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Intervention de Annie Podeur

Réunion du 8 juin 2011 à 16h15
Mission d'information assemblée nationale-sénat sur les toxicomanies

Annie Podeur, directrice générale de l'offre de soins au ministère du travail, de l'emploi et de la sant :

Quel est le rôle de la direction générale de l'offre de soins dans la mise en oeuvre des plans de prise en charge et de prévention des addictions ?

Il faut être conscient qu'en ce domaine, le chef de file est la direction générale de la santé. J'avais d'ailleurs suggéré une audition commune avec son directeur général, M. Jean-Yves Grall. La direction générale de la santé est en effet chargée de faire le lien, dans la mise en oeuvre du plan de santé publique, entre la direction générale de l'offre de soins qui s'occupe de l'organisation des soins – y compris, maintenant, dans le champ ambulatoire – et les structures médico-sociales.

Dans ces conditions, la vision de la direction générale de l'offre de soins est nécessairement un peu tronquée, d'autant que les premiers plans relatifs aux addictions concernaient plutôt le secteur médico-social. Ce n'est qu'à la faveur du dernier plan 2007-2011 que le secteur sanitaire est devenu un acteur à part entière du dispositif. Ma direction générale a ainsi été conduite à mettre en place une organisation hospitalière graduée – parce qu'on ne peut pas tout faire partout – en trois niveaux.

Il n'y a pas de structures d'addictologie dans tous les établissements. Le secteur hospitalier public – où se sont développées la plupart de ces structures – compte environ 1 000 établissements, dont 350 hôpitaux locaux. Chaque hôpital local possède en moyenne cinq à dix lits de médecine et, dans le meilleur des cas, une trentaine de lits de soins de suite et de réadaptation. Il ne serait pas sérieux de leur adjoindre des structures d'addictologie.

Le maillage territorial repose d'abord sur les centres de soins, d'accompagnement et de prévention en addictologie, qui constituent le premier élément – médico-social – du dispositif et sont essentiellement financés par la direction générale de la santé ; ensuite, sur des structures hospitalières qui assurent des soins requérant des compétences médicales et paramédicales spécialisées. Aujourd'hui, nous avons fait le pari d'assurer un niveau I dans toutes les structures d'urgence – plus de 600 sites à l'échelon national.

Plus précisément, selon la circulaire du 16 mai, puis celle du 26 septembre 2007, les établissements de niveau 1 d'offre de soins doivent avoir une consultation d'addictologie, une équipe de liaison et de soins en addictologie et des lits dédiés à l'addictologie, pour des sevrages simples. Ainsi, dans un centre hospitalier de proximité, qui n'est pas forcément un hôpital pivot, la prise en charge de niveau 1 est assurée. C'est déjà considérable, d'autant que le décret relatif aux structures d'urgence oblige chacune d'elles à avoir, à côté, une équipe d'addictologie. En effet, c'est souvent via les urgences qu'arrivent les patients en prise avec de fortes addictions.

Le niveau 2, qui est le niveau de recours, suppose les mêmes structures que le niveau 1, mais avec des lits d'hospitalisation en addictologie pour des soins complexes, un hôpital de jour et des lits de soins de suite et de réadaptation. L'objectif du plan était d'assurer un niveau de recours pour 500 000 habitants. Cela correspond à un département moyen. Voilà pourquoi, sur un petit département, il n'y a pas nécessairement de structure de recours.

Le niveau 3 est le niveau de référence, avec les centres hospitaliers universitaires. Il suppose toutes les structures des niveaux 1 et 2, et celles du niveau 3, qui est consacré à l'enseignement et à la recherche en addictologie. En ce domaine, nous avons des progrès à faire.

Quel bilan peut-on établir aujourd'hui ? Il ne peut s'agir que d'un bilan à mi-parcours, puisque les dernières données dont nous disposons concernent l'année 2009 et que le plan court jusqu'en 2011.

Il faut savoir que ce plan a été mis en oeuvre au moment de la transformation des agences régionales de l'hospitalisation en agences régionales de santé. Pour le premier niveau, l'identification et la contractualisation avec les établissements n'ont pas posé de difficultés. Mais pour les niveaux 2 et 3, les avenants aux contrats n'ont pas nécessairement été conclus, et le suivi n'a pas été de même qualité parce que les équipes des agences régionales de l'hospitalisation commençaient à s'étioler, tandis que celles des agences régionales de santé n'étaient pas encore en place. Je ne peux pas vous assurer qu'en 2011, les objectifs du plan auront été atteints.

