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Intervention de Charles de Courson

Réunion du 28 février 2012 à 15h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2012 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCharles de Courson :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, qu'il s'agisse de la révision des prévisions de croissance, que nous préconisions dès octobre 2011 lors des débats sur la loi de finances initiale, de la TVA compétitivité que nous défendons depuis plus de quinze ans, ou de la taxe sur les transactions financières que nous soutenons également, ce collectif budgétaire est marqué par la prise en compte partielle de nos idées, et le groupe Nouveau Centre s'en félicite.

Nous regrettons cependant la réforme tardive et certainement précipitée de la TVA compétitivité. Un projet aussi ambitieux que l'indispensable rénovation du financement de la protection sociale ne peut se faire sans un minimum de consensus politique et social.

Je voudrais à cet égard répondre à divers arguments avancés par l'opposition.

Le premier consiste à dire que la dégradation de la compétitivité – incontestable depuis les années 1998-1999, puisque, en treize à quatorze ans, nous avons perdu grosso modo un quart de nos positions en matière internationale – ne s'explique pas par l'augmentation du coût du travail. Loin de moi l'idée de prétendre que la compétitivité est exclusivement un problème de coût relatif du travail, mais c'est assurément, parmi bien d'autres – l'innovation, l'effort de recherche, la mobilisation des hommes ou la bonne organisation –, l'un des éléments dont elle dépend.

Je l'ai dit en répondant à la motion de rejet préalable, on ne peut contester qu'il y ait eu une dérive du coût relatif du travail en France, notamment par rapport à l'Allemagne. Dans l'industrie, nous sommes pratiquement à 33 euros de l'heure, en Allemagne comme en France, mais, il y a quinze ans, l'Allemagne avait des coûts horaires 15 % plus élevés que ceux de notre pays. Quand on analyse les chiffres en fonction du tissu économique, notamment pour les petites et moyennes entreprises, on constate que l'écart s'est encore plus aggravé, puisque, en France, l'augmentation du coût horaire a été à peu près constante quelle que soit la structure des entreprises – petites, moyennes ou grandes –, alors que, en Allemagne, ce sont les petites et les moyennes entreprises qui ont connu la plus faible hausse. Le différentiel est de l'ordre de 25 à 30 % en quinze ans pour les PME allemandes par rapport aux PME françaises.

D'après l'opposition, il serait donc négatif de baisser les charges sociales patronales, et elle invoque perpétuellement l'autorité du ministre des finances de 2004, qui s'appelait Nicolas Sarkozy et qui, à l'époque, était contre. Mes chers collègues, n'a-t-on pas le droit d'évoluer, dans la vie ? Si le Président de la République l'a fait dans la bonne direction, on ne peut que s'en féliciter. Du reste, vous oubliez de vous référer aux travaux qui ont été réalisés sur la question, qui montrent tous que la baisse des charges sociales patronales induit une augmentation de l'emploi, dans des proportions qui, c'est vrai, varient selon les études. Dans l'exposé des motifs du projet de loi, le Gouvernement estime que cela pourrait être de l'ordre de 100 000 emplois, mais il reconnaît que c'est extrêmement fragile. Dans les travaux de la direction de la prévision, de l'INSEE et d'autres organismes, les chiffres vont de zéro à 500 000. Pourquoi des écarts aussi grands ? Tout dépend de la manière dont le tissu économique réagit à ces mesures. Si les sommes dégagées sont purement et simplement utilisées pour augmenter les salaires, il n'y aura aucun effet, si ce n'est, peut-être, négatif. Si une part importante est utilisée pour augmenter la compétitivité, renforcer les efforts en matière d'innovation, de recherche, de promotion commerciale, de création de réseaux internationaux, l'effet peut être beaucoup plus grand.

C'est pourquoi les centristes avaient déposé un amendement – qui, hélas, n'a pas été adopté –, proposant qu'ait lieu une négociation entreprise par entreprise, branche par branche, sur l'utilisation des 13 milliards d'euros. Une entreprise pour laquelle cela représentait, par exemple, 5 millions, pourrait se demander, dans le cadre d'un dialogue, ce qu'elle fait de cette somme.

Si la TVA sociale a réussi au Danemark en 1986 – avec une augmentation non pas de 1,6 point, mais de 5 points –, c'est parce que, à l'issue d'un grand débat, les partenaires sociaux se sont engagés à ne faire aucune revendication en matière salariale du fait de l'augmentation du taux d'inflation. Cela a dopé la compétitivité du Danemark : le taux de chômage, qui était très élevé, a fortement baissé.

En Allemagne, à la suite de la mesure que l'on doit à Mme Merkel – même si on l'attribue généralement à M. Schröder, puisqu'elle a été prise avec le soutien des sociaux-démocrates, qui faisaient partie de la coalition – et qui s'est traduite par une hausse de 3 points de la TVA et une baisse de 1 point de la cotisation patronale chômage, l'inflation n'a pas augmenté de 3 points, mais, selon les estimations, de 0,9 à 1 point, c'est-à-dire à peine du tiers.

Là encore, l'effet sur l'inflation n'est ni automatique ni évident. Tout dépend de la situation relative. Dans l'industrie pétrolière, étant donné la situation d'extrême tension, il y aura une répercussion intégrale – c'est ce que m'a dit le patron de BP. Dans d'autres secteurs, une bonne partie sera prise sur les marges.

Votre faiblesse, chers collègues, ce n'est pas simplement de faire une analyse économique défaillante de ce qui se passe dans le monde, c'est aussi d'avancer des propositions défaillantes. Comment allez-vous accroître l'efficacité et la compétitivité de l'économie française ? Telle est bien la question, et ce devrait d'ailleurs être l'un des quatre grands débats de la présidentielle.

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