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Intervention de Alain Meyère

Réunion du 17 janvier 2012 à 9h00
Commission d'enquête relative aux modalités, au financement et à l'impact sur l'environnement du projet de rénovation du réseau express régional d'Île-de-france

Alain Meyère, directeur du département « Mobilité et Transport » de l'Institut d'aménagement et d'urbanisme d'Île-de-France :

En ce qui concerne la desserte de la banlieue, les métropoles européennes comparables à Paris ne connaissent effectivement pas cette frontière, qui correspond à peu près au périphérique, entre une commune centre relativement peu étendue et sa banlieue. En outre, le bus y joue un rôle beaucoup plus important qu'en Île de france. À Londres, par exemple, plusieurs dizaines de lignes de bus circulent vingt-quatre heures sur vingt-quatre. C'est une différence entre l'Île-de-France et la province : il est frappant que les Franciliens perçoivent le bus comme un moyen de transport « au rabais », ce qu'il n'est pas du tout le cas à Nantes ou à Bordeaux !

Les pénalités encourues sont-elles suffisamment lourdes pour être pédagogiques ? Lorsque les premiers contrats ont été signés, dans les années 2000, elles n'étaient pas très élevées. Mais, au-delà de l'aspect financier, les exploitants peuvent être sensibles au fait de percevoir des bonus quand d'autres paient des pénalités. Sans doute faudrait-il donc donner plus de publicité aux résultats, comme on le faisait il y a quelques années.

En ce qui concerne le taux de fraude, comptabilisé avec les incivilités au titre des causes externes des perturbations, force est de constater qu'il est moins élevé dans les autres réseaux européens. Il faudrait étudier cette particularité française.

Le RER a pour principale fonction de mailler le centre de Paris, notamment grâce à des correspondances avec de nombreuses lignes. En ce sens, il serait inopportun qu'il desserve uniquement des gares terminus. 1 % des déplacements seulement s'effectuent de banlieue à banlieue via Paris ; en revanche, ce rôle de diffusion des voyageurs dans le centre est essentiel. Le principe d'un RER traversant Paris et s'arrêtant juste après ne devrait pas susciter d'objection majeure de la part des usagers.

On donne une image erronée de la structure des déplacements en Île-de-France en se contentant de rappeler que 70 % d'entre eux sont des trajets de banlieue à banlieue. Il faut préciser que les 30 % de déplacements depuis ou vers Paris sont pour moitié internes à Paris et pour moitié des échanges entre Paris et la petite ou la grande couronne. Mais les déplacements entre la banlieue et Paris sont bien plus importants si l'on tient compte du nombre de kilomètres parcourus, comme nous y a invités Jean-Pierre Orfeuil. En outre, on a tendance à assimiler les 70 % de déplacements de banlieue à banlieue à des déplacements en rocade, alors qu'il faut en décompter environ 20 % de déplacements intra communaux ; ils s'effectuent notamment en voiture ou en bus. Les déplacements en banlieue, ce sont aussi des trajets brefs, à pied ou à vélo, ils ne sont donc pas seulement effectués dans Paris. S'y ajoutent 15 à 20 % de trajets inter communaux, mais radiaux : de Gif-sur-Yvette à Juvisy-sur-Orge ou de Marne-la-Vallée à Val de Fontenay, par exemple. En d'autres termes, quand on travaille sur les lignes radiales, on contribue aussi à améliorer les conditions des déplacements de banlieue à banlieue. Les déplacements en rocade, qui ne sont pas nécessairement très longs, d'ailleurs, ne représentent que le solde, soit moitié moins que les 70 % qu'on a tendance à leur attribuer.

Dans le cadre d'un programme de recherche, nous étudions la mobilité des Franciliens selon leur lieu d'habitation, de Paris aux zones péri urbaines situées au-delà de la zone agglomérée. Pour analyser la mobilité, on comptabilise habituellement le nombre de déplacements par personne et par jour. Si l'on en soustrait le trajet de retour à domicile, on obtient le nombre d'activités qui constituent le but des trajets : quand on se déplace, on va travailler, retrouver des amis, faire des courses, etc. Cela permet de mesurer l'intensité de la vie sociale des personnes étudiées. Or ce chiffre s'est stabilisé depuis longtemps à 3,5 déplacements en moyenne par personne et par jour, quel que soit le lieu d'habitation en Île-de-France. À mesure que l'on s'éloigne de Paris, la longueur moyenne des trajets augmente et la voiture est de plus en plus utilisée, car les transports collectifs sont de moins en moins présents. En revanche, la durée moyenne des déplacements est stabilisée à une heure et demie par jour, et les horaires de départ et de retour sont eux aussi à peu près identiques partout. La zone périurbaine est la seule où les distances vont en croissant au fil du temps.

On note enfin le recours massif à la voiture. À cet égard, la hausse du prix de l'énergie, encore relativement limitée, risque de révéler la fragilité de la situation de certains ménages, dont elle compromettra fortement la mobilité à l'avenir.

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