique créateur de droits et de devoirs entre son ex-compagnon et l'enfant ne produit plus aucun effet dans la vie de celui-ci.
C'est sur ce point qu'il faut s'attarder : l'intérêt de l'enfant commande de ne pas restreindre au seul ministère public la possibilité de solliciter la révocation. Certains motifs graves, en effet, ne relèvent pas de son appréciation. C'est pourquoi il ne pourra, sauf cas de maltraitance, faire état de l'évolution de la vie affective d'une famille. Empêcher la famille biologique de saisir le juge m'apparaît donc contraire à l'intérêt de l'enfant.
Je tiens à souligner que la seule volonté des parents biologiques de récupérer leur enfant ne constitue pas un motif grave. C'est ce que l'on a expliqué tout à l'heure : cette épée de Damoclès qui pourrait sembler suspendue par les parents biologiques au-dessus des parents adoptants n'existe pas, puisqu'il faut un motif grave pour révoquer l'adoption de ces enfants.
Enfin, madame la rapporteure, je sais que vous êtes comme moi favorable à l'augmentation du nombre d'adoptions simples. J'ai constaté sur le terrain combien il est utile que l'adoption simple se développe. Cependant, je crains que l'article 5, dans la version que vous proposez, conduise des familles biologiques à ne plus consentir à l'adoption de leur enfant, du fait qu'il leur serait ensuite impossible de saisir directement le juge lorsque l'adoption de leur enfant se passe mal. Le risque que le ministère public ne saisisse pas le juge, quand bien même la famille biologique invoquerait des motifs graves, ne peut être écarté.
Notre devoir est d'envisager toutes les solutions, sans rien écarter, et ce dans l'intérêt supérieur de l'enfant. L'article 5 constituerait sans aucun doute un nouveau frein au développement de l'adoption simple ; c'est pourquoi le Gouvernement propose sa suppression.