L'objectif et les conditions de cette réunion appellent une déclaration préalable de ma part. Il faut d'abord rappeler le contexte dans lequel s'inscrit la proposition de loi de notre collègue. Celle-ci vient clore le parcours chaotique de la commission d'enquête sur le financement des acteurs du dialogue social, parcours qui a dès le début nourri la défiance vis-à-vis des syndicats de salariés. Les travaux de cette commission, qui n'ont pas été publiés faute d'accord au sein de la majorité, ont fait l'objet de fuites nauséabondes dans la presse, atteignant ainsi l'objectif que visaient ses auteurs : attacher aux organisations syndicales de salariés le soupçon de fraudes et de gabegie.
Nous sommes fondés aujourd'hui à nous interroger sur l'objet réel des tables rondes ouvertes à la presse organisées par la Commission des affaires sociales. S'agit-il, comme le prétend la convocation, de recueillir le sentiment des partenaires sociaux sur cette proposition de loi-alibi ? D'un moyen pour la majorité de donner aux partenaires sociaux l'occasion d'apaiser les querelles comme vous en avez, après le président Accoyer, exprimé le souhait, monsieur le président ? Si la majorité avait eu effectivement à coeur de lever tous les doutes sur le rapport Perruchot, la Commission aurait pu décider d'entendre son auteur présenter les grandes lignes de son travail, après quoi nous aurions pu légiférer sereinement, à condition toutefois qu'une intervention législative se justifie et qu'elle respecte le temps de la consultation des partenaires sociaux et ne vienne pas court-circuiter les travaux en cours. Or tel n'est pas le cas aujourd'hui puisqu'un groupe de travail a été créé, sous l'égide de la direction générale du travail, pour combler les lacunes de la réglementation actuelle relative aux comptes des comités d'entreprise. Cette initiative législative est donc inacceptable.
Invoquant dans un exposé des motifs orienté le rapport de la Cour des comptes consacré à la gestion des activités sociales de la RATP, cette proposition de loi contribue à alimenter la campagne de dénigrement des organisations de salariés comme les doutes sur un fonctionnement prétendument « anormal » des comités d'entreprise. Un tel exposé des motifs est, en outre, pour le moins incomplet puisqu'il oublie de mentionner le fait que, depuis sa recodification, le code du travail dispose dans son article R. 2327-37 que « le bilan établi par le comité est approuvé par le commissaire aux comptes de l'entreprise. ». Cette disposition, qui s'impose de fait à tous les comités d'entreprise sans distinction de niveau de ressources, les oblige déjà à faire certifier leurs comptes, comme un décret l'avait fait pour les organisations syndicales et professionnelles. Elle soulève cependant de nombreuses difficultés d'application que se propose justement de lever le groupe de travail constitué par M. Xavier Bertrand. Laissons ce groupe aller au terme de ses travaux.
Dans ces conditions, nous n'avons d'autre option que de réitérer notre condamnation de la manoeuvre politicienne menée par le groupe Nouveau Centre et par une partie de la majorité, et de nous opposer aux solutions largement prématurées quand elles ne sont pas fausses que l'on prétend, avec cette proposition de loi, substituer à l'indispensable réflexion sur les moyens de rendre plus transparents les comptes des comités d'entreprise.