Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, avec cette deuxième lecture de la proposition de loi sur le contrôle des armes, nous arrivons au terme d'une procédure législative que l'on peut qualifier d'exemplaire.
C'est notre commission des lois qui s'est interrogée sur la pertinence d'un dispositif qui remontait pour l'essentiel à 1939, c'est-à-dire à une période troublée où tout détenteur d'une arme à feu était regardé comme constituant une possible menace pour l'ordre public.
C'est une mission d'information, présidée par Bruno Le Roux, député SRC, et rapportée par Claude Bodin, député UMP, qui a conclu à la nécessité de réformer.
C'est notre assemblée qui lors de la première lecture a fait prévaloir ces idées qu'une arme n'est dangereuse que si elle est utilisée d'une manière dangereuse, qu'il faut donc traiter d'une manière différente, d'un côté les propriétaires et les utilisateurs pacifiques – chasseurs, tireurs sportifs, collectionneurs – et de l'autre ceux qui menacent la sécurité publique ; qu'il est par conséquent nécessaire de supprimer les tracasseries qui pèsent sur les premiers et de renforcer les contrôles sur la cession des armes pour éviter qu'elles tombent dans de mauvaises mains ; qu'il faut être impitoyable dans la lutte contre le trafic et l'utilisation délictuelle des armes.
Je voudrais féliciter la commission des lois pour sa lucidité et son pragmatisme dans cette approche, et pour la qualité des échanges qu'elle a constamment entretenus avec les professionnels qui produisent, vendent ou utilisent des armes et les associations, c'est-à-dire les chasseurs, les sportifs, les collectionneurs. Ces compliments s'adressent tout particulièrement à Jean-Luc Warsmann, président de la commission, et à Claude Bodin, rapporteur du texte après avoir été rapporteur de la mission d'information.
Je souhaite également saluer l'approche de ce texte par la Haute assemblée en première lecture. Le Sénat partage pour l'essentiel les analyses de notre assemblée sur la nécessité de simplifier la législation, d'instaurer des obligations graduées selon non seulement les caractéristiques des armes mais aussi la nature des détenteurs, de durcir les sanctions à l'encontre des délinquants et des trafiquants, notamment par le prononcé obligatoire de peines complémentaires.
La plupart des modifications que propose la Haute assemblée ne portent atteinte ni à l'équilibre ni à l'efficacité de la réforme que nous souhaitons.
Il reste à présent à mettre au point les derniers réglages. Et il était important que cet exercice soit fait non seulement en pleine transparence à l'égard des professionnels et des associations, mais également avec leur participation. Comment, à cet effet, ne pas saluer l'initiative prise par la commission des lois d'organiser, le 12 janvier dernier, la table ronde qui a permis à chacun de préciser ses positions ?
Il nous reste quatre points majeurs à trancher.
Le premier concerne le champ des dérogations apportées à l'interdiction d'acquisition et de détention des armes de la catégorie 1. Il est clair que ces dérogations doivent être très strictement limitées. Toutefois, il est indispensable que certains services publics ou certaines professions puissent en bénéficier. Il s'agit des services opérationnels, civils ou militaires, chargés de la sécurité publique, mais aussi des entreprises privées qui sont en relation étroite avec ces services et qui sont exposées à des risques majeurs. Je pense notamment aux convoyeurs et à certaines sociétés de gardiennage ou de surveillance. Sur ce point, la position exprimée par la commission des lois me paraît procéder d'une appréciation très lucide – hélas ! – de la situation.
Le deuxième point concerne les conditions d'acquisition des armes de catégories B et C. Il faut simplifier les procédures, mais il faut également sécuriser les transactions. Les précisions préconisées par la commission des lois me paraissent à cet égard particulièrement bienvenues.
Le troisième point porte sur les droits qui s'attachent à la possession d'une carte de collectionneur. La détention d'une carte simplifiera considérablement la vie des collectionneurs. Dès lors qu'ils auront satisfait aux conditions fixées par la loi, conditions qui ont été durcies par le Sénat, ils ne seront plus tenus de disposer d'un permis de chasser ou d'une licence de tireur sportif des armes de catégories C et D. Reste la question des munitions neutralisées, sur laquelle le Gouvernement manifeste des réticences. Nous en débattrons dans un instant.
Le quatrième point concerne les conditions de transport et de port d'armes, pour lesquelles la solution proposée par la commission des lois tient compte des observations justifiées formulées par les chasseurs : plus de souplesse pour le transport des armes de chasse puisque les chasseurs pourront légitimement transporter ces armes même si leur permis de chasser n'a pas été validé l'année en cours ou l'année précédente ; en revanche, plus de rigueur pour le port d'une arme de chasse, en action de chasse ou pour une activité qui y est liée, la détention d'un permis de chasse, validé l'année en cours ou l'année précédente étant dans ce cas requise.
Je ne doute pas que, sur ces différents points, notre assemblée saura trouver un très large consensus, en plein accord avec le Gouvernement.
En définitive, les débats parlementaires auront permis d'aboutir à une large convergence de vues entre la majorité et l'opposition, entre l'Assemblée nationale et le Sénat, entre le Parlement et le Gouvernement.
Dans cet hémicycle où les affrontements sentent parfois la poudre (Sourires), il aura fallu que l'on traite de la législation des armes pour que les tensions s'apaisent et que le consensus se fasse. À l'approche des débats du printemps, serait-ce le signe annonciateur de l'émergence d'une démocratie apaisée ? On peut bien sûr rêver.