Notre étude sur l'hébergement nous conduit par ailleurs à estimer nécessaire un exercice de lucidité dans la sérénité à propos de la situation des personnes sans papier, plus particulièrement des demandeurs d'asile ou des déboutés du droit d'asile. Nos travaux nous ont amenés à constater que des personnes étrangères en situation irrégulière, souvent déboutées du droit d'asile, sont hébergées durablement, souvent dans des hôtels s'agissant de familles comptant des enfants, au titre de la politique publique objet de notre étude. Ces parcours, nombreux, banalisés, accompagnés et financés sur fonds publics, reflètent-ils un équilibre au regard des débats qui traversent notre société quant aux principes et aux conditions de l'accueil des étrangers ? Pour aborder cette grave question, nous souhaitons l'organisation d'états généraux, après une évaluation parlementaire transpartisane – pourquoi pas menée par le CEC –, sur la réalité des conditions d'accueil et de vie sur notre territoire des personnes étrangères en demande d'asile ou en situation irrégulière, et sur les coûts publics associés, notamment pour l'État et les collectivités territoriales.
Enfin nous préconisons la discussion et l'adoption, dès la prochaine législature, d'un projet de loi d'orientation et de programmation pluriannuelle. Il s'agirait, non seulement d'accélérer et d'amplifier la mise en oeuvre de la refondation dans l'optique du « logement d'abord », mais aussi de prendre une série de dispositions et d'engagements qui feraient du sort des personnes sans domicile et en situation de grande précarité une priorité collective. Ce texte pourrait être défendu par un ministre de plein exercice, le cas échéant directement rattaché au Premier ministre. Pour affronter la complexité du sujet de l'hébergement, on pourrait d'ailleurs imaginer un nouveau mode de management gouvernemental par projet, où un ministre recevrait des compétences transversales au titre d'un projet.
Un tel texte pourrait créer un produit d'épargne réglementé, ou aménager un produit d'épargne réglementé déjà existant, afin d'orienter au moins une part de cette épargne vers les investissements – notamment expérimentaux – des associations et bailleurs sociaux opérant dans le secteur de la prise en charge des personnes les plus démunies.
Nous souhaitons, en conclusion, replacer ces questions, parfois techniques, dans leur contexte humain. L'enjeu de la refondation, orientée vers le « logement d'abord », est de porter cette politique publique à la hauteur des besoins, sinon des projets des personnes sans domicile. Notre société ne parviendra à réinsérer les personnes, et plus largement les personnes en situation de grande précarité, qu'à la condition de ne pas les considérer comme des exclus ab initio. Cela doit être une priorité, à la fois culturelle et politique. Le traitement de cette question ne relève pas seulement de dispositifs techniques complexes : elle dépend aussi du regard que la société porte sur les plus pauvres. Son succès suppose de concilier ces deux dimensions.
Dans ces conditions, monsieur le Président, nous souhaitons donner à ce rapport le titre suivant : « Pour un service public efficace de l'hébergement et de l'accès au logement des plus démunis ».