Cette proposition de loi n'a qu'un but : la réforme dite de mastérisation ayant transféré la formation des enseignants à l'université, elle procède à quelques modifications des articles du code de l'éducation qui, dans leur rédaction actuelle, confient cette mission aux Instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM).
Dans le modèle antérieur de formation, les enseignants étaient recrutés au niveau de la licence, ou de la maîtrise pour les agrégés, parfois après avoir préparé le concours dans un IUFM, et effectuaient, pendant leur année de stage probatoire, une année de formation en alternance répartie entre les établissements et les instituts où ils étaient initiés, pendant les deux tiers de leur service, à la pratique de l'enseignement.
La réforme a prolongé et unifié la formation des maîtres : les professeurs des écoles et les professeurs de collège et de lycée, certifiés et agrégés, sont désormais recrutés à bac + 5, au niveau du master, diplôme obtenu, dans l'immense majorité des cas, à l'université. La France s'est ainsi mise au diapason européen, en faisant le pari que l'université, qui forme déjà, et fort bien, les médecins et les avocats, saura préparer les étudiants au métier d'enseignant. Depuis la rentrée 2010, les admis aux concours sont donc directement affectés en établissement et bénéficient, au cours de leur année de stage, d'une formation complémentaire, dite « continuée », organisée par l'université et représentant un tiers de leurs obligations réglementaires de service.
Mais, faute d'avoir été modifiés, les articles du code de l'éducation se réfèrent à l'ancien modèle de formation. L'article L. 625-1 dispose ainsi que la formation des maîtres est assurée par les instituts, qui accueillent à cette fin les étudiants préparant les concours et les stagiaires admis à ces concours. Dans le même esprit, l'article L. 721-1 indique que les IUFM « conduisent les actions de formation professionnelle initiale des personnels enseignants », cette disposition faisant référence à l'année de formation en alternance, qui n'est plus organisée.
Les modifications proposées ont donc un triple objet. Premièrement, affirmer que la formation des maîtres est désormais assurée par les universités, « notamment ». À ce titre, ces établissements accueillent les étudiants préparant les concours et participent à la formation complémentaire des enseignants stagiaires admis à ces concours. Dans mon esprit, l'adverbe « notamment » se réfère aux écoles ou autres établissements d'enseignement supérieur qui proposent des masters « Enseignement » et forment ainsi les futurs enseignants. Je n'ai jamais – je dis bien jamais – voulu confier la formation à d'autres établissements que ceux-là. Dès lors, pour lever tout risque d'ambiguïté, et à la suite des observations de la Conférence des présidents d'université (CPU) et de la Conférence des directeurs d'IUFM (CDIUFM), je vous proposerai une rédaction plus claire et faisant référence aux masters orientés vers les métiers de l'enseignement.
Le deuxième objectif est d'acter la suppression de l'année de formation en alternance, qui n'existe plus aujourd'hui.
Le troisième est de préciser que les IUFM « participent à la formation des personnels enseignants » et non plus à leur seule formation « continue ». C'est reconnaître que les universités s'appuient, aujourd'hui, sur les IUFM pour organiser les actions de formation des enseignants, que cette formation soit initiale, pour les étudiants, complémentaire, pour les enseignants stagiaires, ou continue, pour les titulaires. La rédaction proposée revient donc à étendre la compétence d'opérateur des IUFM à l'ensemble de la formation des enseignants.
Ces modifications conduisent donc à conforter la place des IUFM : c'est faire un faux procès à cette proposition de loi que d'affirmer qu'elle les démantèle. C'est ce qu'ont reconnu, d'ailleurs, les représentants de la CDIUFM que nous avons entendus mercredi dernier.
En outre, la proposition de loi sanctuarise deux des missions des IUFM, en ne modifiant pas les dispositions qui s'y réfèrent : la recherche en éducation et l'organisation des « périodes de formation professionnelle en faveur des étudiants ».
La formation des maîtres est actuellement encadrée par un cahier des charges auquel la proposition de loi prévoit de substituer un référentiel. Je voulais, par cette rédaction, tenir compte de la philosophie de la loi dite LRU du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités, qui conforte l'autonomie pédagogique et scientifique des universités : un référentiel a un caractère moins prescriptif et détaillé qu'un cahier des charges. Mais, sensible aux inquiétudes exprimées par la CPU et la CDIUFM, je vous proposerai de revenir à la notion de cahier des charges, la formation des maîtres étant une mission régalienne qui, à ce titre, devrait être fortement encadrée.