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Intervention de Paul Giacobbi

Réunion du 23 mars 2011 à 16h00
Mission d'information sur la compétitivité de l'économie française et le financement de la protection sociale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul Giacobbi :

Je voudrais signaler ici un réel paradoxe : la France est le pays le plus nombriliste du monde et il ne cesse de se chercher des modèles ! Voilà vingt ans, c'était le Japon – excellente référence lorsque l'on voit où se situe ce pays après la « décennie perdue » ! –, puis nous connûmes une petite crise danoise avant, donc, le syndrome allemand qui nous atteint aujourd'hui. J'attends avec impatience que nous succombions demain au syndrome indien.

Il convient également de rappeler que l'Allemagne connaît quelques difficultés : outre que les banques allemandes possèdent 900 milliards de créances recouvrables, la banque immobilière Hypo Real Estate pèse un peu plus sur les finances publiques de l'État allemand que la sécurité sociale sur les nôtres.

Par ailleurs, c'est une erreur d'affirmer que la compétitivité est exclusivement conditionnée par les prix et les coûts et je reconnais qu'aucun d'entre vous ne l'a prétendu. Lorsque je travaillais dans l'industrie, je n'ai jamais eu l'occasion d'entendre un seul industriel se plaindre au premier chef du coût du travail. Un grand industriel de l'équipement automobile m'a confié que, lorsque l'on tient compte d'un certain nombre de facteurs, dont celui de la productivité du travail, le coût du travail de ses 7 000 salariés employés en Inde est globalement égal à celui des Français, le coût des managers y étant en effet deux fois plus important que dans notre pays. J'ajoute que, depuis le début de cette mission et sur un plan plus théorique, la lecture de Nicholas Kaldor et Joan Robinson sur l'élasticité et l'imperfection des marchés me console.

Les industriels, en revanche, mettent en avant les problèmes de financement des petites et moyennes entreprises et de la désaffection des élites. Je veux vous compter une petite anecdote personnelle : si mon propre père était flatté que je fisse l'École nationale d'aministration, il déchanta lorsque je partis travailler dans l'industrie pendant sept ans : premier des Giacobbi à franchir le pas, j'étais un pauvre type perdu pour la République !

De surcroît, si nos exportations ne sont guère florissantes, c'est parce que nous sommes frappés de folie. Nous voulons ainsi vendre en Inde des Rafale – quand tel sera le cas, je serai cardinal – et des centrales nucléaires à Jaitapur – là, je serai pape. Or, cela implique que le gouvernement de l'Union indienne réussisse à faire voter une loi rectificative – alors qu'il n'a pas réussi à faire passer un seul texte depuis six mois – modifiant une loi de 2010 prévoyant la mise en cause du constructeur étranger en cas d'accident nucléaire. Pendant que nous nous concentrons sur l'exportation d'énormes bêtes, les Allemands vendent 10 000 machines-outils ! De la même manière, il n'y a pas de quoi sauter de joie lorsque nous vendons un Airbus quand il serait bien plutôt préférable d'exporter mille pièces qui servent à le constituer !

Enfin, j'invite notre mission à se rendre à Gurgaon, en Inde, entre le Silver Center et les malls, pour y voir éclore la modernité. Ce n'est pas en Allemagne que cela se passe !

L'Occident s'effondre ! Alors qu'en 2005 la production automobile chinoise était loin derrière celle de l'Europe et de l'ensemble États-Unis–Mexique, les prédictions pour 2015 faisaient état d'une production de 17 millions de véhicules pour ces deux derniers pays contre 16 pour l'Europe et 13 pour la Chine. La réalité, en 2010, était la suivante : la Chine a produit 17 millions de véhicules, contre 12 pour l'Europe et 14 pour l'Amérique du Nord.

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