C'est au nom d'une logique gestionnaire et comptable que le texte propose une diversification du parc carcéral.
Le Gouvernement souhaite ainsi construire des établissements spécialement conçus pour accueillir des personnes condamnées à des courtes peines et ne présentant pas de dangerosité particulière. Ces établissements auraient des contraintes de sécurité allégées et le taux d'encadrement serait moindre. Leur coût serait donc inférieur à celui des établissements classiques. Or, comme le souligne là encore l'OIP dans une lettre ouverte aux parlementaires datée du 2 décembre dernier, si ces condamnés ne présentent pas de dangerosité particulière, il est permis de se demander pour quelles raisons ils doivent nécessairement purger leur peine en prison. Pour mieux prévenir la récidive, toutes les études montrent qu'il est préférable d'exécuter ces peines en milieu ouvert.
Dès lors, une première étape pour limiter la récidive serait d'éviter le plus possible l'emprisonnement, car celui-ci aggrave la situation sociale, psychique et familiale des personnes et tend à perpétuer les phénomènes de violence et à renforcer les personnes dans un statut de délinquant.
Le Conseil de l'Europe lui-même affirme que, « dans la plupart des cas, la privation de liberté est loin d'être le meilleur recours pour aider l'auteur d'une infraction à devenir membre de la société respectueux de la loi ». Nous partageons pleinement cette analyse et considérons, comme nous l'avions fait valoir dans le cadre de la discussion du projet de loi pénitentiaire, que la privation de liberté doit être considérée comme une sanction ou mesure de dernier recours et ne doit, dès lors, être prévue que lorsque la gravité de l'infraction rend toute autre sanction ou mesure manifestement inadéquate. C'est le sens de la recommandation n° R(99)22 du Conseil de l'Europe concernant le surpeuplement des prisons et l'inflation carcérale, adoptée le 30 septembre 1999.
Afin de garantir une exécution plus rapide des peines, le projet de loi entend aussi renforcer les services d'application et de l'exécution des peines à trois niveaux. Tout d'abord, le texte acte la nécessité de créer des emplois de magistrats et de greffiers entre 2013 et 2017. Sur ce point, nous ne pouvons que souligner la contradiction avec les suppressions d'emplois de magistrats et de fonctionnaires réalisées ces dernières années, en application de la révision générale des politiques publiques, et regretter que le projet de loi ne prévoie pas d'augmentation des effectifs des services d'insertion et de probation, dont l'importance est pourtant indéniable dans l'application et l'exécution des peines.
Ensuite, le texte prévoit la généralisation des bureaux d'exécution des peines et celle des bureaux d'aide chargés d'informer, d'accompagner et d'orienter les victimes d'infractions pénales. Si ces deux dernières mesures vont dans le bon sens, encore faudrait-il que la mise en place des nouveaux bureaux s'accompagne des moyens humains et matériels suffisants, ce qui n'est pas prévu par le texte.
Le deuxième volet du projet de loi, qui vise à prévenir la récidive, est fondé sur la notion pour le moins contestée d'évaluation de la dangerosité. Comme le souligne le Syndicat de la magistrature, elle est devenue l'orientation majeure des lois votées ces dernières années en matière d'exécution des peines.