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Intervention de Jean-Pierre Brard

Réunion du 28 février 2012 à 9h30
Questions orales sans débat — État du logement en france et en seine-saint-denis

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Pierre Brard :

Je suis impressionné, monsieur le ministre chargé du logement ! Vous n'avez pas besoin de GPS pour conduire quelqu'un dans le Cantal ! Votre connaissance des routes est formidable !

Ma question sera plus simple – du point de vue de la diversité de la voirie –, puisqu'elle porte sur le logement.

La pénurie de logements sociaux touche durement mon département, la Seine-Saint-Denis, et ma bonne ville de Montreuil. Ainsi, 57 000 personnes sont en attente d'un logement social dans ce département. Comme vous le savez, cette situation provoque des drames terribles, même si nous comptons déjà 200 000 HLM. Par exemple, le mercredi 15 février dernier, une femme s'est immolée dans la mairie de Saint-Denis et elle en est morte. À Montreuil, la pénurie est grande. Il y a 6 000 demandeurs de logements sociaux en attente. Pour un logement libre, nous enregistrons sept à huit demandes.

J'en viens au coeur de ma question monsieur le ministre. À Montreuil, certains bailleurs sociaux profitent de cette situation pour se comporter de façon indigne avec les locataires. J'ai plusieurs exemples à l'esprit, comme le bailleur social LogiRep, dans le quartier de La Noue, qui n'hésite pas à alourdir les charges de ses locataires déjà endettés, puis à envoyer les huissiers frapper à leurs portes pour leur mettre la pression, aggravant l'inquiétude et l'angoisse.

Mais je voudrais vous faire part, plus particulièrement, du comportement d'Emmaüs Habitat. Cette société anonyme a acquis, en 2001, plusieurs résidences rue Gaston Monmousseau à Montreuil. Grâce à ma médiation, en mars 2000, un accord avait été trouvé entre les locataires et Emmaüs Habitat sur le prix des loyers. Emmaüs Habitat n'a pas respecté sa parole, en fixant des loyers supérieurs à ce qui avait été décidé. D'une certaine manière, monsieur le ministre, Emmaüs Habitat, c'est la sainte-nitouche du logement social ! On lui donnerait le bon Dieu sans confession, mais l'expérience montre que ce serait une erreur. Par exemple, M. et Mme Trebol, qui habitent au 15 rue Gaston Monmousseau, avaient un loyer de 554,47 euros, charges comprises, en mai 2002. Sept mois plus tard, en décembre 2002, Emmaüs Habitat a augmenté le loyer, sans concertation, de 16 % en le portant à 644 euros, charges comprises. Aujourd'hui, le loyer, charges comprises, s'élève à 793 euros. En dix ans, il a augmenté de 32 % et Emmaüs Habitat leur réclame, en plus, des régularisations de charges qui s'élèvent à plus de 150 euros. Ces augmentations répétées ont mis les locataires en grande difficulté financière. Ces derniers résistent et refusent de régler le surplus de loyer. Ils payent de l'ordre de 700 euros par mois pour se loger, alors qu'ils se trouvent à l'écart des moyens de transport. En dépit de cela, Emmaüs Habitat a décidé d'enclencher une procédure d'expulsion contre huit locataires. Son comportement face à la souffrance de ces locataires est insupportable. Depuis dix ans, ils vivent dans un climat pesant, qui impacte leur vie quotidienne. Des pressions et des harcèlements moraux m'ont été rapportés. Emmaüs Habitat a joué avec leurs nerfs en enclenchant plusieurs fois des procédures judiciaires, puis en les annulant quelques semaines après. Certains, sous contrainte psychologique, ont dû signer des reconnaissances de dettes. Ils vivent aujourd'hui dans la peur de perdre leur logement et de se retrouver à la rue. Il est désolant de constater qu'Emmaüs Habitat trahit l'âme de l'abbé Pierre en adoptant une politique commerciale de rentabilité. Le logement social n'a pas vocation à produire des excédents, ni à être rentable au sens affairiste du terme. L'abbé Pierre disait : « Sur ma tombe, à la place de fleurs et de couronnes, apportez-moi les listes de milliers de familles, de milliers de petits enfants auxquels vous aurez pu donner les clés d'un vrai logement. » Je suis sûr, monsieur le ministre, qu'il doit se retourner dans sa tombe à l'heure qu'il est et qu'Emmaüs Habitat ne pourrait pas répondre à l'exhortation du saint homme sans commettre un sacrilège !

Monsieur le ministre, que comptez-vous faire face à ces bailleurs sociaux qui profitent de la situation dramatique du logement social dans certaines parties du pays pour tirer avantage de la misère et de la détresse de leurs locataires ?

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