Ce n'est pas parce que le mineur sera convoqué dans les cinq jours que le suivi proprement dit débutera plus vite.
Afin de garantir une prise en charge rapide et efficace du mineur, il faut donner à la PJJ les moyens humains et matériels de remplir sa mission. C'est à cette seule condition que les mesures ordonnées en réponse à l'acte du mineur pourront être mises en oeuvre rapidement.
Certes, le texte prévoit un renforcement ciblé des effectifs dans vingt-neuf départements retenus comme prioritaires. Mais, au-delà du caractère très imprécis et partiel de cet engagement, il convient de rappeler que les moyens de la PJJ n'ont cessé de diminuer avec la révision générale des politiques publiques depuis cinq ans. Depuis 2008, 632 emplois ont été supprimés, soit 7 % des postes de la PJJ, et le budget a été diminué de 6 % ces quatre dernières années. Et si, pour 2012, le budget de la PJJ a été présenté en légère augmentation, c'est uniquement du fait de la transformation d'un certain nombre de foyers éducatifs en centres d'éducation fermés.
Le projet de loi prévoit d'ailleurs d'accroître la capacité d'accueil dans les centres éducatifs fermés, le Gouvernement considérant que, depuis leur création, ces centres ont montré qu'ils étaient des outils efficaces contre la réitération et qu'ils offraient une réponse pertinente aux mineurs les plus ancrés dans la délinquance ou qui commettent les actes les plus graves.
Je ne sais pas sur quelles études se fonde le Gouvernement pour étayer son affirmation. Ce que je sais, en revanche, c'est que le Contrôleur général des lieux de privation de liberté se montre beaucoup moins optimiste. Dans une recommandation en date du 8 décembre 2010, et publiée au Journal officiel, il souligne « le recours abusif, voire usuel, aux moyens de contrainte physique, laquelle est parfois érigée, dans les équipes les moins qualifiées, au rang de pratique éducative », après avoir indiqué qu'« une part du personnel est notamment constituée d'éducateurs “faisant fonction”, parfois sans compétences particulières, peu ou pas formés à l'encadrement des mineurs ». Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté pointe également de grandes variations dans la prise en charge des soins somatiques des mineurs, ainsi que du soin psychiatrique ou de l'assistance psychologique aux enfants. La recommandation indique aussi que les liens avec les psychiatres sont très difficiles à établir, même lorsque la population du centre souffre d'évidentes carences.
Le tableau dressé par le Contrôleur général des lieux de privation de liberté est donc plutôt sombre et bien éloigné, vous en conviendrez, de celui que vous nous dépeignez.
Dans ces conditions, la banalisation des centres d'éducation fermés nous paraît problématique. Nous contestons le fait que cette structure tende à devenir, depuis plusieurs années, l'unique réponse à la prise en charge des mineurs délinquants. Tous les professionnels s'accordent pourtant à dire qu'il est indispensable de disposer de structures diversifiées permettant d'adapter la réponse judiciaire à la situation personnelle du mineur. Non seulement la focalisation sur ces centres fermés est contre-productive, mais elle est onéreuse, puisque le coût d'une journée en centre fermé s'élève à 600 euros contre 490 euros en foyer traditionnel.
Le projet de loi propose enfin de développer un suivi pédopsychiatrique dans les centres d'éducation fermés. Si nous ne pouvons qu'être favorables à cette mesure, et ce d'autant plus que les carences en ce domaine, je l'ai rappelé, sont importantes, il conviendrait cependant que le suivi pédopsychiatrique soit développé dans les autres types d'établissement où des mineurs souffrent aussi de troubles de comportement.
Pour toutes ces raisons, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, le groupe GDR refuse ce projet de loi qui s'inscrit dans la lignée des textes précédemment adoptés ces dernières années, et dont j'ai dit tout à l'heure que le bilan était particulièrement négatif. Notre pays a besoin non de nouvelles prisons, qui seront presque aussitôt surpeuplées en raison des politiques sécuritaires mises en oeuvre, mais de moyens humains et matériels conséquents pour permettre aux juges, à l'administration pénitentiaire, au service pénitentiaire d'insertion et de probation, à la PJJ, de remplir dans de bonnes conditions les missions qui sont les leurs et sur lesquelles repose la crédibilité de notre justice. C'est parce que nous contestons la philosophie même de votre projet de loi que nous considérons qu'il n'est pas amendable et que les seuls amendements que nous déposerons sont des amendements de suppression. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)