Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Michel Heinrich

Réunion du 15 février 2012 à 16h45
Commission des affaires européennes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Heinrich, co-rapporteur du Comité d'évaluation et de contrôle :

J'aborde maintenant le premier thème approfondi dans le rapport : l'emploi. L'OCDE a mis en évidence le poids des cotisations patronales sur les revenus du travail : elles sont de 29 % en France, 26 % en Suède, 27 % en Italie, 16 % en Allemagne et 0 % au Danemark. La part salariale, en France, est un peu plus faible que dans les autres pays, de même que la fiscalité sur le travail. C'est d'ailleurs l'enjeu du débat en cours sur la TVA. Pour ce qui nous concerne, nous estimons que cela doit faire l'objet d'une réflexion plus large.

L'Allemagne, en 2007, a mis en oeuvre une réforme du type que je viens d'évoquer et ses résultats sont tangibles : la cotisation chômage y est de 2,8 %, répartis entre le salarié et l'employeur, à hauteur de 1,4 % chacun, contre 6,4 % en France, dont 2,4 % à la charge du salarié et 4 % de l'employeur. Bien que les deux tiers des recettes supplémentaires de TVA aient été affectés au désendettement, les Allemands ont aussi réalisé des gains d'efficience sur la politique de l'emploi et, je le répète, ont réduit leur taux de cotisation pour l'assurance chômage.

Vous trouverez également dans le rapport des chiffres inédits permettant de comparer les conditions d'indemnisation du chômage. Le modèle français est généreux, particulièrement pour les cadres, qu'il s'agisse du mode de calcul du niveau d'indemnisation, du montant maximum et de la durée de couverture. En France, l'indemnisation est plafonnée à 6 764 euros, contre 2 215 euros en Allemagne, 1 625 euros en Suède, 1 425 euros au Portugal et 324 au Royaume-Uni, où le régime est très dur.

Trois modèles de politiques de l'emploi ressortent de l'analyse des dépenses dans les pays comparés : les dépenses correspondant au service public de l'emploi ; les « mesures actives » d'aide au retour à l'emploi ; les indemnisations et les préretraites, appelées « dépenses passives » par l'Union européenne et l'OCDE. Les différences de montants et de répartition laissent penser que certains pays feraient mieux que d'autres. La Suède peut apparaître comme exemplaire en la matière, avec une indemnisation réduite au profit des dépenses actives.

Nous avons également identifié des grandes tendances communes aux politiques de l'emploi en Europe : la recherche d'un guichet unique pour l'usager ; la préférence pour des mesures actives incitant au retour à l'emploi plutôt que pour l'indemnisation du chômage ; la définition de droits et devoirs, c'est-à-dire une conditionnalité accrue de l'indemnisation chômage.

Autre grande tendance européenne : l'externalisation. Mais tous les travaux de recherche et d'évaluation témoignent pour l'instant de résultats mitigés en la matière, même si l'émulation entre le secteur privé et le service public de l'emploi peut entraîner une certaine émulation.

Nous avons aussi souligné ce qui caractérise le modèle français, avant tout sa complexité. Il existe au moins huit structures contribuant au service public de l'emploi, dans un enchevêtrement de compétences au mieux inefficace. Les autres singularités, qui concernent plutôt Pôle Emploi, ont notamment été soulignées par un rapport récent de l'Inspection générale des finances : les moyens de Pôle Emploi sont significativement inférieurs à ceux de ses homologues européens. Le manque de réactivité dans la période récente contraste avec l'augmentation très rapide des effectifs des services publics de l'emploi observée en Allemagne et au Royaume-Uni – où 16 000 personnes, au plus fort de la crise, ont été embauchées en contrat à durée déterminée –, suivie d'une décrue tout aussi rapide.

Le rapport souligne aussi que les contacts avec le demandeur d'emploi sont moins fréquents en France et que les conseillers allemands ou britanniques sont plus autonomes et ont à leur disposition plus de ressources et de compétences pour aider le demandeur d'emploi.

Notre rapport contient plusieurs propositions pour améliorer le service public de l'emploi. Il s'appuie surtout sur une synthèse des travaux d'évaluation les plus récents, dont nous espérons qu'elle constituera, à l'avenir, une source d'information et d'inspiration. De façon générale, nous gagnerions à dispenser les aides et les prestations d'accompagnement dans les situations où elles sont les plus efficaces. Cela exige un pilotage intelligent et réactif, qui peut être une grande source d'économies.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion