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Intervention de Anne d'Ornano

Réunion du 20 décembre 2011 à 17h00
Commission spéciale chargée d'examiner la proposition de loi sur l'enfance délaissée et l'adoption

Anne d'Ornano, vice-présidente du conseil général du Calvados :

Nul n'ignore que depuis quelques décennies, les problématiques de l'adoption sont en constante évolution. N'oublions pas que nous avons d'abord affaire, du côté des adoptés, à des êtres humains, fragiles et meurtris et, du côté des adoptants à des personnes ayant besoin de transmettre de l'affection. Il est donc probable que la législation devra évoluer fréquemment pour s'adapter.

Délivré par le président du conseil général, l'agrément est le premier pas dans la démarche d'adoption. Il est souvent considéré par les candidats comme une formalité, voire comme un dû, d'autant qu'en cas de recours après un refus, le tribunal donne fréquemment raison aux postulants à l'adoption – au point que certains départements, découragés, ont pratiquement renoncé à refuser l'agrément.

Or l'objet de l'agrément est de donner à quelqu'un la possibilité d'avoir tous les droits sur un enfant, y compris celui de le rejeter. L'agrément ne doit donc pas seulement être conçu comme la reconnaissance d'une capacité à adopter, mais comme un véritable outil de protection de l'enfance. Il doit aussi devenir le garant des possibilités d'évolution et des capacités d'adaptation des adoptants. C'est ce que tend à faire – et je m'en réjouis – la proposition de loi, en redonnant sa finalité à l'agrément (s'assurer que la demande est conforme à l'intérêt et aux besoins spécifiques de l'enfant) et en remettant l'enfant au coeur du dispositif. L'échec de l'adoption, les drames qu'il engendre et le retour de ces enfants deux fois abandonnés dans les services sociaux sont tout simplement insupportables.

La formation préalable à la demande d'agrément me paraît donc primordiale. Le département du Calvados est volontaire pour expérimenter les modules d'information et le cycle de réunions de quatre modules, de trois heures chacun, proposé par le Conseil supérieur de l'adoption. Il serait même intéressant de poursuivre cette démarche pendant la période post-agrément, qui est souvent longue et difficile. Il paraît enfin utile d'ouvrir, comme cela est proposé, le plus possible de consultations d'orientation et de conseil en adoption (COCA), afin d'assurer un accompagnement médical professionnel aux familles une fois que l'enfant tant attendu est arrivé, avec un bagage souvent plus chargé de douleurs qu'on ne l'imagine.

La nature et la qualité des procédures d'évaluation sociale et psychologique des agréments étant très disparates selon les départements, j'appelle de mes voeux la mise en place d'un encadrement par l'élaboration d'un référentiel commun.

J'en viens au délaissement parental. En tant que présidente de conseil général, je me suis toujours étonnée de retrouver année après année les mêmes enfants dans les foyers que je visitais. La moyenne du temps de placement est, je crois, de six ans, ce qui semble bien long dans la vie d'un enfant. C'est donc une bonne chose que de rendre plus accessible l'accueil dans une vraie famille. Néanmoins, comme le rappellent les travailleurs sociaux, il ne suffit pas toujours qu'un enfant soit juridiquement adoptable pour l'être psychologiquement : les blessures subies peuvent le conduire à refuser sa confiance aux adultes et à rejeter les notions de liens et d'attachement.

Les présidents de conseil général sont pleinement conscients de l'importance de l'agrément, dont la délivrance constitue souvent pour eux un choix difficile. La réforme proposée va dans le bon sens, celui du bien des familles comme de celui des enfants qui seront adoptés en France.

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