Parfait !
De telles salles ont été mises en place dans un nombre très limité de pays ou, plus exactement, de villes ou de provinces – Vancouver n'est pas plus le Canada que Bilbao n'est l'Espagne ou Genève la Suisse – connaissant des phénomènes extrêmes tels que les « scènes ouvertes ». L'exemple suisse est à ce propos particulièrement emblématique puisque les usagers d'héroïne y sont deux fois plus nombreux qu'en France. Je crains, d'ailleurs, que Genève ne soit plus exposée aux problèmes de drogues que d'autres cantons suisses en raison de la politique menée.
La France n'a quant à elle jamais connu pareille situation. Je le répète, 130 000 usagers bénéficiant de traitements de substitution aux opiacés et l'échange annuel de 15 millions de seringues ont permis de ramener à 70 000 le nombre de consommateurs effectifs d'héroïne, chiffre intéressant par rapport aux centaines de milliers de consommateurs d'autres drogues ou aux millions de fumeurs de cannabis. Même si nous sommes inquiets pour l'avenir, nous pouvons considérer que cette addiction, sans avoir hélas disparu, n'en est pas moins résiduelle. S'agissant donc de l'usage d'héroïne mais, aussi, des surdoses et des contaminations au virus de l'immunodéficience humaine (VIH) ou aux hépatites, notre pays compte parmi ceux qui obtiennent les meilleurs résultats en Europe. Si nous devons les conforter en allant à la rencontre des usagers les plus fragiles, ne plaquons pas sur la réalité française des solutions inadéquates !
De surcroît, l'efficacité socio-économique de ces structures en ces temps de contraintes économiques et budgétaires est à tout le moins problématique, comme en atteste le rapport de l'INSERM. Une étude réalisée à Vancouver conclut que deux décès par an – voire un seul – dus au VIH ont pu être évités grâce à ces structures, dont le coût de fonctionnement annuel s'élève d'ailleurs à près de 3 millions de dollars. Il y a donc de quoi être perplexe !
La même étude montre également que la mise en place de ces salles n'a eu aucune incidence sur les transmissions du VIH ou des hépatites puisque les populations qui les fréquentent sont souvent très infectées. À moins de généraliser leur implantation sur l'ensemble d'un territoire, il sera difficile d'éviter ces infections très en amont.
À Vancouver, 38 % des personnes qui se rendent dans ces structures s'inscriraient dans une trajectoire de soins. Outre qu'il est un peu particulier d'aller dans un lieu pour s'injecter de l'héroïne et envisager ensuite de se soigner, le rapport précise que 38 % des usagers ont été « référencés à un système de soins ». N'étant pas médecin mais juriste, je me suis renseigné : cette formule signifie simplement qu'un médecin généraliste a communiqué à un patient les coordonnées d'un médecin spécialiste. Être « référencé », c'est être adressé à un système de soins. Or, seuls 17 % de ces 38 % s'y sont effectivement rendus. In fine, combien de personnes ont donc été désintoxiquées pour un coût aussi élevé ? Les traitements de substitution aux opiacés et les échanges de seringues sont autrement plus efficaces et moins coûteux !
Ensuite, comment prendre en charge les personnes très précaires ? Tout d'abord, j'observe qu'il est très difficile de cerner cette population puisque les études existantes – je songe à celles de l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies sur les centres d'accueil et d'accompagnement à la réduction des risques pour usagers de drogues – se fondent sur ceux-là seuls qui fréquentent les centres de soins. On constate en l'occurrence que les sans-papiers sont nombreux, de même que les cocaïnomanes ou, plus spécifiquement, les « crackers » ainsi que les personnes présentant des troubles psychiatriques importants. Comment donc agir plus efficacement ? Sans doute pas en mettant héroïne – avec les « salles de shoot » – et cocaïne – avec les « snifferies » – à disposition !
Agir en faveur des personnes en situation de précarité, c'est mettre en place des maraudes, à l'instar de celles que M. Xavier Emmanuelli a organisées…