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Intervention de Lucien Dumont-Fouyat

Réunion du 19 janvier 2012 à 9h15
Commission d'enquête relative aux modalités, au financement et à l'impact sur l'environnement du projet de rénovation du réseau express régional d'Île-de-france

Lucien Dumont-Fouyat, président du Comité des partenaires du transport public, CPTP :

Membre du CPTP depuis sa création en 2002, je le préside depuis octobre 2010, et pour quelques jours encore, jusqu'à l'achèvement des trois mandats autorisés par le décret relatif au CPTP.

Le fonctionnement du comité est quelque peu original, puisque, tous les dix-huit mois, on procède régulièrement à la nomination d'un nouveau président et du représentant du Comité au sein du conseil d'administration du STIF. Le Comité ne joue qu'un rôle consultatif auprès du STIF, sur le fonctionnement duquel son influence est assez réduite.

Cette année, le CPTP s'est saisi deux fois, à mon initiative. C'est une première, puisqu'il n'y avait jamais eu d'autosaisine du Comité.

Alors qu'il s'agit en principe d'un organisme paritaire, sa composition est déséquilibrée, au détriment des utilisateurs des transports collectifs – je préfère ce terme au vilain mot d « usager » – et des organisations patronales, représentés respectivement par cinq membres, contre sept représentants des collectivités locales et sept des syndicats de salariés. Ce déséquilibre interdit automatiquement la pleine expression du point de vue des utilisateurs ou des chefs d'entreprise. C'est la raison pour laquelle j'avais proposé qu'on rééquilibre la composition du Comité en portant à vingt-huit le nombre de ses membres, soit quatre fois sept représentants. Cette modification n'aurait eu aucune incidence budgétaire, les membres du CPTP n'étant pas rétribués. Elle a pourtant été refusée.

Le CPTP peut être consulté sur toute question relative à l'offre et à la qualité des services de transport de voyageurs ainsi que sur les orientations de la politique tarifaire et du développement du système des transports d'Île-de-France.

La situation actuelle du RER est due à un effort d'investissement insuffisant dans les transports en Île-de-France depuis une trentaine d'années, en dépit de choix initiaux pertinents. Lors la décentralisation du Syndicat des transports d'Île de France (STIF), la Région, la ville de Paris et les départements de l'Île-de-France ont hérité d'une situation difficile. Le CPTP a pu apprécier la politique menée pour moderniser le réseau et améliorer la qualité du service. Ainsi le STIF a développé depuis 2006 une nouvelle offre dans tous les modes de transport – trains, métros, bus, tramways – pour près de 500 millions d'euros, et a lancé une grande politique de renouvellement et de rénovation du matériel roulant qui représente près de trois milliards d'investissements.

Surtout, il a lancé les schémas directeurs des lignes de RER, à l'initiative de Mme Sophie Mougard, directrice générale du STIF. Les membres du CPTP ont apprécié cette approche globale et ambitieuse, qui porte à la fois sur l'infrastructure, le matériel roulant et la qualité de service dans son ensemble, ainsi que sur l'offre de transport.

La réussite de schémas directeurs ne tient pas qu'à la capacité à réunir de l'argent. Il faut relever cependant que l'État, la Région et les départements ont su, à travers le Plan de mobilisation et le réseau de transport du Grand Paris, mobiliser l'argent nécessaire, non seulement pour développer le réseau, mais aussi moderniser les réseaux existants et tout particulièrement le RER. Dans ce cadre, le STIF a su tenir son rôle d'autorité organisatrice en réunissant tous les acteurs autour de la table, Réseau ferré de France (RFF), SNCF, RATP et financeurs, pour trouver des solutions et avancer.

À ce propos, puisque vous m'avez interrogé sur les liens que le CPTP entretient avec, la RATP ou la SNCF, je vous répondrai que nous n'entretenons aucun lien. Jamais un représentant de la SNCF, ni de la RATP, et encore moins de RFF n'est venu présenter devant notre instance des propositions d'amélioration du service. Quant aux comités de ligne, nous recevons leur convocation si tardivement que nous n'avons guère la possibilité matérielle d'assister à leurs réunions.

Mais la réussite des schémas directeurs du RER tient aussi à la capacité de RFF, de la SNCF et de la RATP à mener à bien, dans des délais raisonnables, les études et les travaux qui leur sont confiés. Pour parler franchement, RFF et la SNCF peinent trop souvent à honorer les rendez-vous qui leur sont fixés, du fait de problèmes de coordination entre eux, mais aussi de leurs propres manques : une ingénierie moins performante, une priorité donnée à d'autres projets que les lignes de RER et les transports quotidiens. Il y a là un vrai problème. Dans de telles conditions en effet, la demande par les opérateurs de nouveaux plans d'investissement toujours plus gourmands en crédits tend à ressembler à « une fuite en avant ».

