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Intervention de Jean-Pierre Brard

Réunion du 21 février 2012 à 15h00
Traité sur le fonctionnement de l'union européenne traité sur le mécanisme européen de stabilité — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Pierre Brard :

Ce qui est en préparation actuellement dépasse tout ce qui a pu être fait jusqu'à présent.

La situation en Grèce, transformée en laboratoire du capitalisme européen, devrait pourtant vous convaincre, monsieur de Courson, vous qui ne jurez que par l'ancienne Union soviétique, que les propositions que vous portez, les solutions que vous imposez ne sont pas les bonnes. Vous refusez de voir la réalité en face. Et votre aveuglement idéologique, votre idolâtrie « austéritaire », la haine de l'État social pour certains d'entre vous, condamnent les peuples à la misère et au dénuement.

À Athènes, la situation sociale est devenue dramatique. La population est à bout. Comme l'écrit Pierre Salignon dans le rapport 2011 de Médecins du monde : « En Grèce pour les plus précaires, il n'est plus question d'austérité, mais de survie. »

En Grèce, les conventions collectives ont été supprimées, le salaire minimum a baissé de 22 %, les retraites ont été amputées de 15 %. La malnutrition fait des ravages dans les écoles primaires, où les manuels scolaires n'ont pas été distribués cette année. La faim a fait son apparition dans les grandes villes du pays, où l'on voit désormais des SDF par milliers se presser dans les soupes populaires. Désormais, sur 11 millions d'habitants, la Grèce compte officiellement 3 millions de pauvres, soit près de 30 % de la population. Le chômage touche plus de 20 % des actifs et 40 % des jeunes entre quinze et vingt-quatre ans. Les Grecs en sont réduits à abattre les arbres de leurs forêts pour se chauffer, incapables de payer le mazout ou l'électricité dont les prix se sont envolés, augmentant respectivement de 100 % et 50 % en un an.

Au moment où le peuple grec en a le plus besoin, sous la pression de la Troïka, c'est-à-dire la Banque centrale, le FMI et l'Union européenne, le chef du gouvernement grec, non élu et donc illégitime, coupe à la hache dans les aides sociales et les structures d'accueil. C'est la condition sine qua non imposée par Bruxelles pour le déblocage de l'aide de l'Union européenne. Cette aide n'est pourtant pas destinée au développement social dont la Grèce a un besoin vital, mais à garantir le remboursement des dettes de l'État grec, aux banques françaises et allemandes notamment.

À cause d'une saignée de 40 % dans le budget du secteur hospitalier, les soins ne peuvent plus être assurés partout. Certains laboratoires pharmaceutiques refusent de livrer des médicaments aux centres de soins et aux pharmacies, de peur qu'ils ne puissent pas payer. Les hôpitaux sont contraints de décliner les admissions pour les cas les « moins graves ». De 25 à 30 % des personnes qui se présentent dans les hôpitaux grecs sont refusées. Plusieurs hôpitaux ont ainsi refoulé des femmes enceintes incapables de payer les 900 euros qui leur étaient demandés. L'usage des drogues explose – la consommation d'héroïne a crû de 20 % – de même que la prostitution, les cas de contamination au VIH ont augmenté de 54 % depuis 2010 et les suicides de 40 % en deux ans.

Après huit plans successifs d'austérité, la Grèce est à genoux et certains voudraient la voir ramper à plat ventre. C'est mal connaître le peuple grec, sa fierté, sa dignité ! Chaque jour ou presque de nouvelles conditions toujours plus drastiques et antidémocratiques sont infligées ou tentent de l'être au peuple grec : mise sous tutelle du pays en le plaçant sous l'administration d'un commissaire européen, création d'un compte bloqué dans les finances publiques consacré au versement des intérêts de la dette, garantie des nouvelles obligations grecques par des biens publics privatisables, impôts directement collectés par les banques... Cela nous rappelle, monsieur le ministre, les fermiers généraux auxquels on a coupé le cou au moment de la Révolution.

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