Je comprends qu'on fasse de l'électoralisme, mais le sujet mérite beaucoup mieux que cela. Vous risquez, pour dire que vous faites une taxe sur les transactions financières, de réduire son assiette au point qu'elle n'ait plus rien à avoir avec une taxation des transactions financières.
La preuve : que taxez-vous ? Vous taxez les opérations sur les actions, c'est-à-dire les opérations les plus utiles à l'économie, les moins dangereuses, les mieux régulées. Une vraie taxe sur les transactions financières consiste au contraire à taxer les opérations les plus nuisibles, c'est-à-dire les produits dérivés, les produits qui ont mis l'économie mondiale dans la crise. On sait très bien que si cette taxe était mise en place à l'échelle de l'Europe et que si, dans ce contexte, la France taxait toutes les transactions financières à 0,05 %, elle rapporterait 12 milliards d'euros chez nous et 200 milliards en Europe, pas 1 milliard.
Ce que vous faites aujourd'hui, le rapporteur général l'a quasiment dit, c'est un impôt de bourse au rendement un peu plus élevé que celui qui existait précédemment, un peu moindre toutefois que la stamp duty anglaise, le plus vieil impôt sur les opérations de bourse, qui existe depuis trois siècles. Vous n'êtes pas sûrs, me direz-vous, de pouvoir le mettre en oeuvre, d'autres que vous essaieront peut-être de relancer le projet européen. Toutefois, avec cette réplique du droit de timbre anglais – toute petite réplique puisque la stamp duty rapporte 4 milliards contre l'unique milliard attendu de votre taxe à vous –, vous prenez le risque de voir les Britanniques, farouchement opposés à toute taxe sur les transactions financières, considérer que, la France s'étant alignée sur le Royaume-Uni, la question d'une telle taxe ne se pose plus. Je ne dis pas que cela se réalisera, mais vous courez le risque de bloquer complètement un processus qui, pourtant, est en marche en Europe, comme le montre le rapport que nous avons rédigé avec mon collègue de l'UMP Jean-Yves Cousin. S'il n'aboutit pas aux mêmes conclusions, compte tenu du contexte politique, il en ressort très bien que le processus est en marche en Europe et que, en se donnant encore un peu de temps, on peut faire une vraie taxe sur les transactions financières.
Avec ce que vous faites là pour des raisons purement électorales, vous allez passer complètement à côté du vrai sujet. Il faut du rendement – 12 milliards ce n'est pas 1 milliard –, permettre un financement européen, réguler la finance, ce que permet une vraie taxation des transactions financières et ce qui n'est pas le cas de la vôtre, et entraîner le maximum de pays.
Le sujet mérite mieux qu'une simple opération électoraliste ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)