Il est évident que le travail que nous devons accomplir pour assurer la sécurité de nos concitoyens dans les réseaux ferrés franciliens est lié à la notion de bassin de délinquance et à la notion d'agglomération. Mais nous n'avons pas eu à attendre le 14 septembre 2009, date de naissance de la police d'agglomération à Paris et dans les trois départements de la Petite couronne. En effet, le Service régional de police des transports – SRPT – a été créé en 2003 par le ministre de l'intérieur de l'époque, M. Nicolas Sarkozy. Auparavant, le dispositif de sécurité publique déployé dans les transports par la police nationale et par la gendarmerie était totalement segmenté et la compétence des fonctionnaires se limitait en général au département, ce qui pouvait entraîner des situations ubuesques.
Le contexte francilien est bien particulier. Sur 2,2% du territoire national se concentrent là 18% de la population, soit 11 600 000 habitants. Dix millions de voyageurs circulent quotidiennement sur les différents réseaux de la région : 5 millions dans le métro ; 1 700 000 sur le réseau RATP du RER et 2 500 000 sur le réseau SNCF Transilien. Nous devons surveiller 449 gares SNCF, 66 gares RER RATP, 300 stations de métro, 5790 rames RATP et quelque 5 000 trains SNCF.
Je souhaiterais maintenant faire le point sur les chiffres de la délinquance au cours des dix dernières années, depuis la création du Service régional de police des transports. Ce sera l'occasion, monsieur le président, d'apporter certaines nuances sur le degré d'inquiétude de nos concitoyens. En effet, même si nous n'avons pas réglé tous les problèmes, nous avons beaucoup progressé dans notre lutte contre la délinquance, alors même que le nombre des voyageurs a considérablement augmenté, passant de sept millions, a la fin des années 90, à dix millions de voyageurs par jour – ce qui ne pose pas que des problèmes de sécurité.
La délinquance a baissé dans les transports comme elle a baissé dans toute l'agglomération parisienne. Je dois toutefois reconnaître que l'accroissement de la surface couverte par le SRPT complique parfois les comparaisons. Ainsi, une réforme de 2007 - applicable en 2008 – a confié à ce service, outre les lignes et les trains, les gares, ce qui a évidemment fait monter les chiffres de la délinquance. D'autre part, l'année 2010 a été particulièrement difficile puisque l'on a alors enregistré de nombreux vols avec violence, liés notamment à l'arrivée des smartphones de nouvelle génération – et souvent répertoriés comme tels pour des questions d'assurance. Mais, depuis, la tendance s'est inversée.
Comment se caractérise la délinquance sur les réseaux ferroviaires ?
Il s'agit à 70% d'une délinquance dite acquisitive, c'est-à-dire de vols. Pour moitié - 53% –, ce sont des vols à la tire ou des vols simples et la proportion est pratiquement inchangée par rapport à 2002, où ils comptaient pour 51%. En revanche, les vols avec violence ont représenté, pour cette dernière année 2011, 17,86 % du total de la délinquance alors qu'en 2002, ils n'en représentaient que 10%du total.
Le nombre des atteintes dont sont victimes les agents des transporteurs – outrages, actes de violence et de rébellion – est stable, avec 2% du total des infractions relevées. Il en est de même des violences commises à l'encontre des particuliers, avec 3% du total. Malgré tout, nous avons enregistré l'année dernière une petite augmentation des actes hostiles subis par les agents de la RATP et de la SNCF.
Enfin, la part des IRAS ou infractions révélées par l'action des services – et pas seulement constatées – est relativement stable, de l'ordre de 15%.
Venant après des années de baisse de la délinquance, l'année 2010 avait nourri nos inquiétudes. Mais en 2011, la situation a évolué favorablement : pour l'agglomération, c'est-à-dire Paris et les départements de la Petite couronne, nous avons enregistré une baisse de 3,69% des actes de délinquance, et même de 6,59% à Paris, ce qui est d'autant plus appréciable que c'est là que se produisent près de la moitié des faits – 46,84% exactement. Nous sommes moins efficaces dans la Grande couronne. Même si la délinquance y est moins importante en valeur absolue, avec seulement 27% des faits enregistrés, elle y a progressé de 16,75%.
