Vous savez fort bien que l'équation est impossible à résoudre sans l'ambition de redonner à l'État, aux collectivités locales, aux hôpitaux, les moyens d'accomplir leurs missions au service de l'intérêt général – moyens que vous n'avez cessé de leur refuser, car vous n'envisagez l'avenir de nos services publics qu'au prisme d'une logique comptable qui n'est qu'une caricature de la logique économique, et avec la perspective de remplacer les services publics par des services marchands.
En ne proposant qu'une titularisation très partielle, vous poursuivez, monsieur le ministre, dans la même direction, celle de la réduction de la dépense publique. Vous continuez à ne considérer les services publics que comme des coûts, alors qu'ils sont la richesse de notre pays.
Du fait de ses graves insuffisances, votre projet de loi laissera plus des deux tiers des agents précaires sur le carreau, sans réponse et sans solution ; et je ne parle même pas des enseignants vacataires, rémunérés à l'heure, souvent avec plusieurs mois de retard, sur la base d'un taux horaire inchangé depuis 1989, comme le rappelait le médiateur de la République en 2010. Et comment ne pas évoquer d'autres oubliés, comme les auxiliaires de vie scolaire dont les contrats, comme tant d'autres, ne sont pas renouvelés, au mépris de leur expérience et de leur investissement dans leur métier ?
Comment, enfin, prétendre endiguer à l'avenir le recours aux emplois contractuels, alors que les obligations dont fait mention le projet de loi ne sont assorties d'aucune sanction, et que les employeurs publics sont par ailleurs soumis à l'injonction gouvernementale de limiter les dépenses, c'est-à-dire de puiser dans le vivier de cette main-d'oeuvre malléable et à moindre coût que nous venons d'évoquer ? Comment croire que votre dispositif ne sera pas lui-même détourné, que des employeurs ne seront pas tentés de recruter systématiquement des agents publics différents, toujours en CDD, pour accomplir une mission qui relèverait en réalité d'un poste permanent, dans l'unique but de n'avoir pas à leur proposer un CDI ?
Vous le constatez, mes chers collègues – vous l'avez, je n'en doute pas, constaté en m'écoutant –, ce projet de loi ne nous satisfait pas – du moins pas complètement.