Il existe un fort développement de la prostitution tant féminine que masculine dans nos villes grandes ou moyennes. Beaucoup de ces personnes sont toxicomanes par voie intraveineuse. En outre, un certain nombre de clients refusent le préservatif. Ce milieu vous inquiète-t-il particulièrement ? Les campagnes de prévention et de protection sont-elles un échec dans ce secteur ?
Docteur François Bourdillon. Le Conseil national du sida a émis un avis sur la prostitution l'année dernière. Il a constaté une prostitution multiforme -prostitution pour raisons économiques, « escort-girls », prostitution masculine et même transsexuelle.
Lors de l'audition d'un certain nombre de professionnels, nous avons constaté que les politiques répressives avaient eu pour effet de faire reculer la prostitution au-delà du périphérique, au-delà du bois de Vincennes. Les gens se cachent. Plus c'est le cas, plus il est difficile pour les travailleurs sociaux de pouvoir les approcher.
Y a-t-il plus de risques pour le client ou pour la personne prostituée d'être contaminé ? La transmission dépend bien entendu du nombre de rapports sexuels, de la fréquence et de la prévalence de l'infection par le VIH ou autres maladies sexuellement transmissibles. La politique de réduction des risques est, pour ces populations, basée sur l'utilisation du préservatif. Celle-ci est complexe : elle est vécue par un certain nombre de prostituées comme un élément permettant aux forces de police de les repérer.
Des problèmes de qualité de préservatif ont également été dénoncés. Il est par ailleurs vrai qu'un certain nombre de clients paient plus cher -et même parfois très cher- pour avoir des rapports non protégés. Cela peut paraître incompréhensible mais la vie est ainsi faite. La question majeure qui nous a semblé se poser est plutôt celle de l'accès des prostituées au dispositif de soins et médico-social.
Certaines personnes prostituées, hommes ou femmes, utilisent des psychostimulants, des drogues de synthèse ou s'injectent des produits par voie intraveineuse.
Souvent, la prostituée fait l'amour sans préservatif avec son partenaire régulier. Il y a probablement là un risque d'exposition supplémentaire, dans les deux sens. C'est un sujet très complexe pour lequel le tissu social est extrêmement fragile.