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Intervention de Gérard Cherpion

Réunion du 15 février 2012 à 16h45
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGérard Cherpion, rapporteur :

Le titre III de la loi a pour objet de faciliter le développement de l'emploi dans les groupements d'employeurs. Pour ce faire, nous avons adopté des mesures visant, d'une part, à assouplir les modalités d'adhésion à ces groupements et leurs règles de fonctionnement, d'autre part, à améliorer le statut de leurs salariés.

Je rappelle que l'article 30 de la loi avait repoussé l'entrée en vigueur des articles sur les groupements d'employeurs au 1er novembre 2011, afin de laisser un délai pour une négociation nationale interprofessionnelle sur le sujet. Aux termes de cet article, les partenaires sociaux pouvaient, en effet, déroger aux nouvelles dispositions sur les groupements d'employeurs, à condition qu'ils concluent un accord collectif national avant cette date. Aucun accord n'a été trouvé et les dispositions relatives aux groupements d'employeurs, qui n'appelaient pas de décrets d'application, sont entrées en vigueur.

Nous ne disposons naturellement pas encore d'éléments concrets sur l'effet de ces dispositions. Je signalerai toutefois que le président d'un des plus importants groupements, que nous avons auditionné, a salué la simplification introduite par la loi pour ce qui est de l'adhésion des entreprises de plus de 300 salariés aux groupements. Ce président, convaincu de l'intérêt pour sa structure de reposer sur des entreprises de tailles différentes, a fait état devant vos rapporteurs de l'adhésion de plusieurs grandes entreprises depuis quelques mois. Il a également déclaré que son groupement ne manquerait pas, lors de la prochaine campagne d'apprentissage, d'utiliser la possibilité nouvelle de recrutement et de mise à disposition d'apprentis par un groupement d'employeurs.

Le dernier titre de la loi est consacré à la sécurisation des parcours professionnels, son objet principal étant la création du contrat de sécurisation professionnelle.

Sans entrer dans tous les détails de ce dispositif, je voudrais revenir sur la méthode qui a permis son élaboration et sa mise en oeuvre, et qui me paraît exemplaire. La proposition de loi sur la sécurisation des parcours que j'ai déposée début 2011 répondait notamment à une préoccupation urgente : la convention de reclassement personnalisé et le contrat de transition professionnelle arrivaient à échéance et il fallait les remplacer par un nouveau dispositif d'accompagnement des licenciés économiques. Les partenaires sociaux avaient la même préoccupation, et la perspective du débat législatif les a amenés à négocier rapidement un accord-cadre, le 31 mai 2011, pour fixer les grandes lignes du régime qu'ils souhaitaient. La rapidité de cette négociation nous a permis d'en prendre en compte les résultats dans la finalisation de la loi qui a fixé le cadre général du nouveau contrat de sécurisation professionnelle.

À son tour, la loi renvoyait, pour la mise en oeuvre pratique du nouveau contrat, à une convention d'application des partenaires sociaux. Dès le 19 juillet, soit quelques jours avant la promulgation de la loi, ils avaient acté ce texte. Cela a permis l'entrée en vigueur du contrat de sécurisation professionnelle, par arrêté ministériel, au 1er septembre 2011, à peine plus d'un mois après la publication de la loi. Depuis lors, ce contrat monte en charge progressivement, avec 6 000 à 8 000 entrées par mois, ce qui doit nous amener à ce jour à environ 30 000 contrats en cours d'exécution.

Plusieurs autres actes conventionnels étaient nécessaires et ont été conclus, notamment, le 27 juin 2011, une convention entre l'État et les partenaires sociaux sur le pilotage du système, ou encore, en octobre et décembre, des avenants permettant aux bénéficiaires de recevoir des points de retraite complémentaire ARRCO et AGIRC.

Si je tenais à présenter toute cette ingénierie avec ces va-et-vient entre législateur, partenaires sociaux et pouvoir réglementaire, c'est qu'elle démontre sa capacité à mettre en oeuvre une politique très rapidement et de façon consensuelle. Cinq ans après la loi de modernisation du dialogue social de 2007, nous pouvons être fiers d'avoir mis en place avec les partenaires sociaux une méthode que sa complexité n'empêche pas d'être efficace.

