Cette attitude n'est pas tenable, reconnaissons-le en toute lucidité, que l'on soit de gauche ou de droite : elle n'honore pas les élus locaux et la vérité n'y trouve pas son compte.
Sur ce fondement, comment se présente 2012 ? Reconnaissons-le, la situation est plutôt délicate.
Tout d'abord, la prévision de croissance a enfin été révisée pour être plus conforme à une réalité que nous connaissions lorsque la dernière loi de finances a été votée, l'année dernière. Aucun élément nouveau n'est intervenu qui permette au Gouvernement d'expliquer pourquoi une prévision de 0,5 % s'impose au début du mois de février alors qu'une prévision de 1 % paraissait raisonnable, le 21 décembre. Aucun.
Nous savions déjà que la prévision de croissance sur laquelle se fondait la loi de finances pour 2012 ne serait pas de 1 % mais bien de 0,5 %. Et nous devons remercier les pouvoirs publics d'avoir mis en accord la loi de finances de notre État avec les prévisions économiques les plus objectives ou du moins les moins déraisonnables.
Cette révision à 0,5 % se traduit par une perte de recettes de 5 milliards d'euros et je crois qu'il faut arrêter de prétendre que la réserve de précaution permettra de la combler, car ce n'est tout simplement pas vrai.
La réserve de précaution a été augmentée à 8 milliards d'euros à l'initiative du Premier ministre, l'été dernier, et nous pouvons dire que ce fut une décision sage et justifiée.
Comme en chaque début d'année, nous constatons que cette réserve est utilisée à hauteur de 1,2 à 1,5 milliard d'euros au moins pour financer des charges de service public qui n'ont pas été budgétées. En vérité, la réserve utile n'est pas de 8 milliards ni de 7 milliards d'euros mais bien plutôt de 6,5 milliards, sur lesquels s'imputent des dépenses qui, chaque année, viennent l'affecter. Chaque année, en effet, la réserve de précaution sert de chambre de compensation ou de décaissement pour 1,5 milliard à 2 milliards d'euros. Chaque année, elle fait office de caisse pour des dépenses imprévues ou des dépenses de guichet.
Dans ces conditions, prétendre que les annulations sèches, de l'ordre de 1,2 milliard d'euros, qui ont été décidées pour compenser la faiblesse de la croissance à partir de la réserve de précaution, permettront à l'État de gérer convenablement les finances publiques, ce n'est pas, je crois, faire preuve de lucidité, à moins d'affirmer que les annulations sèches de crédits pourront être, de manière exceptionnelle, six fois supérieures à ce qu'elles ont été en moyenne ces dix dernières années.
Alors que, depuis 2002, les annulations ont été en moyenne de 150 millions à 250 millions d'euros chaque année, on voudrait nous faire croire aujourd'hui qu'une annulation de 1,2 à 1,5 milliard pourrait passer sans difficulté. La chose n'est pas possible car, dans notre État, il existe des dépenses imprévues. Et c'est bien la première fois que, lors d'une loi de finances, un gouvernement explique qu'il a prévu qu'il n'y aurait pas de dépenses imprévues. (Sourires sur les bancs du groupe SRC.) Voilà qui est bien peu crédible, reconnaissons-le.
Si l'on en revient aux recettes, en particulier celles relatives à l'impôt sur les sociétés, qui sont les plus fragiles, on ne peut que s'inquiéter.
J'ai indiqué tout à l'heure qu'en 2011 le manque de recettes structurelles au titre de l'impôt sur les sociétés avait été de 400 millions d'euros alors même que la croissance économique a été de 1,7 % à 1,8 %. Comment imaginer, dès lors, que l'on puisse envisager une augmentation des recettes de cet impôt de 13,6 % avec une croissance de 0,5 % ? Ces recettes ne seront tout simplement pas là. Il n'est pas vrai que ce collectif budgétaire permettra à ceux qui succéderont au gouvernement actuel, quels qu'ils soient, de trouver des comptes en ordre et qu'il leur évitera des surprises. J'ignore quels seront celles et ceux qui auront à les gérer, mais ces surprises seront bien là, ne serait-ce qu'en raison des chiffres que je me suis permis de vous indiquer.