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Intervention de Yanick Paternotte

Réunion du 8 février 2012 à 10h00
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaYanick Paternotte :

Je tiens tout d'abord à féliciter les rapporteurs pour le travail qu'ils ont effectué pendant près de cinq ans. La démarche du Grenelle, voulue par Nicolas Sarkozy et portée par Jean-Louis Borloo – qui avait considéré après le vote de la loi que nous avions édifié un monument législatif –, produit aujourd'hui ses effets, même si la récolte n'est pas aussi abondante qu'on l'aurait souhaitée et si elle compte quelques mauvais fruits. C'est globalement positif.

Je tiens ensuite à souligner que la réforme constitutionnelle, qui a permis le suivi parlementaire de l'exécution de la loi, montre ici son efficacité. Si tous les parlementaires ne s'étaient pas mobilisés, nous n'aurions sans doute pas atteint un tel taux de parution des décrets – quelque 90 %. Le « service après-vote » a fonctionné à plein : ce n'est pas anodin car, à travers un décret, un arrêté ou une circulaire, on peut tuer l'esprit d'une loi.

Tout doit-il être gravé dans le marbre pour autant ? Selon moi, il faut accepter une certaine plasticité et savoir donner du temps au temps… Les ambitions sont là : mais il y a aussi le choc de la réalité. Il faut pouvoir s'adapter. Ce n'est pas se renier que d'accepter le principe de réalité.

Cela étant, et cela peut laisser une trace d'amertume, les études d'impact préalables ont-elles été suffisantes ? Sur la sobriété énergétique, sur l'isolation des bâtiments publics, on nous avait ainsi expliqué que le temps de retour sur investissement pouvait être de cinq ou sept ans…

Pour le reste, nous pensons que les décrets sont dans l'esprit de ce qui avait été voté. Il est important de le noter car, depuis le lancement de l'examen parlementaire la loi Grenelle II, sont intervenus le choc de la crise de 2008 et la crise de la dette souveraine des États de 2011. Celle-ci et celle-là n'ont pas été sans incidences – le rapport y fait d'ailleurs allusion à plusieurs reprises. Cela nous renvoie, une fois encore, au principe de réalité.

S'agissant du transport, je rappelle que nous avions prévu, pour le trafic de marchandises, 23 % de report modal vers le ferroviaire. Or cet objectif semble inatteignable, et ce pour plusieurs raisons : d'abord, du fait de la faiblesse structurelle du réseau, mais aussi du fait des difficultés d'évolution de la loi, des adaptations de la réglementation et du marché. Prenons l'exemple des poids lourds. Certes, la taxe poids lourd a pris du retard, mais nous avons perdu un an du fait de la procédure engagée par un candidat malheureux auprès du tribunal administratif. En tout état de cause, le marché a évolué beaucoup plus vite que l'ambition : on a réduit au niveau européen la vitesse des poids lourds sur les autoroutes, ce qui devait entraîner un avantage compétitif vers le rail ; en réponse, les affréteurs se sont mis à utiliser non plus des véhicules de 3,5 tonnes, mais des camionnettes, qui peuvent rouler à 130 kmheure et ne sont soumises à aucune des règles imposées aux poids lourds. Il n'y a même application d'aucune disposition du droit du travail ou du droit social, car les chauffeurs sont souvent des personnes privées sous-traitants d'affréteurs. Cet exemple montre que l'ambition et la législation sont certes louables, mais que le pragmatisme et le principe de réalité doivent rester notre souci constant. J'ai noté avec satisfaction que les rapporteurs reconnaissaient unanimement qu'il nous fallait cinq ans de plus pour finaliser cet immense chantier. Majorité et opposition sont dans un bon équilibre : gardons-le cinq ans de plus ! (Sourires.)

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