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Intervention de Claudie Haigneré

Réunion du 15 février 2012 à 17h00
Délégation aux droits des femmes et l’égalité des chances entre les hommes et les femmes

Claudie Haigneré, présidente d'Universcience, astronaute et ancienne ministre :

Qu'en est-il également de la présence des femmes au niveau de la gouvernance scientifique ? Le Comité de pilotage chargé de l'élaboration de la Stratégie nationale de la recherche et de l'innovation (SNRI) ne compte que 11 % de femmes.

Le Haut conseil de la science et de la technologie comprend 24 % de femmes, à l'instar du Conseil scientifique du CNRS.

Ces chiffres ne s'expliquent pas par un défaut de compétences, de mérite ou de travail.

Comment expliquer le manque d'engagement des jeunes femmes vers les carrières des sciences et des techniques ? Lorsque je m'y suis présentée, en 1985, la sélection pour le métier d'astronaute était ouverte aux hommes comme aux femmes. Sur 1 000 candidatures, 100 seulement étaient celles de femmes. La sélection des astronautes européens révèle le même pourcentage de 10 % de femmes. J'étais, à l'époque, la seule femme retenue et c'est une jeune italienne, Samantha Cristoforetti, qui a été recrutée, en 2009, lors de la troisième sélection.

Mon exemple n'a pas suffi à donner aux jeunes femmes l'audace de présenter leur candidature. Le déficit d'engagement reste une réalité, qui n'évoluera pas seule. C'est pourquoi vous devez faire évoluer la législation.

Les stéréotypes perdurent. En outre, les jeunes filles pratiquent l'autocensure, ce qui freine leur engagement vers les métiers scientifiques et techniques, considérés comme masculins. Elles ont même intériorisé les différences. Enfin, les modèles d'organisation du travail ne sont pas adaptés à la répartition des tâches au sein de la famille, et cela vaut pour de nombreux métiers.

Cela ne s'applique naturellement pas à mon métier d'astronaute. J'ai vécu, de 1992 à 2001, en Russie dans un centre d'immersion, dans un environnement militaire essentiellement masculin. Mais je faisais partie d'un équipage qui avait un objectif, celui de réussir sa mission. Dans ces conditions, chaque membre de l'équipage est perçu comme un trésor et tout le monde fait en sorte que cela fonctionne. Les rôles étaient répartis de façon à transcender les différences pour en faire une diversité enrichissante. J'avais réussi à démontrer que la présence d'une femme au sein d'un équipage évoluant dans un environnement hostile est un atout, un facteur d'interactions et de dialogue. Au cours de l'entraînement, j'étais la seule femme parmi 45 astronautes. À bord, j'étais également la seule femme sur trois membres d'équipage – nous avons rejoint trois coéquipiers dans l'espace. Mes collègues masculins, au sol comme pendant le vol, appréciaient ma présence.

Je n'ai donc jamais eu à subir le fait d'être une femme au milieu d'hommes. En cela, je ne suis pas un bon modèle pour votre délégation…

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