En effet, si des investissements importants et durables sont nécessaires pour améliorer la régularité des lignes de RER, beaucoup d'argent a déjà été dépensé : 500 millions d'euros pour le RER B, autant pour le RER D, et plusieurs centaines de millions d'euros sont prévus pour la rénovation de la ligne C du RER. Ces investissements ne doivent pas dédouaner les opérateurs de tout effort d'amélioration de la régularité. À ce sujet, je rappelle que chaque réunion du CPTP est l'occasion pour les utilisateurs de se plaindre amèrement de l'absence de régularité du RER, le fonctionnement du métro et des autobus suscitant en revanche peu de critiques. Faire rouler les trains, exploiter des réseaux, c'est quand même le coeur de métier de la RATP et de la SNCF. C'est un point essentiel qu'il ne faut jamais perdre de vue.

En tant que membre de longue date du CPTP, j'ai remarqué que, lorsque le STIF et l'ensemble des collectivités se fâchent, la régularité s'améliore significativement. Cela prouve bien qu'il est important de ne pas relâcher la pression sur les opérateurs, notamment via les contrats qu'ils passent avec le STIF. Grâce à des indicateurs chiffrés et au système incitatif de bonus-malus, ceux-ci ont permis des avancées, du moins à la RATP, la SNCF obtenant tous les ans un malus.

La ligne A du RER est victime de son succès : transportant désormais plus d'un million de voyageurs par jour, elle est à la limite de ses capacités. Le STIF avait, dès 2008, demandé à la RATP de prendre des mesures d'urgence dans le cadre d'un schéma directeur et le CPTP avait approuvé cette démarche. Les mesures d'urgence prises par la RATP ont, certes, permis une amélioration de la situation. Le nouveau matériel roulant MI09 à deux niveaux, que le STIF a contribué à financer à hauteur de 600 millions d'euros, devrait permettre d'améliorer encore le trafic. Enfin, le prolongement du RER E à l'Ouest devrait à terme mettre fin à la saturation de cette ligne. Les études sont en cours, mais il faut savoir qu'il s'écoule en moyenne cinq ans entre le lancement d'un projet et sa réalisation. Cinq ans, c'est long pour des usagers qui subissent quotidiennement des retards de train.

S'agissant du RER B, la réalisation sur la partie nord d'un schéma directeur, le RER B Nord +, pour 500 millions d'euros, est bien avancée. Nous avons exprimé notre regret que la SNCF refuse de prendre des engagements formels d'amélioration de la régularité, en contrepartie de l'effort d'investissement réalisé au bénéfice de cette ligne et de la nouvelle offre cadencée qui doit être mise en place en 2013. Aujourd'hui, la régularité de cette ligne est insuffisante : selon l'indicateur de régularité publié en septembre dernier par le STIF, 82,3% des voyageurs arrivent à l'heure ou avec un retard de moins de cinq minutes, alors que le contrat prévoit un objectif de 94%. La différence peut sembler faible à certains, elle n'en révèle pas moins un dysfonctionnement chronique.

La crise survenue à l'automne du fait de la présence d'amiante a aggravé la situation. Les membres du CPTP, notamment les représentants des usagers, ont déploré d'avoir été insuffisamment informés par la RATP. Sur ce point, l'intervention du STIF a été déterminante en ce qu'elle a permis aux élus et aux usagers de recevoir une véritable information dans le cadre de réunions qu'il a organisées.

En ce qui concerne le RER C, qui souffre de dysfonctionnements encore plus marqués que la ligne B, le schéma directeur a là aussi prévu des investissements importants. En outre, la convention spéciale transport, signée en septembre dernier, prévoit des financements complémentaires destinés aux projets urgents de modernisation de cette ligne.

Quant au RER D, c'est la ligne qui concentre les critiques les plus sévères des utilisateurs quotidiens.

Il ne faudrait pas que la RATP, la SNCF et RFF se dédouanent de leurs responsabilités dans l'exploitation quotidienne des lignes du RER, sous prétexte que de grands investissements sont d'ores et déjà programmés. Ces projets ne devant pas être achevés avant plusieurs années, il est à craindre que les usagers aient encore longtemps à souffrir des manquements du RER.

J'ajoute que les réserves formulées par les représentants des usagers sur le cadencement mis en place par la SNCF, en décembre dernier, sont à l'origine d'une des deux autosaisines du CPTP, qui n'a cependant pas obtenu de la SNCF la possibilité de participer à la définition de ce nouveau système. À l'usage, celui-ci s'est révélé toutefois moins catastrophique qu'on pouvait le craindre.

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