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Intervention de Laurent Degos

Réunion du 7 avril 2010 à 19h00
Commission d'enquête sur la manière dont a été programmée, expliquée et gérée la campagne de vaccination contre la grippe a

Laurent Degos, président du collège de la Haute Autorité de sant :

Monsieur le rapporteur, nous n'avons pas de « sentiment » à avoir en l'espèce. Nous devons regarder objectivement ce qui s'est passé. Il est très difficile de répondre à votre question au nom de l'ensemble de la Haute autorité de santé, dont chacun des membres peut avoir sa propre opinion sur cette campagne de vaccination.

Celle-ci s'est déroulée de façon logique par rapport à ce qui était attendu. C'est plutôt son résultat qui pose problème. Pourquoi y a-t-il eu finalement aussi peu de personnes vaccinées ? Je me plaisais à rappeler récemment à mes collègues ce qui s'était passé au XVIIIème siècle avec ce qu'on appelait alors l'inoculation. Alors qu'on avait clairement fait savoir qu'il était bénéfique d'être inoculé pour éviter la petite vérole, dix ans plus tard, pas plus de mille personnes avaient été inoculées en France, ce qui prouve bien tout l'irrationnel des comportements de la population.

S'agissant de la grippe A, trois conseils principaux ont été donnés pour éviter la contamination par le virus et la propagation de la maladie : se laver régulièrement les mains, porter un masque et se faire vacciner. Chacun s'est lavé plus fréquemment les mains, et il y a eu moins de gastro-entérites cet hiver. Personne en revanche n'a porté de masque, jugé inconfortable. Quant à la vaccination, seule une minorité, peut-être éclairée, y a eu recours.

Pourquoi cette attitude ? Simplement parce que les gens se demandaient s'il n'y avait pas un risque à se faire vacciner. Des rumeurs ont couru comme quoi une complication pourrait être l'apparition d'un syndrome de Guillain-Barré. Des questions ont été soulevées sur l'intérêt ou non des adjuvants. Tout cela a inquiété la population. Et les gens ont préféré courir le risque d'attraper la grippe plutôt que d'avoir l'impression de choisir délibérément un risque en allant se faire vacciner, aussi infime, voire nul qu'ait été ce risque. Cette attitude échappe à la raison.

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