Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Alain Bonnafous

Réunion du 29 mars 2011 à 17h30
Commission d'enquête sur la situation de l'industrie ferroviaire française: production de matériels roulants voyageurs et frets

Alain Bonnafous, professeur émérite, chercheur au Laboratoire d'économie des transports :

Un rapport avait été rendu en 2005 par le professeur Rivier, aujourd'hui décédé, de l'École polytechnique fédérale de Lausanne, sur l'état du réseau français. Ce document avait notamment permis de révéler que le coût de l'entretien des lignes au kilomètre est, en France, le double de ce qu'il est en Suisse. En revanche, les cheminots suisses sont plutôt mieux payés que leurs homologues français ; il est vrai que l'organisation du travail est complètement différente en Suisse. En France, la SNCF a beaucoup souffert des nouveaux critères de gestion destinés à maximiser la valeur ajoutée de l'entreprise, c'est-à-dire la masse salariale, car ces nouveaux critères particuliers se sont traduits, dans les faits, par l'absence de tout effort en matière de productivité : c'est donc la collectivité, dans son ensemble, qui en paie les conséquences. De plus, la pression financière qui s'exerce sur le système ferroviaire français fait que nos cheminots, contrairement au passé, deviennent les moins bien payés d'Europe. Sans être marxiste, ne conviendrait-il pas de poser la question en termes d'essor des forces productives ? Le refus du gain de productivité, inhérent au système, a des origines d'ordre anthropologique. Il fut un temps où le cheminot avait pour ambition de voir ses enfants entrer à la SNCF : la contraction de l'emploi consécutive aux progrès techniques n'était donc pas souhaitable.

L'empilement du RH 077, un document qui réglemente le travail des cheminots, et des multiples accords signés pour résorber les conflits locaux dont la SNCF parlent si peu, entraîne une organisation catastrophique du travail qui est financée par le contribuable à hauteur de 12 milliards d'euros par an. Elle se traduit aussi par une extension du système ferroviaire inférieure à ce qu'elle devrait être, exception faite du TGV, qui bénéficie d'une rente de situation technologique même si la ligne Paris-Lyon n'est peut-être pas exportable car elle est liée à la géographie française. Si elle demeure la ligne « ville à ville » la plus longue du monde et représente une très belle réussite, elle ne permet pas, néanmoins, de pallier le handicap très lourd lié à l'organisation déficiente du système. C'est la raison pour laquelle certains cadres dirigeants de la SNCF et certains responsables syndicaux – en aparté – concluent que la seule manière de débloquer le système est de le baigner dans une relative compétition intramodale, la compétition intermodale n'ayant pas suffi.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion