Vous voulez nous faire taire, monsieur de Courson, mais vous n'y parviendrez pas, pas plus que les contre-révolutionnaires n'ont réussi à faire taire votre aïeul Lepeletier de Saint-Fargeau !
Monsieur le ministre, vous voulez vous attacher, dites-vous, à prévenir les déséquilibres, à surveiller les politiques nationales pour favoriser des politiques budgétaires « saines ». Avec Mme Merkel et M. Sarkozy, « surveiller et punir » devient la nouvelle devise de l'Union européenne. Les peuples n'ont que faire de votre hygiénisme économique et de votre orthopédie financière. Ils n'ont que faire d'un système carcéral transposé aux finances publiques. Ils veulent reprendre en main leur destin confisqué par la finance et que des technocrates européens s'apprêtent, sous la houlette d'un directoire franco-allemand, à sanctuariser. Les peuples refusent de payer pour une crise qui n'est pas la leur.
Avec votre projet de fonds monétaire européen, l'austérité pratiquée ces dix dernières en Allemagne et les mesures de régression sociale de ces cinq dernières années en France vont devenir le modèle de développement unique des États européens, leur seul horizon. Le carcan de la rigueur budgétaire va peser ad vitam æternam sur les épaules de chacun des peuples de l'Union européenne.
Pourtant, ce modèle allemand qu'à droite vous portez aux nues et dont le Président de la République se sert comme alibi pour casser notre modèle social, l'immense majorité des citoyens allemands eux-mêmes le détestent. Ils sont 73 % à le considérer comme injuste.
Quel est ce pays modèle où, en dix ans, l'espérance de vie des plus pauvres a reculé de deux ans ? Quel est ce pays modèle que vous idolâtrez dans lequel 660 000 retraités de soixante-cinq à soixante-quatorze ans sont obligés de chercher des emplois non qualifiés, à temps partiel et sans protection sociale pour survivre ? Quel est ce pays modèle dans lequel 20 % des travailleurs sont des travailleurs pauvres ?
L'Allemagne, c'est le pays d'Europe où l'on a créé le moins d'emplois depuis vingt ans, celui où la hausse des inégalités de revenus a été la plus forte, celui où la part des salaires dans la richesse créée a le plus baissé, celui où le pourcentage de chômeurs indemnisés a le plus fortement chuté, celui où le nombre de personnes vivant sous le seuil de pauvreté atteint 17 %, contre 13 % en France, celui où 10 % de la population est obligée de fréquenter régulièrement les soupes populaires pour se nourrir.