Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avec l'examen de la présente proposition de loi, issue des travaux des groupes d'études sur la chasse des deux assemblées, et après cinq lois sur la chasse votées depuis 2000, nous achevons un cycle d'adaptation de la législation aux évolutions de nos territoires ruraux. Qu'il me soit permis de féliciter notre collègue Jérôme Bignon, les sénateurs Ladislas Poniatowski et Jean-Jacques Mirassou pour leur travail de rapporteur, ainsi que tous ceux qui se sont associés à ce travail tout au long des deux années de préparation qu'il a nécessité.
Il nous faut voter ce texte conforme pour permettre son adoption définitive avant la fin de la législature. La présente proposition de loi a été adoptée en première lecture par notre assemblée le 17 mai 2011, puis par le Sénat, avec quelques modifications, le 2 février dernier. Les principales modifications introduites par le Sénat portent sur la possibilité pour les fédérations interdépartementales de chasseurs de fusionner ; la possibilité pour tout nouveau chasseur de pouvoir chasser la première année sur l'ensemble du territoire national ; l'inscription dans la loi de certaines modalités du protocole d'accord signé le 18 janvier dernier entre les représentants nationaux des instances agricoles – notamment l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture et la FNSEA – et la Fédération nationale des chasseurs, pour la gestion du sanglier et l'indemnisation des dégâts de grand gibier ; l'habilitation des agents de développement salariés des fédérations départementales de chasseurs à relever et à constater certaines infractions à la réglementation de la chasse, notamment au schéma départemental de gestion cynégétique.
La présente proposition de loi, ainsi complétée par les sénateurs, n'a pas l'ambition de révolutionner l'exercice de la chasse. Au contraire, c'est un texte court et précis qui répond de façon pragmatique aux transformations que connaît en permanence le monde de la chasse, auxquelles nous devons nous adapter. Ce texte vise un double objectif : premièrement, reconnaître le rôle croissant joué objectivement par les chasseurs comme acteurs et défenseurs de la biodiversité ; deuxièmement, lutter contre la diminution inquiétante du nombre de chasseurs, en rendant la chasse plus attrayante et plus accessible grâce à un certain nombre de simplifications.
Ainsi, la présente proposition de loi reconnaît, dans son article 1er, que les chasseurs contribuent « au maintien, à la restauration et à la gestion équilibrée des écosystèmes et de la biodiversité ». Elle simplifie diverses dispositions concernant l'accès aux associations communales de chasse, le transport de gibier mort, la gestion des chasses commerciales ou le déplacement des postes fixes. Elle a également pour objet d'inciter à la découverte de cette activité par les nouveaux chasseurs, avec notamment la validation nationale à prix réduit la première année. Enfin, elle accroît le rôle des agents des fédérations départementales des chasseurs et adapte le dispositif d'indemnisation des dégâts de gibier suivant l'accord conclu entre la FNSEA, les chambres d'agriculture et la FNC.
Autant de raisons pour lesquelles notre commission du développement durable a adopté conforme en deuxième lecture le texte du Sénat, autant de raisons qui doivent nous convaincre, sur tous les bancs, de réitérer ce vote conforme pour une adoption définitive de ce texte avant la fin de l'actuelle mandature.
Je veux profiter de mon intervention pour souligner que le bilan de la législature qui s'achève est très positif pour la chasse. En 2011, les chasseurs français sont près de 1,25 million. Malgré une baisse de 40 % en trente ans, la France reste ainsi le premier pays d'Europe en nombre de chasseurs. Certes, l'importance de la chasse en France n'est pas réductible à des statistiques, mais on ne peut faire abstraction des 23 000 emplois induits par cette activité, ni de son poids économique de plus de 2,2 milliards d'euros. La chasse est aussi et surtout un sport et une activité de nature, passionnée et multiple – ce ne sont pas les personnes présentes dans cet hémicycle qui me contrediront. Il existe de nombreuses pratiques de chasse qui ont chacune leur histoire, leur ancrage local, leurs particularités techniques à prendre en compte dans le cadre juridique.
Parce qu'elle occupe une place considérable dans la vie de nos territoires ruraux, la préservation de la tradition française de la chasse a été, au cours de cette législature, une priorité pour les parlementaires de tous bords et pour le Gouvernement, comme en témoignent les nombreuses adaptations législatives et réglementaires qui ont été effectuées.
Après la loi de décembre 2008, une autre proposition de loi sur les armes est en cours d'examen, qui répond aux attentes des utilisateurs légaux d'armes à feu que sont notamment les chasseurs.
En matière réglementaire, je donnerai l'exemple du décret du 31 mai 2011, qui a autorisé la chasse en battue du sanglier à partir du 1er juin au lieu du 15 août : il s'agit d'une possibilité supplémentaire donnée aux chasseurs pour lutter contre les proliférations localisées de sangliers qui provoquent d'insupportables dégâts agricoles.
Enfin, le Gouvernement a pris l'engagement d'aller au terme de la réforme qu'il a engagée en matière de nuisibles en maintenant, notamment, la faculté de classer la belette dans cette catégorie.
Au-delà du bilan très positif que l'on peut dresser, la prochaine législature devra apporter sa propre contribution pour résoudre certaines questions relatives à la chasse. La concertation législative que j'avais organisée en mai dernier dans ma circonscription, en Sologne, ainsi que la consultation en ligne à laquelle je viens de procéder ces derniers jours pour préparer cette intervention, m'a confirmé l'utilité de cette proposition de loi, sans toutefois oublier quelques questions qui devront être résolues au cours du prochain mandat.
Il faudra, tout d'abord, évaluer les résultats des nouvelles règles. L'article 8 ne mentionne actuellement que deux catégories de proposants : les fédérations de chasseurs et les chambres d'agriculture ; je crois, monsieur le ministre et monsieur le rapporteur, qu'il sera utile d'y ajouter le maire, dans la mesure où celui-ci est chargé de la sécurité et de la police. Par ailleurs, il faudra veiller attentivement à ce que l'application de l'article 6 ne remette pas en cause des dizaines d'années d'efforts dans la gestion du petit gibier naturel ! Je me réjouis d'avoir entendu, tout à l'heure, notre rapporteur Jérôme Bignon et M. le ministre nous dire que le Gouvernement s'engageait à veiller à ce que cette préoccupation soit pleinement satisfaite sur le plan réglementaire.
Une autre question à aborder lors de la prochaine législature est celle de la formation nouvelle exigée pour les gardes particuliers, au moment où leurs responsabilités sont substantiellement élargies. À mon sens, on ne peut confier des pouvoirs supplémentaires sans donner en même temps aux agents concernés les moyens de compléter leur formation. Par ailleurs, afin d'assurer l'équilibre agro-sylvo-cynégétique, il conviendra de s'interroger sur la complémentarité des actions de chasse et des actions de piégeage.
Enfin, nous devrons réfléchir au problème des clôtures en milieu naturel, agricole et forestier. Il ne s'agit pas de remettre en cause le droit du propriétaire à s'enclore, ni de nier la nécessité de clore pour des raisons de sécurité – notamment routière –, de protection de l'agriculture ou des plantations forestières. La loi en vigueur permet aux collectivités dotées d'un document d'urbanisme de fixer des règles sur les clôtures. Mais, comme l'a démontré une étude récente conduite sur plusieurs mois par le Pays de Grande Sologne, que je préside, cette loi est insuffisante, car beaucoup de collectivités rurales peu peuplées ne disposent pas d'un document d'urbanisme ; or, le SCOT rural est un outil trop lourd à mettre en place pour régler des questions de clôtures.