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Intervention de Pascal Brindeau

Réunion du 16 février 2012 à 9h30
Relance européenne et renforcement du contrôle démocratique — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPascal Brindeau :

Madame la présidente, monsieur le ministre, chers collègues, la proposition de résolution qui nous est soumise aujourd'hui touche à un sujet central et majeur, à un moment crucial de l'histoire de l'Europe, à l'heure où se décident à Bruxelles les conditions de sauvetage de la zone euro, à l'heure où, précisément, se joue l'avenir de l'Europe tout entière.

C'est un sujet central pour notre histoire nationale. En effet, la conception de l'Europe que nous avons doit être au coeur de la campagne présidentielle parce qu'elle sous-tend la crédibilité et la réalité des programmes, qui ne peuvent s'exonérer de l'ensemble que nous constituons avec nos partenaires européens.

Lors du dernier sommet qui réunissait à Bruxelles les dirigeants européens, la France et l'ensemble de ses voisins européens, à l'exception du Royaume-Uni et de la République tchèque, ont pu aboutir à un accord de discipline budgétaire, qui est aussi de bon sens budgétaire.

Avec cet accord, qui marque l'adoption de la règle d'or prônée par les centristes depuis de longues années, nous franchissons un pas de plus vers le redressement de la situation économique pour le moins préoccupante de l'Europe.

Avec cet accord, nous pourrons retrouver la voie de la confiance et de la croissance. Car sans discipline, sans bon sens économique et budgétaire, il n'est pas de croissance possible, et l'Europe en a besoin pour éviter que ne se propage à l'ensemble des pays de la zone euro la contagion de la crise des dettes souveraines.

Ce traité permet surtout de lever un tabou qui, il y a quelques années encore, faisait figure d'épouvantail lors des réunions du Conseil européen : celui de l'instauration, au-delà d'une simple gouvernance, d'un véritable gouvernement économique européen, lequel est le fondement même de l'histoire de la construction européenne et partie intégrante du rêve de ses pères fondateurs. Seul le respect de cette exigence, chère aux centristes, permettra aux pays de la zone euro de sortir durablement de la crise à laquelle ils doivent faire face ensemble.

Ainsi, la présente proposition de résolution s'inscrit dans un contexte particulier, alors même que notre assemblée sera appelée, dans moins d'une semaine, à s'exprimer sur le projet de ratification du traité sur le mécanisme européen destiné à préserver la stabilité financière en Europe.

À travers ce texte, nos collègues socialistes nous proposent, d'une part de reconsidérer le rôle des institutions démocratiques et représentatives dans la définition des politiques budgétaires de l'Union européenne, d'autre part de doter un éventuel futur traité de dispositions favorables à la croissance et à l'emploi.

Sur le fond, le renforcement du contrôle démocratique est une exigence que nous partageons tous. Le gouvernement économique européen souffre d'un déficit démocratique évident qui nécessite d'associer étroitement le Parlement européen et les parlements nationaux dans le cadre des procédures législatives et de contrôle européennes.

De même, nous ne pouvons nous contenter d'une Europe intergouvernementale où seule la somme des intérêts des États ferait office d'intérêt général. Nous devons mettre en place une Europe véritablement intégrée, dotée de structures efficaces susceptibles de créer une véritable impulsion européenne.

Néanmoins, certaines propositions avancées par nos collègues socialistes pour remédier à ce déficit démocratique ne sont pas adaptées : je pense notamment à la disposition qui vise à assortir l'examen annuel de croissance d'une procédure de codécision. Cette mesure risquerait de soumettre les États membres à un contrôle du Parlement européen dans un domaine qui relève d'un ressort purement national.

Par ailleurs, le texte semble occulter les progrès qui ont été faits récemment en faveur d'un renforcement du contrôle démocratique, que ce soit par l'organisation dans notre assemblée de débats préalables et postérieurs aux Conseils européens ou encore par l'instauration d'une Conférence interparlementaire. La coordination des politiques budgétaires s'est aussi sensiblement améliorée, à l'image du semestre européen, créé il y a quelques mois. Ces éléments démontrent qu'il existe bel et bien un débat au sein du Parlement français sur la définition des politiques budgétaires européennes.

En outre, l'exposé des motifs du texte indique la nécessité de placer la croissance et l'emploi au coeur de nos priorités. C'est là aussi un objectif louable auquel nous souscrivons tous, mais pour lequel aucune mesure concrète et réalisable ne nous est proposée. Cet objectif fait également défaut dans le projet du candidat socialiste à l'élection présidentielle.

Si nous voulons apporter une réponse efficace aux problèmes qui touchent actuellement l'ensemble des pays de la zone euro, nous devons agir dans un esprit de responsabilité, de discipline, allié à une nécessaire solidarité envers nos voisins européens. Cela a été dit par M. le ministre, il ne peut y avoir de solidarité sans discipline. On a vu en effet ce que pouvaient donner des mécanismes de solidarité qui ne s'appuyaient pas sur ces règles de bon sens en matière budgétaire et économique.

Plus largement, c'est la nature même de l'Union européenne que la gravité de la situation actuelle nous oblige à considérer. Nous devons réfléchir aux moyens de résoudre les problèmes fondamentaux qui nous ont conduits à cette situation de crise sans précédent. Cela se traduit par la nécessité de mettre en place ce réel gouvernement économique européen fondé, notamment, sur la redéfinition du rôle et des objectifs de la Banque centrale européenne.

Rappelons-le, la proposition de résolution émane d'un groupe qui s'oppose au projet de traité. Le rapport évoque clairement que ce traité ne serait pas indispensable, que la règle de discipline budgétaire, la règle d'or, ne serait pas indispensable, comme cela vient d'ailleurs d'être rappelé à la tribune. Cette conception de la construction européenne et de la façon dont la France devra mener demain ses politiques dans ce cadre me semble particulièrement inquiétante. Dans ce contexte que nous connaissons tous, l'urgence est précisément de poser les bases de mécanismes pérennes de protection et de sauvegarde des différentes économies de la zone euro.

La proposition n'est donc, ni plus ni moins, qu'une prise de position politique à l'heure où, au-delà des clivages et des échéances électorales, nous devrions afficher une volonté commune dans l'intérêt de la France pour le projet européen.

Je regrette, avec mes collègues du Nouveau Centre, que les auteurs de la proposition de résolution n'aient pu s'élever au-dessus de leur tactique électorale et politicienne pour appuyer une démarche légitime, celle du débat sur l'Europe, dans un esprit de responsabilité face à nos concitoyens, et ce précisément dans la perspective de l'élection présidentielle.

Vous comprendrez que, pour ces raisons, le groupe Nouveau Centre n'apportera pas son soutien à la proposition de résolution.

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