Le mode de pilotage choisi pour le contrat de sécurisation professionnelle illustre un autre aspect des nouvelles relations que les acteurs des politiques sociales savent établir. Ce mode de pilotage a fait l'objet d'un accord tripartite entre l'État, les syndicats et les organisations patronales, alors qu'auparavant l'habitude était plutôt d'avoir des accords entre partenaires sociaux, que le Gouvernement pouvait ou non agréer ensuite, ce qui rendait le jeu contractuel moins clair. Le pilotage lui-même du contrat de sécurisation sera tripartite et territorialisé, Pôle emploi n'en étant pas le gestionnaire, mais seulement l'opérateur principal.

Il existe un revers de la médaille à la rapidité avec laquelle les partenaires sociaux ont su négocier pour mettre en oeuvre le contrat de sécurisation professionnelle : comme leur négociation a été parallèle, plutôt que consécutive, à la finalisation de la loi, il se trouve quelques décalages entre leur texte du 19 juillet et les termes de cette dernière. Ces décalages portent sur des sujets techniques tels que le mode de calcul de la contribution due par les employeurs au titre des droits individuels à la formation résiduels des salariés entrant en contrat de sécurisation, ou encore la pénalité qu'ils doivent payer s'ils omettent de proposer le contrat de sécurisation. La loi devant l'emporter dans la hiérarchie des normes, les partenaires sociaux devront sans doute ajuster sur ces points leur convention par voie d'avenant. La question se posera également dans la rédaction du décret d'application sur le recouvrement des contributions et pénalités dues par les employeurs, décret dont je souhaite que Mme la ministre nous indique la date de publication.

Plus généralement, la mise en application rapide du contrat de sécurisation professionnelle a conduit à quelques choix inopportuns dans sa réglementation initiale, déjà corrigés par les partenaires sociaux qui se sont montrés réactifs. C'est ainsi que, par deux avenants des 23 janvier et 3 février derniers, ceux-ci ont décidé d'assouplir la longueur des périodes intercalaires de travail qui pourront s'insérer dans un contrat de sécurisation : ces périodes, qui devaient initialement s'inscrire dans un intervalle d'un à trois mois, pourront désormais durer deux semaines seulement et jusqu'à six mois. Par la même occasion, les partenaires sociaux ont mis en oeuvre une disposition de la loi du 28 juillet, restée jusque-là sans application bien que très utile, à savoir la faculté sécurisante, pour un bénéficiaire ayant repris un emploi, de retourner dans le régime du contrat de sécurisation professionnelle en cas d'échec de cette reprise d'emploi durant la période d'essai.

Par ailleurs, il convient de dire un mot de l'expérimentation de l'élargissement du contrat de sécurisation professionnelle à des salariés suite à l'échéance d'un contrat à durée déterminée, d'une mission de travail temporaire ou d'un chantier, prévue à l'article 43 de la loi : il a été décidé, le 23 janvier, que cette expérimentation concernerait dans un premier temps quinze bassins d'emploi et ses moyens ont été doublés. Jusqu'à 9 000 salariés pourraient en bénéficier.

Enfin, j'appelle l'attention de Mme la ministre sur l'article 42 de la loi, qui autorise les bénéficiaires d'un congé de reclassement à effectuer des périodes de travail intercalaires. Le congé de reclassement étant, pour les entreprises de plus de 1 000 salariés, le dispositif parallèle au contrat de sécurisation professionnelle, il était en effet cohérent d'y transposer le principe de l'insertion possible de périodes travaillées. Bien que le texte de la loi ne le prévoie pas formellement, cette mesure implique à mon sens un texte d'application pour encadrer la durée, le renouvellement et le nombre de ces périodes. Un décret est-il en préparation ?

En conclusion, s'agissant de la sécurisation professionnelle, je m'appuierai sur les résultats d'une étude toute récente citée dans Les Échos hier et portant sur les bénéficiaires de la convention de reclassement personnalisé (CRP) et du contrat de transition professionnelle (CTP), qui ont précédé le contrat de sécurisation professionnelle : 54 % des bénéficiaires de ces mesures ont retrouvé un emploi durable, souvent grâce à un effort de reconversion qui a impliqué des formations longues, des changements de métier et des sacrifices financiers. Cela rend compte des résultats obtenus par les dispositifs antérieurs, tout autant que de la détermination des salariés qui en ont bénéficié. J'espère que nous aurons des résultats encore meilleurs avec le contrat de sécurisation professionnelle ; du moins nous nous en donnons les moyens.

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