De ce fait, l'année se termine sur une augmentation de la délinquance de 1%, mais le constat de cette évolution très contrastée entre le centre de Paris et la Petite couronne, d'une part, et la Grande couronne, d'autre part, nous amène évidemment à réorganiser quelque peu notre dispositif. Il ne faut cependant pas oublier que nous avons désormais compétence, au-delà des limites de la région Île-de-France, sur les « bouts de ligne ».
L'année dernière, nous avons donc fait porter l'effort sur les vols avec violence, parmi lesquels les vols de téléphones portables occupaient une grande place puisqu'ils comptaient pour 70% des objets volés, dont 43% pour les seuls iPhones. Depuis, la Brigade anti-criminalité a interpellé 2 684 auteurs de vols à la tire ou avec violence, soit 27% de plus qu'en 2010. L'unité d'appui au réseau a, quant à elle, procédé à l'interpellation de 245 auteurs de ce type d'agressions acquisitives. Le résultat final est que les vols avec violence ont baissé de 7,67% en 2011. Nous n'en sommes pas totalement satisfaits, mais nous avons su inverser la tendance. Nous pourrons bien évidemment fournir à votre commission tous les détails qu'elle souhaitera.
Je voudrais présenter maintenant la structuration du dispositif, c'est-à-dire l'organisation spécifique de ce qui est devenu, dans le cadre de la police d'agglomération, la sous direction régionale de la police des transports, depuis 2003 organe de commandement opérationnel unique de la sécurité dans les réseaux de transport d'Île-de-France.
Cette sous direction, qui est sous la responsabilité de M. Rivayrand, dispose d'une autorité fonctionnelle sur les quatre directions territoriales de la sécurité de proximité de l'agglomération parisienne, mais aussi sur les quatre directions départementales de la sécurité publique – DDSP – de la Grande couronne, sur les quatre groupements de gendarmerie départementale et sur les deux services de sécurité des transporteurs : le GPSR pour la RATP et la SUGE pour la SNCF.
Elle regroupe aujourd'hui 1 369 fonctionnaires : un état-major de 14 fonctionnaires et un service à vocation régionale : la Brigade des réseaux ferrés – BRF – de 1 355 policiers. Cette BRF est structurée en trois départements : la sécurisation générale, l'investigation judiciaire et la police des gares parisiennes qui, comme je l'ai dit, a été rattachée au SRPT en 2008 alors qu'elle était auparavant de la responsabilité des commissariats territorialement compétents.
Avec l'investigation judiciaire, nous disposons d'un outil qui nous permet de prendre en charge l'instruction judiciaire du dossier, quel que soit le lieu de constatation de l'infraction.
Au cours de l'été, le ministre nous a demandé de renforcer le SRPT de 300 fonctionnaires. Nous y avons donc affecté 111 fonctionnaires actifs de la police nationale, gradés ou gardiens, et 100 adjoints de sécurité que nous avons recrutés dans le courant de l'année, ainsi qu'un escadron de la gendarmerie mobile qui nous a été dédié pour cette mission hors de notre enveloppe régionale ; il constitue une aide permanente, qui nous permet d'avoir 14 patrouilles quotidiennes supplémentaires sur le terrain
La Brigade des réseaux ferrés a accru en 2011 sa présence et sa visibilité, avec 126 patrouilles par jour – 94 de la BRF et 32 des forces de renfort –, soit sept patrouilles de plus qu'en 2010. Nous pouvons ainsi couvrir tous les jours 912 gares et 813 trains, contre respectivement 880 et 606 en 2010.
Pour la coordination avec les exploitants, nous disposons d'un pôle opérationnel régional « Transport » à la salle d'information et de commandement (SIC) de la Direction de la sécurité de proximité de l'agglomération parisienne (DSPAP), pôle qui fonctionne vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept. Ce pôle, implanté dans l'Île de la Cité, est relié aux salles de commandement de la RATP et de la SNCF, qui sont situées respectivement à la Maison de la RATP et à la Gare du Nord.
Nous sommes également en liaison avec les centres d'information et de commandement des quatre directions départementales de la sécurité publique, avec les centres opérationnels de la gendarmerie et avec le centre du Service national de la police ferroviaire.
