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Intervention de Jean Launay

Réunion du 28 février 2012 à 15h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2012 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean Launay :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, cette ultime loi de finances rectificative constituera donc une ultime provocation pour les Français. Il faut avoir beaucoup d'audace pour présenter votre candidat comme le candidat du peuple, alors que, pendant toute la durée du quinquennat qui s'achève, il s'est efforcé de défendre l'intérêt des plus riches.

La TVA Sarkozy est une dernière mesure qui vient accabler, affaiblir le pouvoir d'achat des plus petits revenus et des précaires. Chacun sait que l'impôt indirect pèse plus lourd dans le budget d'une famille modeste que dans celui d'une famille aisée. L'impôt sur la consommation pénalisera, une fois encore, les classes populaires et les classes moyennes.

En augmentant la valeur du taux réduit de la TVA de 5,5 % à 7 %, vous avez déjà augmenté le prix de choses simples, consommées quotidiennement, comme les transports ou les sandwichs, et vous continuez aujourd'hui à vouloir pressurer le plus grand nombre en lui faisant porter le poids d'une nouvelle hausse de TVA.

Cette mesure nouvelle est la troisième d'une vague d'austérité. Elle est décidément marquée du sceau de l'injustice. Les premières victimes seront les retraités et les chômeurs, ceux qui consacrent la majeure partie de leur budget à l'essentiel. C'est un nouveau coup de massue sur les bas salaires, c'est de la solidarité à l'envers, c'est un pas de plus vers la rupture du pacte social.

Vous commettez une faute grave, et vous le savez. J'en veux pour preuve le manque d'engagement des députés de la majorité lors de la réunion de la commission des finances réservée il y a une quinzaine de jours à la première lecture de ce texte. Ils ont fui, fui une erreur fiscale, et leur malaise sonnait comme l'aveu d'une erreur économique majeure.

Par ailleurs, les deux objectifs que vous poursuivez à travers cette augmentation de la TVA ne seront pas atteints.

D'abord, l'effet sur la compétitivité sera quasi inexistant. La baisse du coût du travail de 2,1 % que vous attendez ne se traduira que par une baisse de 0,4 % à 0,8 % du prix du produit fini. C'est une course perdue d'avance contre les pays low cost.

De plus, encore une fois, la comparaison que vous faites avec l'Allemagne est inexacte. C'est l'INSEE qui vous contredit et rétablit la vérité sur le coût du travail français. Notre coût du travail horaire est légèrement inférieur à celui de l'Allemagne, notamment, et vous le savez, grâce à une meilleure productivité de notre main-d'oeuvre – Pierre-Alain Muet et Jean-Pierre Brard l'ont justement souligné tout à l'heure.

Le déficit de notre commerce extérieur s'explique par le manque d'investissement dans la recherche et le développement et dans l'affaiblissement de notre tissu de PME que vous avez provoqué.

En second lieu, les 100 000 emplois attendus en deux ans sont une pure illusion, et vous le savez. Cette mesure nocive et sans effet sur l'emploi pourrait même détruire des emplois. La commission des finances du Sénat, par la voix de sa rapporteure générale, Nicole Bricq, a estimé qu'au mieux elle créerait 10 000 emplois, et au pire en détruirait 40 000. Cette réforme, décidément, manquera sa cible.

La TVA Sarkozy va peser sur la consommation, de façon significative, tout en ayant un effet dérisoire sur la compétitivité des entreprises et sur l'emploi. Cette nouvelle mesure d'austérité, brutale et électoraliste est en fait la marque de l'énergie du désespoir avant une échéance électorale majeure. Cette mesure risque fortement d'exacerber le ralentissement de l'économie et de nous entraîner dans un cycle de récession. Je le répète, car Pierre-Alain l'a déjà dit, c'est une faute économique majeure.

J'ajouterai que présenter une telle réforme en fin de mandat est une faute démocratique. Oui, madame la ministre, nous n'avons pas la même conception de la démocratie. Vous attaquez le choix du Sénat de ne pas débattre mais, si cette réforme est, comme vous le dites, une nécessité absolue, pourquoi avoir attendu le dernier trimestre du quinquennat pour la voter ? Pourquoi la voter en urgence pour une mise en application en octobre ? Pourquoi ne pas en avoir eu l'idée lors de l'examen de la loi de finances initiale ?

J'avais prévu de dire à M. Baroin : « Non, monsieur le ministre, nous n'avons pas la même idée de la lucidité ». Puisqu'il n'est pas là, vous le lui répéterez, madame la ministre. Où est la lucidité quand on constate que la loi de finances initiale a établi une prévision de croissance surévaluée ? Où est votre lucidité quand ce collectif ressemble davantage à une volonté de taxer, une fois encore, le plus grand nombre ? Où est la lucidité alors que c'est vous qui avez creusé tous les déficits qu'il faut combattre aujourd'hui ?

Nous nous rappelons le slogan de campagne de Nicolas Sarkozy lors de l'élection présidentielle de 2007. Il se présentait comme le président du pouvoir d'achat et du plein emploi. Force est de constater qu'il n'en est rien ! Votre candidat, qui s'autoproclame aujourd'hui le candidat du peuple, est en fait son contraire, et les Français qui savent ce qu'est un bilan jugeront, demain, ce bilan largement déficitaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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