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Intervention de Valérie Niquet

Réunion du 25 janvier 2012 à 9h45
Commission des affaires étrangères

Valérie Niquet, responsable Asie à la Fondation de la recherche stratégique :

À la veille de la mort de Kim Jong-il, une rencontre entre les États-Unis et la Corée du Nord pour reprendre le dialogue était en projet. Des officiels japonais et nord-coréens se sont également rencontrés en Chine sur la question, toujours pas résolue, des citoyens japonais enlevés. Sans doute conviendrait-il profiter de cette période de relative instabilité et d'ouverture potentielle pour tenter une nouvelle stratégie de contact direct avec la Corée du Nord, et non plus dans le seul cadre du dialogue à six. En effet, la dimension nationaliste et antichinoise de la Corée ne peut être exclue et l'on offrirait ainsi de nouvelles marges de manoeuvre au régime nord-coréen. La Russie, qui a reçu Kim Jong-il peu de temps avant sa mort, souhaite également jouer à nouveau un rôle économique, en particulier avec ses pipelines. Rien ne se fait, certes, mais chacun semble être dans l'attente d'une amorce de dialogue direct.

Cet attentisme s'explique également par l'approche des grandes célébrations du centième anniversaire de la naissance de Kim Il-sung. Celles-ci sont censées ouvrir en Corée du Nord l'ère « pays riche, armée puissante », vieux slogan des légistes de la Chine du IIe siècle avant Jésus-Christ et, surtout, slogan du Japon de Meiji et slogan mis en exergue dans l'actuel Livre blanc de la défense en Chine. Cela ne laisse guère augurer une attitude plus apaisée. La Corée du Nord et Kim Jong-eun, dans un souci de s'affirmer, ne choisiront-ils pas de réaliser un nouvel essai nucléaire afin de démontrer la puissance du nouveau leader et de son entourage au moment du centième anniversaire de son grand-père ?

De son côté, la Chine pousse à la reprise du dialogue à six mais quasiment sans conditions. De l'avis général, la reprise des négociations ne débouchera pas sur une dénucléarisation de la Corée du Nord. Le régime fera peut-être quelques concessions dans certains secteurs mais il considère que son statut de puissance nucléaire constitue une garantie et il le gardera. Croire à une dénucléarisation du pays sans changement de régime est une illusion, d'autant que la Chine est plutôt en phase avec la position actuelle.

La seule chance, j'y insiste, repose sur une stratégie de contournement de la Chine en donnant des avantages et des garanties (ne serait-ce que de survie) aux dirigeants.

Pour ce qui est de la société civile et des révoltes, je crois que le fait de contraindre les gens à passer ses journées à chercher de quoi se nourrir ou de quoi se soigner a toujours été, dans les régimes totalitaires, un élément de contrôle politique : les personnes sont totalement obsédées par cette recherche. Dans la Chine plus ouverte d'aujourd'hui, on assiste à des révoltes mais on ne voit aucun mouvement politique se constituer à partir de ces mouvements populaires. Dans ces systèmes, c'est souvent au sommet que des factions un peu plus réalistes (Gorbatchev en URSS, Deng Xiaoping en Chine) se rendent compte que le régime ne peut continuer ainsi et peuvent le faire basculer très rapidement. Le pronostic n'en est que plus difficile.

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