Sur les 620 établissements qui déclaraient une activité d'addictologie, on dénombrait 271 équipes de liaison et de soins en addictologie, 441 consultations d'addictologie hospitalière et 261 établissements dotés de lits de sevrage simple ; 150 établissements de proximité étaient globalement bien dotés et correspondaient au niveau 1. Cela signifie que les autres avaient mis en place ou l'équipe de liaison, ou la consultation, ou les lits, mais pas l'ensemble des prestations requises, telles qu'elles ont été définies dans le plan. Nous sommes donc loin du compte.

S'agissant des niveaux de recours, on comptait 55 établissements dotés d'un hôpital de jour avec une activité d'addictologie, et 51 unités de soins complexes reconnues, plus une vingtaine d'établissements de recours non dorés de lits de soins de suite et de réadaptation et une soixantaine d'établissements en étant pourvus.

Près de 25 % des établissements disposant d'une unité pour sevrage complexe reconnue sont des établissements autorisés en psychiatrie, et plus de la moitié des hôpitaux de jour se trouvent dans des établissements autorisés en psychiatrie. Cela illustre la forte implication des établissements psychiatriques. Mais ce ne sont pas des sites de structure d'urgence, même s'ils font le lien avec les urgences.

À mi-étape, nous avions atteint la moitié de l'objectif d'un niveau 2 pour 500 000 habitants : on compte 50 ou 60 établissements au lieu des 110 prévus.

C'est sur les niveaux de référence régionaux, c'est-à-dire l'enseignement et la recherche, que notre retard est le plus important. En effet, un tiers des régions seraient couvertes. Mais il ne s'agit là que d'un bilan de mi-étape.

Sur ces sujets d'importance, il convient d'être modestes. Mais on ne peut pas dire que rien n'a été fait. Une structuration, qui n'est d'ailleurs pas si complexe que cela, s'est mise en place. Je précise que la graduation en trois niveaux correspond à celle de l'ensemble des activités hospitalières : la proximité, le recours et la référence.

J'en viens à nos relations avec la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie, qui sont beaucoup moins fréquentes et beaucoup moins suivies que celles qu'elle entretient avec la direction générale de la santé. J'essaie néanmoins de travailler en complémentarité avec la mission et de l'appuyer dans la mise en oeuvre de certaines de ses orientations.

Premièrement, nous intervenons dans la formation des professionnels de santé, qui relève de la compétence de la direction générale de l'offre de soins. Par exemple, en 2008, dès la deuxième année du plan, nous avons retenu l'addictologie comme l'une des cinq orientations prioritaires dans les directives que nous adressons à l'ensemble des établissements pour la formation des professionnels de santé de la fonction publique hospitalière. Trois cent cinquante professionnels ont déjà été formés à l'addictologie entre 2008 et 2010. Ils sont employés par des établissements sanitaires, médico-sociaux ou sociaux – car la fonction publique hospitalière couvre toutes les structures.

Deuxièmement, la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires et la mise en place du développement professionnel continu nous ont amenés à penser différemment la formation des professionnels de santé. Nous avons décidé de décloisonner le champ ambulatoire et le champ hospitalier, ainsi que la formation médicale et la formation paramédicale. En addictologie, il serait en effet particulièrement intéressant de développer des actions communes. C'est une des ambitions que nous nourrissons, mais les décrets n'étant pas encore parus, nous devrons attendre.

Dans les plans de formation, nous nous attachons malgré tout à prendre en compte les comorbidités des personnes sujettes à des comportements addictifs. Les comorbidités psychiatriques sont fréquentes. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle, pour le niveau 2, les structures psychiatriques se sont fortement engagées. Mais nous nous intéressons aussi aux comorbidités liées à des maladies infectieuses – les hépatites, notamment – et à certains cancers – mais cela concerne plutôt le tabac.

Troisièmement, nous menons des actions de prévention et de prise en charge liées à la consommation de substances psychoactives pendant la grossesse. Ces actions-là sont conduites essentiellement par les équipes de liaison et de soins en addictologie, souvent à la demande des professionnels des maternités. Elles prolongent les actions préventives conduites par la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie.

Vis-à-vis de la population détenue, qui fait l'objet d'attentions particulières, nous avons engagé des actions d'information sur les maladies infectieuses. Cette information fait partie de la consultation médicale d'accueil du détenu. Elle est d'ailleurs reprise dans un guide méthodologique qui concerne la prise en charge des soins des détenus au soin des établissements pénitentiaires.

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