Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le rapprochement familial des détenus d'origine corse comme de tous les détenus est un engagement de l'État. Il est donc de notre devoir d'élus de la nation, mais c'est aussi une exigence de notre conscience, de le rappeler au Gouvernement au nom des familles et des détenus qui vivent, dans la souffrance, cette séparation imposée. Les liens familiaux se délitent et la vie sociale s'émiette. Le détenu devient alors un sacer esto, c'est-à-dire un être qui n'est plus social.
Nous ne pouvons nous y résoudre. Et c'est à juste titre que la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 a consacré le principe du rapprochement familial des détenus. Ce principe représente incontestablement une avancée majeure. Il constitue pour de nombreuses familles une étape décisive dans la préservation des liens familiaux.
Cette exigence que je porte est avant tout un combat mené par celles et ceux qui vivent cette situation pénible. Si la privation de liberté peut évidemment être légitime, elle ne saurait cependant s'accompagner d'un bannissement au sein de sa propre famille. Pour les familles, en effet, l'exercice du droit de visite représente une lourde charge qui, bien souvent, obère le budget des ménages. La reconnaissance de ce droit est donc légitime.
De nombreux détenus d'origine corse étaient maintenus sur le territoire métropolitain. Certains d'entre eux sont retournés en Corse, et il faut vous en remercier, monsieur le garde des sceaux
La prison doit être un lieu où les relations familiales se perpétuent, et cela dans les meilleures conditions possibles, notamment dans le respect de l'intégrité et de la dignité de l'homme. La démarche engagée doit être poursuivie et être satisfaisante pour tous. On ne le redira jamais trop : le lien familial est capital dans le processus de réinsertion et dans la lutte contre la récidive – qui est aussi un objectif majeur.
C'est pourquoi il est indispensable que la situation des détenus fasse l'objet d'une attention particulière prenant en compte la spécificité de la séparation géographique d'avec leur famille. Une telle prise en compte est non seulement nécessaire, mais également fondamentale.
Disons-le, en effet, l'exercice par ces familles de leur droit de visite est semé de difficultés multiples, tant matérielles que financières, mais aussi psychologiques.
Devant cette situation, une solution rapide a été envisagée : le transfèrement des détenus du continent vers les établissements pénitentiaires de Casabianda ou de Borgo, en Corse. Cette solution est conforme à l'article 34 de la loi pénitentiaire selon lequel « les prévenus dont l'instruction est achevée et qui attendent leur comparution devant la juridiction de jugement peuvent bénéficier d'un rapprochement familial jusqu'à leur comparution devant la juridiction de jugement ».
De nombreux prisonniers sont rentrés et ce texte n'apporte pas un nouveau droit. Il ne s'agit pas de droit positif, mais d'un rappel, d'un souhait de justice à un moment où la misère est grandissante ; et nous savons tous que la misère et l'injustice font le lit de la violence.
Ce rapprochement doit se faire dans de bonnes conditions. C'est aussi pour cette raison que la construction d'un centre de détention supplémentaire permettrait de répondre aux attentes des détenus, mais également à celles du personnel pénitentiaire, dont les conditions de travail se dégradent en raison de la surpopulation carcérale.