Nous avons évoqué le manque d'informations statistiques régulièrement mises à jour concernant les personnes sans domicile. Ainsi que je l'ai indiqué, la prochaine enquête de l'INSEE – en cours de réalisation – sera publiée au début de l'année 2013, soit plus de dix ans après la première, et cette périodicité ne semble pas pouvoir être améliorée.
La difficulté tient tout autant au nombre des intéressés qu'à leur profil. Les constats selon lesquels il y aurait aujourd'hui dans la rue davantage de femmes et de travailleurs pauvres, une majorité de personnes souffrant de pathologies psychiatriques ou une proportion non négligeable de personnes issues de l'aide sociale à l'enfance, ne reposent finalement que sur des témoignages d'observateurs et de praticiens. Aussi éminents soient-ils, il n'est pas possible d'étayer leurs propos par des informations objectives et chiffrées.
C'est pourquoi nous approuvons en premier lieu toutes les recommandations de la Cour des comptes tendant à l'amélioration de la collecte des données sur notre sujet : enquêtes quantitatives légères deux fois par an dans les grandes agglomérations, exploitation des données saisies dans le cadre des services intégrés d'accueil et d'orientation (SIAO)…
Nous pensons en outre que deux sujets mériteraient des études complémentaires. Le premier concerne les minima sociaux. Les personnes fragiles et parfois non domiciliées font-elles valoir tous leurs droits en la matière ? Pourquoi certains bénéficiaires de minima sociaux – comme l'allocation aux adultes handicapés ou le minimum vieillesse – ont-ils recours à l'hébergement d'urgence ou d'insertion ? L'hébergement n'a-t-il pas tendance à devenir le volet « logement » de certains minima sociaux ?
Le second sujet a trait aux conditions d'accueil et de vie des demandeurs d'asile et des personnes sans papier dans notre pays. Chacun connaît le parcours de certains d'entre eux : l'attente longue d'une décision en matière d'asile et, dans un nombre de cas non négligeable, l'hébergement d'urgence, à l'hôtel lorsqu'il s'agit de familles. Étant entendu que lorsque les demandeurs d'asile sont déboutés, ils ne peuvent prétendre à un autre habitat que l'hébergement d'urgence accordé de façon inconditionnelle, sauf à ce qu'ils soient en mesure, d'une façon ou d'une autre, de se loger chez des tiers ou dans le parc locatif privé.
Les situations d'hébergement à l'hôtel sont banales, visibles par tout un chacun et, de surcroît, financées sur fonds publics. Au-delà des discours « musclés » ou misérabilistes, elles nous interrogent sur nos choix réels en matière d'accueil des étrangers et elles constituent un poids déjà lourd et sans doute croissant pour notre politique publique. Nous sommes convaincus que la prochaine législature ne pourra faire l'économie d'un travail parlementaire transpartisan sur ce sujet et d'un large débat public, qui pourrait conduire à des états généraux sur la base d'informations et de diagnostics partagés.
Mes chers collègues, sur cette question des demandeurs d'asile, nous n'avons pas voulu nous laisser piéger : nous insistons sur la nécessité d'un travail transpartisan.