Je tiens moi aussi à saluer le travail effectué.
J'ai déjà eu l'occasion, en 2007, dans le cadre d'un rapport pour avis sur les crédits de la mission « Santé » du projet de loi de finances, d'aborder la question de l'efficacité des politiques menées en matière de lutte contre la toxicomanie. J'avais, à l'époque, préconisé les communautés thérapeutiques et les salles d'injection supervisées. Je me félicite que le rapport insiste sur la nécessité de développer les premières.
S'agissant des traitements de substitution aux opiacés, le mésusage du Subutex est un énorme problème – j'ai pu le constater en tant que pharmacien. Le dossier pharmaceutique apportera une solution efficace. Il faudra donc l'imposer afin de pouvoir suivre, dans le pays entier, tout patient prenant du Subutex, seul moyen d'éviter les prescriptions abusives.
À propos des salles d'injection supervisées, le rapport, à mon grand étonnement, évoque « des zones de non-droit » et « une politique de capitulation », ce qui laisse à penser que seule la vision « salle de shoot » et non « salle de consommation à moindres risques » a été retenue. Je tiens à rappeler que les salles de consommation sont réglementées, et supervisées par des professionnels. C'est une nouvelle main tendue à des usagers en grande précarité, à qui l'on permet d'entrer en contact avec des professionnels et d'entamer un parcours de soin.
Quant à dire du coût de ces salles qu'il serait trop élevé, c'est biaiser le débat puisque dans la salle Quai 9 de Genève, les intervenants sont deux à trois fois plus payés qu'en France et que de plus, le coût de cette salle – 2,8 millions d'euros – comprend également la prise en charge d'un bus d'échange de seringues. À titre de comparaison, la salle de consommation de Bilbao coûte 500 000 euros par an.
En ce qui concerne les surdoses, l'argument selon lequel elles sont moins nombreuses en France que dans les autres pays n'en est pas un : il en reste encore beaucoup trop !
Enfin, à la suite de la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie, ce rapport assure que les salles de consommation banaliseraient l'usage de drogues, entraînant une dépénalisation de fait. Je rappelle que ces mêmes arguments ont été utilisés par les opposants aux programmes d'échange de seringues en pharmacies lorsqu'elles ont été mises en vente libre en 1987, et par les opposants aux programmes de méthadone dans les années 1990.
La proposition, reprise de la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie, de remplacer les salles de consommation par des maraudes n'est pas satisfaisante. Du reste, ce sont les associations qui réalisent des maraudes – Gaïa, Charonne ou Ego –, qui demandent l'ouverture des salles de consommation parce qu'elles n'arrivent pas à atteindre les usagers les plus vulnérables, d'autant que les maraudes n'empêchent pas les conditions d'injection déplorables dans les caves ou d'autres lieux. L'absence de « scènes ouvertes » n'est pas non plus un très bon argument : entre les gares du Nord et de l'Est, à Paris, les scènes ouvertes de consommation de drogue existent depuis quinze ans. Simplement, elle se déplacent d'une centaine de mètres en fonction des opérations de police.
Je regrette enfin que le rapport ne soit pas plus prolixe sur la réduction des risques, notamment en milieu festif ou à la campagne, où des problèmes relativement nouveaux se posent de manière importante.