Nous avons enfin beaucoup progressé dans le travail en commun avec le GPSR et la SUGE, avec lesquels nous sommes en contact permanent.
Sur le fondement de textes adoptés l'année dernière, notre compétence a été prolongée au-delà des limites territoriales de la région Île-de-France, et étendue à cinq « bouts de ligne » sensibles : jusqu'à Creil et Beauvais sur les lignes TER Paris Nord ; jusqu'à Dreux sur la ligne TER Paris Montparnasse ; jusqu'à Vernon sur la ligne TER Paris Saint-Lazare ; jusqu'à Malesherbes, dans le Loiret, sur la ligne D du RER. Les opérations de sécurisation des gares et des trains sont donc préparées avec les exploitants sur ces nouveaux sites.
Les horaires de présence ont également été étendus, grâce à la sécurisation nocturne des réseaux qui est assuré par la BRF.
Je terminerai sur un sujet pour nous essentiel en raison des progrès dont il ouvre la possibilité : la vidéoprotection.
Nous avons travaillé sur cette question de façon très coordonnée avec la SNCF et la RATP. À l'heure actuelle, la RATP dispose de 8 000 caméras, avec possibilité de renvoi d'images et enregistrement de 72 heures – 5 300 dans le métro, 2 000 dans les stations du RER A et 800 dans celles du RER B. La SNCF dispose pour l'heure de 5 300 caméras, utilisées dans les mêmes conditions. Le pôle opérationnel régional « Transport » de la SICDSPAP, qu'il serait d'ailleurs intéressant de vous présenter, dispose des retours d'images et peut visualiser simultanément huit écrans RATP et huit écrans SNCF. Je précise que l'on peut diffuser quarante images simultanément avec cinq pupitres SNCF.
Je tiens à insister sur le caractère opérationnel de cette vidéoprotection, qui peut être utilisée par la justice a posteriori, c'est-à-dire lorsque des méfaits ont été commis. Au cours des dernières années, les services de police, qu'il s'agisse de la police judiciaire ou de la DSPAP, ont de plus en plus souvent demandé l'accès aux images pour identifier les auteurs de délits. En 2008, nous avons compté 3 044 réquisitions ; en 2009, 5 705 ; en 2010, 7 015 et l'année dernière, 7 672 : ce qui traduit une véritable explosion !
La vidéoprotection est un outil très précieux. Je suppose que vous avez tous à l'esprit les affaires que nous avons élucidées grâce à elle. En quarante-huit heures, nous avons pu interpeller l'agresseur d'une dame à laquelle il avait arraché son iPhone et qui était tombée dans l'escalier. De la même façon, nous avons pu identifier deux « pousseurs », dont l'un opérait à La Défense.
Mais cet outil a trouvé une autre utilisation, encore plus intéressante, avec les « vidéopatrouilles » que nous avons mises en place depuis le mois de septembre dernier, notamment aux Halles, et à propos desquelles on peut parler d'une exploitation « proactive » de la vidéo : des policiers passent une heure derrière la caméra, puis partent faire leur patrouille et sont remplacés par des collègues. Nous avons affecté à ces « vidéopatrouilles » 1 041 fonctionnaires pour un volume de 7 816 heures et réalisé, depuis leur création, 2 031 arrestations qui ont été déterminantes pour confondre des individus qui s'étaient notamment livrés à des vols avec violence.
Si des membres de votre Commission le souhaitent, nous pourrons vous montrer comment fonctionne le dispositif des Halles, le même que celui qui a été mis en place dans l'Île de la Cité dans le cadre du Plan de vidéoprotection de Paris (PVPP) et qui a été inauguré par le Premier ministre, le 21 décembre 2011, en présence du maire de la capitale – là, avec seulement 143 caméras pour l'instant, nous avons pu procéder à plus de 200 interpellations. Nous constatons ainsi la démonstration de l'utilité de la vidéo, non pas pour remplacer les policiers, mais pour les rendre plus efficaces sur le terrain.
Je devrais sans doute ajouter, parmi nos nouvelles modalités de travail, la géolocalisation de nos patrouilles qui permet de guider rapidement celles-ci vers les lieux où elles seront les plus utiles.