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Intervention de François Rochebloine

Réunion du 6 février 2012 à 21h30
Responsabilité civile des sportifs — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Rochebloine :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, si nous sommes saisis ce soir de manière assez précipitée de la proposition de loi déposée par notre collègue Éric Berdoati, c'est que nous devons apporter une réponse juridique à des difficultés réelles et concrètes.

En effet, nous avons tous pu le constater dans nos circonscriptions, il arrive parfois, malheureusement, que le sport, parce qu'il implique des risques, comme toute activité humaine d'ailleurs, donne lieu à des accidents entraînant une atteinte à l'intégrité physique des pratiquants, des participants ou des tiers. Or, pendant longtemps, la justice a considéré de manière particulière la responsabilité civile délictuelle des sportifs, au motif qu'ils ont connaissance des dangers normaux et prévisibles encourus et que, de ce fait, ils doivent les assumer. Il s'agit de la théorie de l'acceptation des risques, selon laquelle un sportif engagé dans une compétition et victime d'un dommage causé par une chose placée sous la garde de concurrents ne peut invoquer le droit commun de la responsabilité du fait des choses, mais doit au contraire prouver la faute de l'auteur du dommage.

Il semble que cette jurisprudence bien établie soit remise en cause depuis l'arrêt de la cour de cassation du 4 novembre 2010, ce qui laisse envisager un véritable revirement dont les conséquences seraient très importantes. Si le bénéfice de la théorie de l'acceptation des risques n'était plus admis pour les pratiquants sportifs, il est certain que cela aurait des incidences lourdes et déstabilisantes pour la plupart des organisateurs d'événements et des fédérations, notamment pour les sports mécaniques et le cyclisme, mais aussi l'équitation ou le bateau, voire l'athlétisme.

Notre rapporteur a déjà expliqué les deux conséquences majeures induites par cette modification de la jurisprudence, à commencer par le passage d'un régime de responsabilité pour faute à un régime de responsabilité sans faute. Les victimes n'auraient plus à établir la faute du gardien de la chose à l'origine de leur dommage pour pouvoir être indemnisées. Dès lors, la responsabilité des organisateurs d'événements sportifs à risques et des fédérations, seuls soumis à une obligation d'assurance en responsabilité civile, et en première ligne pour des raisons de solvabilité, risquerait d'être plus souvent mise en cause.

D'autre part, la nature des dommages sujets à réparation s'étendrait. S'ajouteraient désormais aux préjudices couverts les dommages moraux et les dommages immatériels, d'où une augmentation possible des indemnisations à payer par les organisateurs d'événements sportifs ou par les fédérations. Il s'ensuivrait un risque d'augmentation considérable des primes d'assurance pour les organisateurs et les fédérations, comme l'ont déjà constaté les organisateurs de sports mécaniques.

Dans ces conditions, la proposition de loi que nous étudions ce soir va évidemment dans le bon sens, puisqu'elle permettra de redonner une stabilité au cadre de la responsabilité civile pour les activités physiques et sportives.

Sur le fond, il est indispensable de revenir à la théorie de l'acceptation du risque et de restaurer la nécessité d'une faute caractérisée pour engager la responsabilité du sportif. Sans doute la jurisprudence de 2010 est-elle allée un peu loin.

Je veux souligner que, pour nous, il est positif d'exclure explicitement du champ du régime de la responsabilité civile sans faute les dommages matériels causés à d'autres pratiquants à l'occasion de l'exercice d'une pratique sportive sur un lieu dévolu à celle-ci par une chose dont les pratiquants ont la garde.

Il nous paraît également positif que cette règle spéciale en matière de responsabilité civile délictuelle se rapproche du droit applicable dans de nombreux autres pays.

Tous les pratiquants et les organisateurs d'activités et de manifestations sportives présentant des risques vont s'en trouver soulagés, puisqu'ils verront leur contrainte assurantielle allégée, sans que cela ne prive pour autant les pratiquants de toute protection, le droit applicable restant celui de la responsabilité civile pour faute, comme avant l'arrêt du 4 novembre 2010.

Il nous paraît évident qu'on ne saurait tenir pour responsables, en dehors de toute faute de leur part, les organisateurs de pratiques sportives présentant des risques, s'agissant des dommages intervenus entre pratiquants dans les enceintes mises à leur disposition pour s'entraîner ou concourir. Ces pratiquants, dès lors qu'ils s'engagent en connaissance de cause, assument les risques qu'ils prennent. Il est nécessaire de prendre acte, dans la loi, de cette évidence.

Il est indispensable par ailleurs de préserver un certain nombre de pratiques sportives et d'événements sportifs dont on sait qu'ils peuvent être menacés par la multiplication des contraintes et des obligations de tous ordres. Je pense ici aux compétitions qui se déroulent sur la voie publique, comme les épreuves cyclistes ou d'autres disciplines telles que les courses sur stade en athlétisme.

Nous savons en particulier l'importance du sport automobile dans notre pays, même si certains font tout pour compliquer cette activité sportive.

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