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Intervention de François Deluga

Réunion du 7 février 2012 à 21h30
Résorption de l'emploi précaire dans la fonction publique — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Deluga :

Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, le projet de loi que nous examinons est relativement consensuel. D'abord parce qu'il est issu d'un protocole d'accord signé le 31 mars 2011 entre l'État et les principales organisations syndicales, ensuite parce qu'il vise à protéger les personnels les plus précaires de la fonction publique.

Ce texte n'est pas pour autant anodin. Il fait partie de ces projets de réforme préparés depuis plusieurs années qui aboutissent en fin de législature, juste avant l'échéance électorale. Surtout, pour les quelque 900 000 contractuels, il s'inscrit dans une longue série de textes – nous en sommes au septième dispositif de « déprécarisation » en douze ans, depuis la loi Sapin.

Je suis d'ailleurs toujours attentif à ce que nous fassions bien attention à ne pas fabriquer, par ces textes successifs, un statut bis voire un sous-statut de la fonction publique. Les personnels concernés sont des agents précaires de la fonction publique et se retrouvent souvent confrontés, à la fin de leurs missions, à des périodes de chômage. Leurs carrières présentant des périodes d'inactivités, ils ont des difficultés à atteindre leurs pleins droits à la retraite. Ces contractuels sont en majorité des femmes, occupant des emplois à temps partiel et des postes de catégorie C. Il s'agit donc des personnes les plus fragiles, celles pour lesquelles il est urgent de concentrer l'effort.

À ce titre, je déplore dans ce texte la faiblesse du volet consacré à la formation. Or la formation est un outil essentiel pour lutter contre la précarité. Le centre national de la fonction publique territoriale, le CNFPT, que je préside, est chargé de la formation des territoriaux, des titulaires et des non-titulaires. À ceux qui en ont le plus besoin, il permet d'acquérir ou de retrouver les savoirs de base ; aux autres, il permet de préparer des concours. À tous il offre les formations professionnelles adaptées à leurs missions. J'y reviendrai.

Monsieur le ministre, lors de l'examen de ce texte au Sénat, vous avez introduit par voie d'amendements une réforme dont on parle depuis un certain temps, celle des cadres d'emploi supérieurs de la fonction publique territoriale. Vous souhaitez mutualiser au niveau national la gestion d'une partie de la promotion interne pour ces cadres d'emploi supérieurs. Cela permettra au plus grand nombre de collectivités, celles qui ne remplissent jamais les conditions nécessaires pour y recourir, d'en faire bénéficier leurs agents – c'est une bonne chose.

Cette gestion promet d'être délicate mais je prends pour un signe de confiance dans la rigueur et la qualité de sa gestion le fait que vous envisagiez de confier cette gestion mutualisée au CNFPT.

De plus, vous annoncez que le CNFPT sera bientôt chargé de la gestion et de la formation d'un nouveau cadre d'emplois, celui des ingénieurs territoriaux en chef.

Sur le fond d'abord, la création de ce cadre d'emplois supérieurs pour la filière technique est bienvenue. Elle est décidée après le transfert de l'État aux collectivités territoriales de la plus grande partie de l'ingénierie publique avec le transfert des DDE, et alors que les collectivités territoriales réalisent 72 % de l'investissement public dans notre pays.

La formation initiale de ces nouveaux ingénieurs en chef va être confiée au CNFPT, tout comme celle des autres fonctionnaires territoriaux. C'est une bonne chose et ce n'est pas une surprise. Le CNFPT connaît ce projet de réforme et n'y est pas opposé. Un rapport sur la formation initiale des élèves ingénieurs en chef a été commandé par le CNFPT et le dispositif est prêt.

En outre, la création de ce nouveau cadre d'emplois va impliquer pour le CNFPT la mise en place d'une formation initiale d'un an pour les futurs lauréats du concours d'ingénieurs en chef et va générer de nouvelles dépenses que nous avons évaluées à plusieurs millions d'euros.

Or, vous le savez, le Gouvernement a choisi, il y a maintenant six mois, d'amputer les recettes du CNFPT de 10 % sur la base d'une lecture erronée du rapport de la Cour des comptes par le sénateur Arthuis, qui se basait sur des chiffres datant de la période 2004-2008, qui ne sont donc plus du tout d'actualité.

Monsieur le ministre, vous souhaitez améliorer le statut de la fonction publique territoriale. Je le souhaite aussi mais le Gouvernement fait un autre choix lorsqu'il décide l'abaissement du taux plafond de la cotisation obligatoire versée par les collectivités pour financer la formation de leurs agents.

Dans le cadre de mon mandat à la présidence du CNFPT, je me bats maintenant depuis six mois pour que les agents des collectivités locales et leurs employeurs puissent continuer d'accéder à un service public de qualité et conservent la totalité de leurs droits à la formation.

J'ai écrit en septembre dernier à tous les employeurs territoriaux afin qu'ils proposent à leur assemblée de voter une délibération appelant au rétablissement du taux plafond de cotisation à 1 %. Le retour que nous avons est historique : à ce jour, plus de 6 800 délibérations me sont parvenues. Il est rare de constater une telle mobilisation des collectivités de toutes tailles, au-delà de tout clivage politique.

Je vous alerte donc ! Les moyens dont nous disposons ne permettront pas de supporter le coût de l'organisation d'un nouveau concours, le coût des douze mois de formation initiale et de la rémunération des élèves. C'est pourquoi je vous demande, monsieur le ministre, en contrepartie de ces nouvelles charges pour le CNFPT, le rétablissement du taux plafond de la cotisation formation à 1 %. À défaut, le vote de votre texte restera un effet d'annonce, il ne pourra pas être et il ne sera pas mis en oeuvre. C'est une solution honorable. Elle permettra au CNFPT de prendre en charge dignement le coût de cette réforme et de continuer à travailler à un service public de la formation de qualité.

J'espère vraiment que vous entendrez notre requête et celle des 6 800 exécutifs et assemblées délibérantes qui ont bien compris que la formation était un enjeu essentiel pour l'efficience de leur service public local. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

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